Parmi les fonds small caps de notre sélection, nous donnons ce mois-ci la parole à Xavier Milvaux, gérant du fonds Tiepolo PME. Membre de cette petite équipe de gestion depuis 2007 après avoir débuté sa carrière chez Tocqueville Finance, Xavier Milvaux aime sélectionner des PME familiales françaises et les garder en portefeuille "pour la vie".
 
Xavier Milvaux, le fonds Tiepolo PME est en hausse de plus de 60% sur 5 ans. Comment expliquer cette belle performance ?
"L’univers des PME françaises cotées sur lequel nous investissons est un univers riche, performant, que nous étudions de près, depuis de nombreuses années. Malgré les retraits de cote plus nombreux que les introductions en Bourse dernièrement, la cote française demeure un terrain d’investissement varié et qualitatif, notamment en ce qui concerne les valeurs industrielles que nous apprécions particulièrement. Près d’un tiers du fonds est investi en valeurs industrielles. Si, dans l’ensemble, les entreprises du portefeuille réalisent 50% de leur activité hors de France, 53 de nos 54 positions en portefeuille sont françaises. Le fait que les sociétés soient françaises favorise notre proximité avec leurs dirigeants, leurs marchés, et leurs actionnaires. Par ailleurs, nous aimons les PME car nous avons la conviction que la taille humaine et la gestion patrimoniale qui caractérise la plupart de ces sociétés, généralement familiales, favorise leur efficience et leur pérennité. L’esprit d’entreprise y est davantage cultivé, et leur taille modeste facilite leur croissance. Au sein de cet univers, nous apprécions particulièrement les entreprises possédées ou dirigées principalement par des actionnaires familiaux, souvent fondateurs, gérées avec une approche patrimoniale à long terme. Me viennent à l’esprit des entreprises comme Manutan, Robertet, Groupe Guillin, ou encore Chargeurs. Nous leurs confions nos capitaux pour une durée indéterminée, à l’image du mandat de gestion que nous ont confié nos 2300 familles clientes. Vous l’aurez compris, nous investissons au capital des entreprises, nous ne "jouons" pas la dernière thématique à la mode, le dernier indicateur de conjoncture ou le dernier Tweet de Donald Trump".
 
Comment l'équipe de gestion a-t-elle vécu ces derniers trimestres, particulièrement difficiles pour les petites valeurs ?
"Il est clair que nous aurions aimé mieux résister dans la phase de baisse de la fin 2018, qui fut assez violente. Heureusement, les porteurs de parts du fonds Tiepolo PME adhèrent à notre vision très longue de l’investissement. Nous bénéficions donc d’une certaine stabilité de nos encours, ce qui nous évite les problèmes de liquidité propres aux petites valeurs. Nous avons un peu déconcentré notre fonds, avec 54 valeurs en portefeuille aujourd’hui, mais restons très investis quelle que soit l’humeur des marchés. Nous avons moins de 5% de liquidités, sans compter les valeurs ayant fait l’objet d’une OPA et que nous avons préféré garder pour continuer l’aventure, à l’image d’Harvest. Personnellement, je déteste les OPA, elles m’obligent à vendre des titres que j’aime garder le plus longtemps possible. Un sujet d’actualité pour nous avec le retrait de cote envisagé sur Evolis, moyennant une prime peu généreuse."
 
Qu’est-ce qui vous fait sortir d’un dossier ?
"Notre turnover est faible, autour de 20-25% selon les années. Parmi les raisons qui nous poussent à céder nos titres, il y a donc les OPA, comme nous venons de l’évoquer. Il y a également les allégements de position quand les ratios de valorisation, que nous suivons constamment, deviennent trop élevés. Enfin, il y a bien sûr, malheureusement, nos erreurs de jugement. Il arrive que notre cas d’investissement ne se déroule pas comme prévu et il nous faut alors en analyser les raisons précises et prendre les décisions qui s’imposent. Une erreur d’appréciation ou un changement de management imprévu constitue une des principales causes de sortie. Nous nous sommes par exemple trompés sur Orchestra. Nous avons aussi investi trop tôt dans le groupe Guillin, dossier sur lequel nous avons subi l’évolution de prix défavorable et actuellement le plastique bashing, bien que nous n’en voyions pas à ce jour les répercutions concrètes pour le groupe. Concernant notre petite position sur Boiron, maintenant que la problématique du déremboursement, en France, des médicaments homéopathiques à nom commun est tranchée, nous sommes aux aguets. En effet, nous jugeons très probable que cette évolution n’aura pas l’effet catastrophique que le groupe prédit et que Boiron continuera de dégager des flux de trésorerie importants. Nous restons également très attentifs au dossier Solutions 30, que nous avions beaucoup allégé après l’excellent parcours du titre et la position à la vente du fonds spéculatif Muddy Waters. Cette position n’est peut-être pas sans fondement, et nous invite à la prudence".
 
Pouvez-vous nous parler d'une valeur française à fort potentiel, entrée récemment en portefeuille ?
"Nous avons entré Reworld Media. Voilà un projet peu attirant en apparence, car positionné sur la presse magazine, mais nous sommes convaincus que la lecture de la presse, papier ou digital, a encore de l’avenir et que Reworld Media détient de belles franchises. Les dirigeants, pragmatiques, clairs et ambitieux, ont fait leurs preuves dans le passé. La valorisation actuelle ne donne aucune crédibilité au projet de transformation en cours. Voilà une illustration de notre intervention non pas au moment le plus critique du redressement, trop risqué pour nous, mais une fois le redressement bien amorcé, de façon à accompagner ensuite le projet dans la durée".
 
Notre bilan mensuel des meilleurs fonds small & midcaps pour le mois de juin sera publié dans les prochains jours, avec une analyse complète. D'ici là, vous pouvez encore consulter la sélection de juin.