L’investissement immobilier en perte de vitesse

Dans un contexte de baisse des volumes de vente, des chantiers et des prix, le marché immobilier s’installe durablement dans un climat d’incertitude. Après des décennies d’hégémonie de l’investissement locatif en France, un rééquilibrage au profit de l’investissement boursier aura-t-il lieu ?

Les Français redécouvrent les risques inhérents à l’investissement immobilier. Après 10 ans de hausses des prix, de taux bas et de fiscalité avantageuse, le contexte inflationniste est venu écorner l’image d’un investissement peu risqué et rentable auprès des investisseurs français. Cet aveuglement collectif sur les risques liés à l’investissement immobilier promet des réveils difficiles avec l’accentuation des baisses de prix sur le marché immobilier.

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Un marché immobilier de moins en moins attractif

 

Chez les jeunes investisseurs, l’immobilier ne jouit plus de la même aura que pour leurs aînés. Découragés par les prix élevés, la hausse des taux et le risque de loyers impayés, les jeunes générations se tournent davantage vers d’autres classes d’actifs. Ainsi, depuis 2015, la part des moins de 35 ans parmi les détenteurs d’actions en France a doublé pour atteindre 20%. Cette dynamique, renforcée ces dernières années par le confinement et la montée en popularité des crypto actifs, trouve dans la hausse des taux un troisième moteur en faveur de l’investissement sur les marchés financiers chez les jeunes.

Il semble que cette tendance soit bien moins marquée dans le reste de la population française. Avec un taux de détention d’actions en direct se maintenant à 6,8% (mars 2023, AMF), les Français font le choix d’investir dans des actifs moins risqués tels que les livrets et les Assurances-Vie. L’investissement en actions ne semble pas être le grand gagnant de l’affaiblissement de l’immobilier, conséquence d’une aversion au risque encore très forte chez les investisseurs hexagonaux.

Des jeunes investisseurs plus audacieux

Cette jeune génération d’investisseurs est à la recherche d’une rentabilité forte sur un horizon plus court que les investisseurs historiques. Pour les plus jeunes, motivés par les rendements rapides et la curiosité, cela se traduit par la détention d’actifs plus risqués (crypto, actions, ETF), au détriment de l’investissement passif via les OPCVM ou les Assurances-Vie.

Fortement diversifiés, ils se retrouvent également bien plus investis que leurs aînés dans le Crowdfunding, le capital risque ou l’investissement locatif via les SCPI et OPCI. Sur les marchés actions, ces investisseurs n'hésitent pas à s’orienter vers des valeurs Small & Mid et favorisent les effets de bulles sur les secteurs en effervescence.

Quels impacts concrets sur les marchés ?

Après deux années de disette marquées par les échecs successifs, l’année 2024 s’annonce comme un grand millésime sur le terrain des IPO. Il y a fort à parier que les jeunes investisseurs, à la recherche de rendements rapides, participeront aux prochaines levées de fonds. Peut-être celle d'Ampère (Renault), attendue en avril ou mai 2024.

On peut également s’attendre, dans une moindre mesure, en raison de la préférence des jeunes investisseurs pour les valeurs de croissance US, à un regain d’intérêt pour les Smalls et Mids. Actuellement délaissées par les investisseurs, les niveaux de valorisation des valeurs de croissance sont au plus bas et seront au centre de l’attention des investisseurs téméraires aux premiers signes de retournement sur les marchés.

Les jeunes investisseurs privilégient les investissements durables

A plus long terme, la composition des indices risque de fortement évoluer. Jusqu'à maintenant, les investisseurs accordent une importance toute relative aux critères ESG. Une étude de l’OCDE (Les nouveaux investisseurs en France : attitudes, connaissances et comportements, novembre 2023) révèle que chez les moins de 25 ans, le caractère durable et responsable des investissements est la première raison citée par 31% des sondés, soit 3 fois plus que les plus de 50 ans. L'histoire ne dit pas encore si ces intentions louables sont compatibles avec l'appétit pour les plus-values rapides précitées. Mais en théorie, on peut s’attendre à des décotes ciblant les poids lourds du secteur pétrochimique, de l’armement ou de l'aéronautique tels que TotalEnergies, Dassault Aviation ou Airbus, favorisant les sociétés aux scoring ESG plus favorables. 

Mieux vaut tard que jamais

L’intérêt porté par les jeunes générations à l’investissement sur les marchés financiers, qu’il soit sur les actions ou sur les autres classes d’actifs, est une tendance positive, dans un pays où encore 72% de la population ne fait pas confiance aux placements en actions. Cette situation traduit le manque, voire l’absence, de pédagogie sur les sujets économiques et financiers en France, contribuant ainsi à une perception tronquée des risques liés à l’investissement chez les Français.