par Nvard Hovhannisyan

EREVAN, 25 février (Reuters) - Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a dénoncé jeudi ce qu'il a décrit comme une tentative de coup d'Etat après que l'armée a demandé plus tôt sa démission, déclarant à des milliers de partisans rassemblés dans la capitale Erevan que seul le peuple pouvait décider de son avenir.

La demande de l'armée, formulée dans un communiqué écrit, a plongé le pays de moins de 3 millions d'habitants dans une nouvelle crise politique, quelques mois à peine après le conflit dans le Haut-Karabakh.

La Russie, alliée traditionnelle de l'Arménie, où elle dispose d'une base militaire, a fait part de sa préoccupation face aux événements. Elle a appelé les différentes parties au calme, au dialogue et au respect de l'ordre constitutionnel.

Nikol Pachinian, 45 ans, fait face depuis novembre dernier à des appels à la démission pour sa gestion du conflit au Haut-Karabakh, conclu par un cessez-le-feu ayant permis à l'Azerbaïdjan de conserver le contrôle des territoires repris aux forces de cette région séparatiste soutenues par l'Arménie.

C'est cependant la première fois que l'armée demande publiquement la démission du Premier ministre, arrivé au pouvoir en 2018.

"La gestion inefficace des autorités actuelles et les graves erreurs de politique étrangère ont placé le pays au bord de l'effondrement", ont dit le commandant en chef des armées et d'autres généraux dans un communiqué.

Deux anciens présidents, Robert Kocharian et Serzh Sarkissian, ont publié des communiqués appelant les Arméniens à soutenir l'armée.

On ne sait pas dans l'immédiat si l'armée est disposée à recourir à la force.

Nikol Pachinian a appelé ses partisans à se rassembler dans la capitale pour lui manifester leur soutien. Il a prononcé depuis Erevan un discours fougueux dans lequel il a dénoncé les exigences de l'armée.

"L'armée ne peut pas être impliquée dans les processus politiques", a-t-il dit devant plusieurs milliers de personnes. "L'armée doit obéir au peuple et au pouvoir politique élu par le peuple."

Le Premier ministre a annoncé avoir limogé le commandant en chef des forces armées, une mesure qui n'a toutefois pas encore été ratifiée par le président.

S'il dit accepter la responsabilité de l'issue de la crise du Haut-Karabakh, Nikol Pachinian refuse de démissionner, se déclarant indispensable pour préserver la sécurité du pays.

"Le problème le plus important à l'heure actuelle est de garder le pouvoir entre les mains du peuple, parce que je considère que ce qui se passe est un putsch militaire", a-t-il déclaré jeudi à la foule.

D'après des images relayées par l'agence de presse russe RIA, plusieurs milliers de partisans de l'opposition ont organisé une manifestation rivale à Erevan.

Vazgen Manoukian, l'un des chefs de file de l'opposition, a accusé le gouvernement de tenter de monter la population contre l'armée. (avec Maxim Rodionov et Dmitry Antonov à Moscou; version française Dagmarah Mackos et Jean Terzian, édité par Jean-Stéphane Brosse)