Bon, ben c'est raté. Wall Street a fait mine de se reprendre hier, après cinq séances consécutives de baisse pour le S&P500. Mais l'indice large américain a terminé à -0,21%. Il faut quand même souligner que le Nasdaq a préservé un gain de 0,16% en fin de parcours. Ceci dit, il reprenait plus de 2% au début de la séance, alors… En Europe, c'était un peu le foutoir en clôture, avec des variations allant d'un gain de 0,5% en Suisse à 0,7% de baisse en Allemagne. Toutes ces variations montrent que les investisseurs ne savent plus à quel Saint se vouer depuis que la Sainte Fed a arrêté de multiplier les pains de dollars et que les autres apôtres monétaires ont décidé de faire la même chose. Du reste, c'est un représentant de la banque centrale américaine qui a encore douché les marchés hier. James Bullard, l'un des pères fouettards utilisés par la Fed pour épouvanter le marché, a insisté sur la nécessité de continuer à augmenter les taux directeurs avec vigueur. Il a fait dérailler le rebond et envoyé le rendement de la dette américaine à 10 ans flirter avec les 4%.

C'est ce que les traders appellent le jeu du "good cop, bad cop", comme dans les interrogatoires des séries policières. Enfin le jeu, il faut le dire vite parce qu'il est un peu piquant quand même pour les investisseurs. En gros, on sort des méchants flics, des Faucons (les banquiers centraux les plus orthodoxes) pour qu'ils défendent la ligne dure, et on envoie parfois les gentils flics, les Colombes (les banquiers centraux les plus souples) pour arrondir les angles. C'est quasiment du "story telling" et c'est suivi de près par les pros, comme l'illustre un exemple tout récent. Vous vous souvenez peut-être que les marchés se sont offerts quatre séances de gros rebond du 7 au 12 septembre. La raison ? Des commentaires apaisants de la vice-présidente de la Fed Lael Brainard sur la politique monétaire à venir. Bien sûr, c'était à contrecourant du sentiment global, donc accueilli positivement. Mais ça n'a pas duré et ça s'est même transformé en piège (9 baisses en 11 séances). "Les haussiers ont gobé l'argumentaire commercial  pro-marché de Lael du 7 septembre. Ils ont tout avalé : l'hameçon, la ligne et même les plombs, pour finalement se faire écrabouiller", note un gérant sur un fil professionnel très suivi à Wall Street. Je ne pense pas que Lael Brainard avait l'intention de tordre les investisseurs, mais cela montre à quel point les marchés boivent les paroles des banques centrales (essentiellement de la Fed, d'ailleurs).

Ce même gérant adepte de la métaphore ichtyenne conseille d'ailleurs de s'intéresser à la fin de semaine avec le retour des "bons flics" vendredi derrière un micro : Lael Brainard et un autre banquier central jugé souple, John Williams, participeront en effet à des événements durant lesquels ils seront amenés à donner leur avis. Ce ne sont pas les seuls et ça risque de tourner à la cacophonie : Jerome Powell, Christine Lagarde, James Bullard (encore !) et d'autres noms moins ronflants sont aussi sur la tablette d'ici la fin de la semaine. Peut-être faudrait-il envisager de leur couper le sifflet ? Ou a minima de limiter le nombre de leurs sorties ? Voire de se poser clairement les choses : "nan mais quand machin, untelle et l'autre zozo parlent, on s'en fout, ils savent pas vraiment ce qu'il disent. On les laisse faire pour pas les avoir dans les pattes en permanence". Tout ça sonne un peu puéril et court-termiste face aux enjeux économiques en cours, mais c'est une réalité des marchés financiers : les avis et les projections de long terme se forgent à partir de cette nuée de tendances, d'indicateurs, de commentaires et de perceptions.

En parlant d'indicateurs, ceux de la veille ont soulevé plus de questions qu'ils n'ont apporté de réponses aux Etats-Unis. Déjà, la confiance des consommateurs américains est remontée en septembre. Hausses de taux, spleen de la rentrée, 8% de plus sur le prix de la Budweiser, rien n'y a fait. En plus, les ventes de logements neufs ont été bien plus dynamiques que prévu en août. Mais les commandes de biens durables ont encore ralenti. Les signaux continuent donc à flasher dans des sens différents. Alors de deux choses l'unes : soit les consommateurs américains sont si riches et si optimistes qu'ils vont encaisser sans trop broncher les hausses de taux façon bambou. Soit ils sont encore un peu inconscients et le bambou est en réalité un élastique qui va finir par casser en provoquant des dégâts. Vu la tête des marchés actions en ce moment, c'est la seconde option que les investisseurs ont en tête actuellement.

Sur le marché des changes, le dollar ne cesse de se renforcer, dans un contexte d'aversion au risque. Il a d'autant plus forci hier que la Maison Blanche a écarté la perspective d'un effort coordonné à l'échelle internationale pour faire baisser le billet vert, comme cela s'était produit en 1985 et en 1987. Dans le reste de l'actualité, les gazoducs Nord Stream ont manifestement été sabotés, ce qui a fait remonter en flèche le prix du gaz en Europe hier. A qui profite le crime ? La question reste en suspens, un peu comme quand il s'agit de désigner le coupable d'une grosse cyberattaque. Pendant ce temps, le "oui" au rattachement de régions d'Ukraine à la Russie l'emporte largement, au cas où quelqu'un en aurait douté. Au Brésil, les derniers sondages, à moins d'une semaine du scrutin présidentiel, donnent Lula en progression face à Bolsonaro.

L'échec du rebond de la veille a laissé des traces ce matin, d'autant que l'Agence Bloomberg a révélé pendant la nuit qu'Apple renonçait à accroître sa production d'iPhones au vu d'une demande incertaine. Les indicateurs avancés européens sont baissiers. En Asie Pacifique, ça chute fort au Japon, en Corée et à Hong Kong, où les replis dépassent 2%. L'Australie et l'Inde tiennent mieux le choc mais restent orientées à la baisse. Le CAC40 démarre la séance en baisse de 0,8% à 5705 points.

Les temps forts économiques du jour

Les stocks des grossistes américains (14h30) et les chiffres du logement ancien aux Etats-Unis (16h00) sont les deux principales statistiques attendues aujourd'hui. Tout l'agenda macro ici.

L'euro continue à s'enfoncer à 0,9560 USD. L'once d'or recule à 1624 USD. Le pétrole efface ses gains de la veille, avec un Brent de Mer du Nord à 85,11 USD le baril et un brut léger américain WTI à 77,51 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans flirte désormais avec 4%. Le 5 ans est à 4,21% mais le 2 ans recule 4,28%. Le bitcoin replonge à 18 735 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Akzo Nobel : Jefferies reste à l'achat avec un objectif réduit de 81 à 77 EUR.
  • Almirall : RBC démarre le suivi à surperformance en visant 13,50 EUR.
  • CVS Group : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 2110 à 1970 GBp.
  • Dechra Pharmaceuticals : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 3630 à 2880 GBp.
  • Euronext : AlphaValue reste à acheter avec un objectif réduit de 106 à 90,90 EUR.
  • Games Workshop : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 9700 à 8700 GBp.
  • Givaudan : UBS reste à la vente avec un objectif de cours réduit de 3180 à 2870 CHF.
  • Ipsen : RBC démarre le suivi à performance sectorielle en visant 107 EUR.
  • MIPS : Jefferies démarre le suivi à l'achat en visant 430 SEK.
  • Pernod Ricard : AlphaValue reste à accumuler avec un objectif relevé de 215 à 242 EUR.
  • Renault : Berenberg passe de conserver à acheter en visant 34 EUR.
  • Schaeffler : J.P. Morgan reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 7,50 à 6,50 EUR.
  • SkiStar : Jefferies démarre le suivi à conserver en visant 145 SEK.
  • Swedish Orphan Biovitrum : RVC démarre le suivi à performance sectorielle en visant 235 SEK.
  • Tecnicas Reunidas : Mirabaud passe de vendre à conserver en visant 7,20 EUR.
  • Thulé : Jefferies démarre le suivi à conserver en visant 235 SEK.
  • Treatt : HSBC démarre le suivi à conserver en visant 600 GBp.
  • Trigano : Oddo BHF passe de neutre à surperformance en visant 130 EUR.
  • Varta : Berenberg reste à conserver avec un objectif réduit de 75 à 45 EUR.
  • Virbac : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 450 à 368 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Sanofi va bénéficier d'un effet devises à deux chiffres sur ses résultats du T3.
  • Environ 70% des salariés des raffineries françaises de TotalEnergies étaient en grève hier, selon la CGT.
  • Saint-Gobain élargit son offre de solutions durables pour façades en Europe en investissant dans le photovoltaïque intégré aux bâtiments.
  • Luca De Meo, le DG de Renault, quitte le conseil d'administration de Telecom Italia.
  • Nexity présente un nouveau plan stratégique.
  • Technicolor devient Vantiva.
  • Implanet émet des ABSA pour assurer son financement avec un engagement de souscription de Sanyou Medical.
  • Grolleau reçoit des commandes à l'international.
  • Europlasma tire une nouvelle tranche d'OCA.
  • Trigano, Voltalia, Passat, ADC SIIC, Upergy, Munic, Altheora, Toosla, Navya et Theranexus ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • La SEC a infligé 1,8 Md$ d'amendes à 11 banques et courtiers de Wall Street (dont les européennes Crédit Suisse, UBS, Deutsche Bank et Barclays) qui n'avaient pas conservé traces des échanges entre leurs employés sur des messageries, en particulier WhatsApp.
  • Volkswagen devrait annoncer aujourd'hui le cours d'introduction de Porsche en bourse.
  • Apple aurait revu en baisse ses objectifs de progression de la production d'iPhone après une demande chancelante.
  • Ford va investir 700 M$ et créer 500 emplois pour la production de nouveaux pick-up.
  • Boohoo réduit ses prévisions.
  • Twitter assure que les analystes de Musk n'ont pas de preuves sur les faux comptes.
  • Burberry nomme Daniel Lee directeur de la création à partir d'octobre.
  • Débuts timides à Wall Street pour la filiale de motos électriques d'Harley-Davidson, LiveWire.
  • Shell et Exxon vont céder 2 Mds$ d'actifs dans le gaz naturel en mer du Nord britannique et néerlandaise.
  • Commerzbank a accru de 490 M€ ses provisions pour pertes sur le portefeuille de prêts de sa filiale polonaise Mbank.
  • Apollo serait en train de plancher sur un rachat de Ryder System, selon Bloomberg.
  • Dufry obtient un contrat à l'aéroport de Chongqing.
  • Siegfried et Novavax prolongent leur partenariat d'ici fin 2023.
  • Toyota va commencer à vendre une petite berline électrique en Chine d'ici la fin de l'année.
  • Principales publications du jour : Paychex, Raymond James, Vail Resorts, Thor Industries, Voltalia, Orpéa, Bénéteau… Tout l'agenda ici.

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