Les marchés actions européens ont accusé hier une seconde séance de baisse, plombés par le secteur énergétique et la consommation de base. Aux Etats-Unis, le Nasdaq continue à marcher sur l'eau grâce au pari des investisseurs sur l'intelligence artificielle. Quelques gagnants de court terme sont clairement identifiés, à l'image de Nvidia. Pour les autres, ce sont surtout des paris aveugles mais porteurs pour l'indice technologique américain. Tiens, c'est l'occasion de ressortir de mon chapeau quelques réflexions sur ce que l'on attend et ce que l'on n'attend pas en bourse.

Sur les marchés financiers, il y a de nombreuses façons de classer les événements qui se produisent. L'une des plus répandues est de les diviser en "attendus" et "inattendus". Pour grossir le trait, un événement "attendu" n'a pas un grand pouvoir de bouleversement. Ou du moins, il a peu de chances de modifier le cours des choses. Les événements "inattendus", au contraire, sont une source de rupture dans le fil de la narration. Ils sont généralement porteurs de volatilité sur tout ou partie du système financier. Ce sont eux qui font vibrer les investisseurs parce qu'ils créent des situations hors normes, qu'il faut interpréter. La frontière entre "attendu" et "inattendu" est fluctuante. De très bons auteurs soulignent régulièrement qu'elle dépend du niveau de complaisance collective des investisseurs. Cette complaisance était maximale au moment de la bulle spéculative liée à internet au début du millénaire. Plus près de nous, elle l'a été post-covid, quand l'argent était encore gratuit et permettrait de promouvoir des entreprises sans modèle économique viable.

Le problème, c'est qu'il est difficile d'anticiper tout ça. Après tout, c'est de l'économie et l'inattendu est plutôt la norme. D'ailleurs, le terme "inattendu" est un faux ami. Premièrement, il y a ce qui est inattendu parce que le collectif a mal évalué la situation. C'est le cas le plus fréquent. Par exemple, les cours du blé ou du gaz sont au plus bas depuis deux ans et demi actuellement, alors que tout le monde pensait qu'ils resteraient haut perchés, dans la lignée de leur flambée post-invasion de l'Ukraine par la Russie. Autre exemple, le fameux réveil économique chinois après la fin des mesures restrictives liées au covid. Les données publiées cette nuit montrent que le PMI manufacturier s'est contracté à 48,8 points en mai, signe que l'accélération a du plomb dans l'aile. Hong Kong a perdu 20% depuis ses plus hauts du mois de janvier. Le pari embouteillé du premier semestre sur les actions chinoises a fait flop.

Deuxièmement, il y a l'inattendu plus rare, celui que le collectif n'avait pas ou mal vu venir. L'exemple le plus récent est l'explosion de tout ce qui est lié à l'intelligence artificielle. Ce genre d'événement, on le voit, a le pouvoir de faire bouger de grosses masses. Par exemple relancer l'engouement pour les actions technologiques américaines, autant dire pour la bourse dans son ensemble. On l'a vu avec Nvidia, ce genre d'inattendu provoque des réactions du type "acheter d'abord, réfléchir ensuite", parce qu'il faut en être, à n'importe quel prix. D'ailleurs, la nouvelle star américaine des processeurs est brièvement entrée hier dans le club des sociétés pesant plus de 1000 Mds$ de dollars en bourse, qui ne compte que six autres entreprises : le pionnier Apple (depuis le 2 août 2018), Amazon, Microsoft, Alphabet, Meta Platforms et Tesla. Les deux dernières ont depuis quitté la coterie à cause de leurs chutes en bourse. Il faut noter que le géant pétrolier Saudi Aramco (Saudi Arabian Oil Company) fait lui aussi partie du club (2 050 Mds$ de capitalisation), mais sur un flottant ultra-réduit et une cotation à Riyadh. Cette forme d'inattendu fait bouger les lignes avec une puissance… inattendue. Trop parfois, puisqu'apparemment les intelligences humaines qui ont mis au point ces intelligences artificielles ont les miquettes sur la monstruosité qui pourrait se développer.

Retour à des choses plus terre-à-terre. Les dernières statistiques aux Etats-Unis, au Japon et en Chine ne brossent pas un tableau macroéconomique très favorable. Les investisseurs resteront scotchés sur l’évolution du projet de loi sur le relèvement du plafond de la dette aux Etats-Unis, qui doit cheminer à la Chambre des représentants ce soir. Dans la foulée, c'est son passage au Sénat qui risque encore de provoquer des frictions, puisque la frange dure du parti républicain digère mal le compromis trouvé entre Joe Biden et Kevin McCarthy. Les débats risquent de durer jusqu'au weekend. Le marché obligataire a toutefois réagi positivement aux dernières avancées puisque le rendement de la dette américaine à dix ans a perdu plus de dix points pour revenir autour de 3,67%. En Europe ce matin, ce sont les données préliminaires de l'inflation de mai en France et en Allemagne qui susciteront le plus d'intérêt.

En Asie-Pacifique, la confirmation de l'accès de faiblesse industriel en Chine a déprimé les marchés actions. Le Japon perd 1,7%, la Corée du Sud 0,2%, l'Inde 0,4% et l'Australie 1,4%. En Chine, Shanghai rend 1,3% et Hong Kong 2,5%. Les indicateurs avancés sont moroses en Europe et aux Etats-Unis. Le CAC40 flanche de 0,88% à 7146 points à l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

En Europe, la France (8h45) et l'Allemagne (14h00) donneront une première estimation de l'inflation de mai. L'indice PMI de Chicago (15h45), l'enquête JOLTS sur l'emploi (16h00) et le dernier Livre Beige de la Fed (20h00) sont programmés aux Etats-Unis. Tout l'agenda ici. Ce matin, les statistiques asiatiques étaient médiocres : la production industrielle et les ventes de détails japonaises n'ont pas atteint les prévisions pendant que l'indice PMI manufacturier chinois s'enfonce en zone de contraction à 48,8 points, alors qu'il était attendu à 49,5 points.

L'euro passe sous la barre de 1,07 USD. L'once d'or se négocie 1957 USD. Le pétrole perd encore du terrain, avec un Brent de Mer du Nord à 73,49 USD le baril et un brut léger américain WTI à 69,33 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans chute à 3,67%. Le bitcoin se négocie 27 700 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • ACS, Actividades de Construccion y Servicios : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 26,50 à 29 EUR.
  • ArgenX : UBS démarre le suivi à l'achat.
  • Aryzta : Vontobel reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 1,20 à 1,60 CHF.
  • Asos : AlphaValue reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 649 à 522 GBp.
  • Bike24 : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 5 à 4 EUR.
  • Bilia : DNB Markets démarre le suivi à l'achat en visant 130 SEK.
  • BNP Paribas : Goldman Sachs reprend le suivi à neutre en visant 76 EUR.
  • Burberry : AlphaValue reste à alléger avec un objectif de cours relevé de 2192 à 2241 GBp.
  • Compagnie Financière Richemont : Barclays reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 163 à 188 CHF.
  • Enefit : Citigroup passe d'acheter à neutre en visant 4,90 EUR.
  • Hochtief : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 70 à 75 EUR.
  • J D Wetherspoon : HSBC passe de conserver à acheter en visant 940 GBp.
  • Mediobanca : AlphaValue passe d'alléger à accumuler en visant 12,70 EUR.
  • Mitchells & Butlers : HSBC passe de conserver à acheter en visant 300 GBp.
  • MorphoSys : UBS démarre le suivi à l'achat en visant 47 EUR.
  • Precia : Portzamparc reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 36,70 à 37,10 EUR.
  • Recordati : RBC démarre le suivi à performance sectorielle en visant 43,50 EUR.
  • Solvay : Jefferies reste à sousperformance avec un objectif de cours relevé de 81 à 84 EUR

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Stellantis, TotalEnergies et Mercedes (réunies dans First Automotive Cells) inaugurent leur usine géante de batteries dans le nord de la France (13 GWH de capacités initiales).
  • Vulcan et Stellantis lancent un projet commun de développement de l'énergie géothermique renouvelable pour alimenter le site de Mulhouse.
  • TotalEnergies et Tree Energy Solutions s'allient pour étudier et développer aux États-Unis une unité de production à échelle industrielle d’e-gaz.
  • Sanofi publie des données positives sur frexalimab dans le traitement de la SEP.
  • Capgemini et Google Cloud étendent leur partenariat dans les données et l'intelligence artificielle.
  • TotalEnergies est au tribunal face aux ONG et aux collectivités qui l'accusent d'inaction climatique.
  • Alstom va lancer, en consortium, des minibus électriques automatisés à Châteauroux en 2026.
  • Bouygues place 1 Md€ d'obligations à échéance 8 ans au taux de 3,875%.
  • Un investisseur a demandé au comité CDS si la décision de Casino d'entamer des discussions avec les créanciers sous contrôle judiciaire constituait un événement de faillite. Réponse jeudi dans l'après-midi.
  • Fitch note la dette de Klépierre "A-".
  • JCDecaux rachète les filiales de Clear Channel en Italie et Espagne pour une valeur d'entreprise de 75 M€.
  • SPIE optimise l'efficacité énergétique de l'hôpital Heilig Hart à Lier en Belgique.
  • La cyberattaque visant Voyageurs du Monde a permis de dérober des copies de passeports d'un nombre limité de clients.
  • Entech décroche un contrat de stockage d'énergie.
  • La moitié des salariés de Rubis a souscrit à la dernière augmentation de capital qui leur était réservée.
  • Figeac Aero prolonge son contrat avec Safran
  • TheraVet annonce le lancement commercial d'un substitut osseux à libération locale et prolongée d'antibiotiques.
  • Françoise Gri nommée présidente du conseil d'administration de Maisons du Monde.
  • Atland vers un coupon de 2 EUR par action.
  • Vergnet a des ambitions au Tchad.
  • Almaric Poncet prend la direction générale d'Erold.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Wavestone, BigBen, Entech

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Nvidia devient la 8e action à flirter avec une capitalisation de 1000 Mds$.
  • Goldman Sachs préparerait un nouveau plan social, selon le Wall Street Journal.
  • François-Xavier Roger quitte Nestlé, où il sera remplacé par Anna Manz comme directrice financière, en provenance du London Stock Exchange.
  • Rolls-Royce secoué en Bourse après les informations sur des poursuites en Inde.
  • La banque suédoise Handelsbanken vend des activités finlandaises pour 1,4 Md€.
  • Le Credit Suisse abandonnerait son projet de banque en Chine pour éviter un conflit réglementaire avec UBS.
  • Glencore va investir 1,5 Md$ pour agrandir la mine de cuivre au Pérou.
  • Tornos considère la possibilité d'une fusion avec Starrag
  • La famille Crippa vend 4,2% du capital de Technoprobe.
  • Les principales publications du jour : Salesforce, CrowdStrike, Veeva, NetApp, Chewy, OktaTout l'agenda ici.

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