Ça y est, c'est fini ? La réaction des marchés actions hier, c’est-à-dire un bon gros rebond généralisé, a l'air de signifier que les investisseurs pensent que la Bérézina bancaire est terminée. Si ma phrase précédente est pleine de circonvolutions, c'est parce qu'un rapide sondage parmi les acteurs du marché montrerait que personne n'est bien à l'aise avec cette idée. Pourtant, l'Euro Stoxx 50 a repris 2% et le Nasdaq 100 quasiment 2,7%. Pour comprendre le cheminement qui a abouti à cette clôture très favorable après une séance de mercredi rouge plutôt vif, il faut combiner actualité bancaire et actualité monétaire.

La plus grosse part du soulagement est probablement  venue du secteur bancaire. La journée de jeudi a été marquée par un double sauvetage. Dès la nuit précédente, on savait que la Banque nationale suisse allait voler au secours de la seconde banque du pays, le Crédit Suisse. Même si le soutien n'a pas été présenté comme un chèque en blanc, c'en est un en quelque sorte, ce qui fait d'ailleurs grincer les dents de la presse helvétique. La banque semble avoir tout fait sur la dernière décennie pour se saborder, sans que les dirigeants successifs ne parviennent à enrayer la culture malsaine qui s'était développée au sein de l'établissement. Les autorités n'ont pas vraiment d'autre choix que de voler au secours du Crédit Suisse, mais elles ne le font pas de gaîté de cœur. Il se murmure que Berne réfléchirait à un rapprochement avec UBS, mais l'établissement aux trois clefs serait particulièrement rétif à récupérer sa rivale cabossée. Le Crédit Suisse a terminé en hausse de 19% hier. Mais même avec cette variation digne d'une biotech en phase terminale, le titre a perdu le quart de sa valeur en trois mois et 73% en un an.

L'autre événement qui a porté les marchés dans le secteur bancaire hier, c'est la bouée de sauvetage de 30 Mds$ envoyée par onze banques américaines à leur consœur la First Republic, dont le cours était passé de 122 à 17,50 USD entre le 6 et le 13 mars. Il faut dire que l'établissement était le quatrième candidat à la faillite après les disparitions de Silvergate, SVB Financial et Signature en un mois. L'hécatombe commençait à se rapprocher d'acteurs plus gros (First Republic est la 14e banque américaine), si bien que les autres se sont dits qu'il était probablement opportun de faire quelque chose avant que d'autres dominos ne tombent. Il se dit que ce sont les "3J", Janet (Yellen), Jamie (Dimon) et Jerome (Powell) qui auraient orchestré tout ça. Soit respectivement la cheffe du trésor US, le patron de JPMorgan Chase et le président de la Fed. La First Republic a repris 10% hier pour remonter à 34 USD. C'est toujours le quart de la valeur affichée dix jours avant, mais comme du côté du Crédit Suisse, le plongeon a cessé. 

Outre ces deux événements bancaires, les marchés ont réservé un bon accueil à la décision de politique monétaire rendue hier par la BCE. Pourtant, la banque centrale a donné un tour de vis de 50 points de base à son principal taux directeur pour le porter à 3,50%. C'était ce qu'elle avait prévu de faire, mais les remous qui frappent le secteur bancaire auraient pu émousser ses convictions. Il n'en a rien été, mais les marchés ont l'air de penser que ce tour de vis pourrait être le dernier. Les économistes les plus prudents estiment plutôt que la BCE continuera à relever ses taux si une certaine forme de sérénité revient dans le complexe financier, et qu'elle renoncera en faisant preuve de pragmatisme si les choses dérapent. Christine Lagarde, qui n'a pas toujours brillé dans l'art de la communication de crise, s'en est manifestement bien sortie hier.

Donc, les marchés actions se sont montrés satisfaits de la gestion du bazar. Mais toutes choses égales par ailleurs et pour faire le rabat-joie de service, la situation au matin du 17 mars est quand même bien plus pourrie qu'elle ne l'était dix jours avant. On se retrouve avec sur les bras un morceau de crise bancaire qui a coûté la vie à trois acteurs de bonne taille et nécessité le sauvetage de deux autres en urgence. Ça, c'est en plus de la grande question qui taraude les investisseurs depuis des mois : la politique monétaire va-t-elle permettre de courber l'inflation sans détruire la dynamique économique ? Question à laquelle ont peut donc ajouter … et sans détruire une partie du secteur bancaire biberonné à l'argent gratuit ? De là à penser que c'est la fuite en avant perpétuelle, il n'y a qu'un pas. 

Il y aura un gros enjeu sur la décision de la Fed le 22 mars. La banque centrale américaine devrait relever ses taux d'un quart de point, si l'on en croit l'outil FedWatch du CME, avec une probabilité de 82%. Les 18% restants pronostiquent un statu quo. Il y a dix jours, le marché voyait à une courte majorité un tour de vis de 50 points de base. C'est dire si les événements bancaires ont changé la donne à court terme.

Du côté des marchés asiatiques, ça monte un peu partout. Tokyo et Hong Kong gagnent plus de 1% et Shanghai et Sydney autour de 0,4%. Notez que nous sommes le 3e vendredi du mois, synonyme de séance de compensation avec l'arrivée à échéance mensuelle des dérivés sur actions et indices. Et comme c'est aussi le 3e vendredi d'un mois de fin de trimestre, des échéances plus longues arrivent aussi à terme. On appelle ça la séance des quatre sorcières, qui n'est pas forcément épouvantable mais qui est généralement une source de volatilité parce qu'il faut ajuster les stratégies pour la suite. Le CAC40 gagnait 0,8% à 7082 points à l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

Aux Etats-Unis, la production industrielle (14h15) sera suivie de l'indice de confiance de l'Université du Michigan (15h00). Tout l'agenda ici.

L'euro est remonté à 1,0643 USD. L'once d'or reste ferme à 1928 USD. Le pétrole tente un micro-rebond, avec un Brent de Mer du Nord à 75,25 USD le baril et un brut léger américain WTI à 69,05 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans baisse légèrement à 3,54%. Le bitcoin se renforce autour de 25 800 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adidas : RBC reste à performance de marché avec un objectif relevé de 110 à 130 EUR.
  • Evonik : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 18,80 à 17,70 EUR.
  • GSK : Deutsche Bank passe de conserver à acheter en visant 1700 GBp.
  • KBC : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 68 EUR.
  • La Française des Jeux : Redburn démarre le suivi à neutre.
  • Nel : Goldman Sachs passe de neutre à acheter en visant 20,60 NOK.
  • Nexus : Pareto Securities passe de conserver à acheter en visant 61 EUR.
  • Rubis : Portzamparc reste à l'achat avec un objectif relevé de 33,50 à 35,10 EUR.
  • Sage : Exane BNP Paribas passe de surperformance à neutre.
  • Société Générale : HSBC passe de conserver à acheter en visant 33 EUR.
  • Stadler Rail : Vontobel reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 42 à 40 CHF.
  • SUSE : JPMorgan reste neutre avec un objectif de cours relevé de 19 à 20 EUR.
  • Swatch Group : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 370 à 390 CHF.
  • Symrise : Goldman Sachs passe de neutre à acheter en visant 117 EUR.
  • Synlab : JPMorgan reste neutre avec un objectif de cours relevé de 8,30 à 8,60 EUR.
  • Tessenderlo : KBC reprend le suivi à accumuler en visant 38 EUR.
  • Wärtsilä : Nordea reprend le suivi à l'achat en visant 10,60 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Rubis : les résultats augmentent moins vite que les revenus, mais le dividende est légèrement rehaussé. Les bénéfices devraient encore progresser cette année.
  • Wendel : l'ANR recule de 10,8% à 167,90 EUR. Le groupe se lance dans la gestion pour compte de tiers.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Sanofi va réduire de 78% le prix de son insuline phare aux Etats-Unis l'année prochaine.
  • Saint-Gobain et Dalsan obtiennent le feu vert des autorités réglementaires pour combiner des unités de plâtre et de plaques de plâtre en Turquie.
  • Alstom exploitera la navette automatique de l'aéroport de Newark sur 7 ans, pour des revenus attendus de 250 M€.
  • Thales participe au tour de table de Geoflex.
  • Megan Clarken et Ulrica Fearn proposées comme administratrices de Capgemini.
  • Casino descend à 11,7% du capital d'Asai en récupérant 723,3 M€.
  • Ipsen annonce que la FDA prendra une décision sur l'approbation du palovarotène comme traitement potentiel de la fibrodysplasie ossifiante progressive.
  • Biophytis change le ratio de ses ADS de 1 pour 10 à 1 pour 100 pour sauver sa cotation au Nasdaq.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Orapi, Samse, Transgène

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Deutsche Wohnen : maintient son résultat opérationnel stable.
  • Enel : les bénéfices 2022 sont en hausse. Un dividende de 0,40 EUR est proposé.
  • Fedex : le logisticien américain gagne 11,5% hors séance après la publication de ses résultats.
  • Vonovia : solides résultats 2022, avant une baisse prévue cette année.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Les grandes banques américaines volent au secours de First Republic en fournissant 30 Mds$.
  • UBS et Credit Suisse s'opposent à l'idée d'une fusion obligatoire.
  • Après sa chute, Baidu flambe sur les promesses d'un concurrent à ChatGPT.
  • Telenor et CK Hutchison en pourparlers pour fusionner leurs activités au Danemark et en Suède.
  • Carlsberg a nommé Jacob Aarup-Andersen au poste de directeur général.
  • Compagnie Financière Richemont prévoit une cotation secondaire à Johannesburg.
  • John Wood Group prolonge le délai pour la proposition de rachat d'Apollo Global Management.
  • Volkswagen veut investir dans des mines afin de réduire le coût des cellules de batteries.
  • Motive Partners négocierait le rachat de ACI Worldwide, selon Bloomberg.
  • SGS rachète des activités de l'espagnol Asmecruz.
  • Les actionnaires d'Aerojet Rocketdyne approuvent l'acquisition en cours par L3Harris Technologies.
  • Novartis obtient l'approbation de la FDA pour un traitement combiné contre le cancer du cerveau chez l'enfant.
  • Diploma finalise l'achat de Tennessee Industrial Electronics et prévoit une augmentation de capital.
  • Les principales publications du jour : Sonova, Bechtle, Wendel, Interroll, UnibelTout l'agenda ici.

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