* Le Fidesz d'Orban en tête dans tous les sondages

* Le parti d'extrême droite Jobbik pourrait terminer deuxième

* L'opposition, fragmentée, ne menace guère le parti au pouvoir

* Orban salue la voie commune, eurosceptique, des Hongrois et Polonais

par Krisztina Than

BUDAPEST, 8 avril (Reuters) - Viktor Orban, tenant en Europe d'une ligne dure envers l'immigration, devrait remporter ce dimanche un troisième mandat consécutif de quatre ans comme Premier ministre hongrois, au terme d'une campagne où il s'est posé en garant des valeurs chrétiennes de son pays face à l'afflux de migrants musulmans.

Une victoire claire et nette d'Orban pourrait encourager celui-ci à renforcer l'alliance de pays d'Europe centrale qui s'est constituée face à la politique migratoire de l'Union européenne et face aux projets de plus grande intégration.

Le parti Fidesz de Viktor Orban arrive en tête dans tous les sondages, qui prévoient sa victoire même si ce ne sera sans doute pas le raz-de-marée constaté lors des législatives de 2010 et de 2014.

Lors de ces scrutins, le Fidesz et son allié démocrate-chrétien, le KDNP, avaient remporté plus des deux tiers des sièges au parlement. L'opposition, fragmentée, dont le parti d'extrême droite Jobbik est l'une des principales composantes, garde toutefois quelque chance de réaliser un bon score et de priver le Fidesz de sa majorité parlementaire.

"Ce sera une lutte acharnée, une partie difficile, et nous nous battrons jusqu'au bout", déclarait Viktor Orban vendredi au tabloïd Ripost.

A en croire les sondages, Jobbik pourrait arriver en seconde position. Ce parti exclut toute coalition que ce soit avec le Fidesz ou avec les partis de gauche traditionnels.

Le Fidesz pourrait s'assurer le contrôle de 113 des 199 sièges dimanche, selon un sondage de l'institut Republikon, rendu public jeudi. Les enquêtes d'opinion ne sont peut-être guère fiables dans le cas actuel étant donné qu'un tiers des électeurs se disent toujours indécis et que nombre d'entre eux ne dévoilent pas leur véritable préférence de vote.

"HOMOGÉNÉITÉ ETHNIQUE"

Les législatives sont disputées à un seul tour. Sur les 199 députés, 106 sont élus au scrutin uninominal à un tour. Les 93 restants le sont sur la base de listes de partis ou de minorités ethniques.

Le mode de scrutin a été changé depuis 2010, renforçant les chances du parti au pouvoir face à une opposition de gauche fragmentée et Jobbik. Le nombre total de sièges a été ramené de 386 à 199 en 2011. Le second tour a été supprimé, ce qui prive les partis de la possibilité de conclure des alliances entre les deux tours.

Agé maintenant de 54 ans, Viktor Orban, qui militait déjà comme jeune libéral à la fin des années 1980, a imposé au pays ce que ses détracteurs considèrent comme un style de plus en plus autoritaire. Son gouvernement a renforcé son contrôle sur l'audiovisuel public et aussi, via des milieux d'affaires qui lui sont proches, sur une bonne partie des médias privés.

Des hommes d'affaires proches du Fidesz et d'Orban ont acquis des parts dans des secteurs majeurs de l'économie comme les banques, l'énergie, le bâtiment et le tourisme, profitant ainsi de fonds d'aide de l'UE.

Dans le même temps, Viktor Orban a bataillé contre Bruxelles concernant la politique de quotas de migrants venus du Proche-Orient, estimant que la Hongrie chrétienne, qui n'a pas de véritable tradition d'immigration, doit préserver son "homogénéité ethnique".

"Des forces apparaissent comme le monde n'en a pas vu depuis longtemps. En Afrique, il y aura dix fois plus de jeunes qu'en Europe. Si l'Europe ne fait rien, ils vont enfoncer la porte et nous écraser", déclarait Orban dans un discours le 15 mars.

LE SOUTIEN DU POLONAIS KACZYNSKI

"Bruxelles(...) veut diluer la population de l'Europe et la remplacer, pour se débarrasser de notre culture, de notre mode de vie", ajoutait-il.

Une victoire nette de Viktor Orban "renforcerait l'union des pays de Visegrad en matière de politique migratoire", estime le professeur Hendrik Hansen, expert de la scène politique européenne à l'université Andrassy de Budapest.

"Orban verra sa position renforcée (...) en ce qui concerne son concept de souveraineté nationale, opposé à l'intégration européenne", a-t-il analysé.

Le groupe de Visegrad rassemble quatre pays d'Europe centrale à la fois membres de l'Union européenne et de l'Otan : la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie.

En visite vendredi en Hongrie, le chef du parti au pouvoir en Pologne, Jaroslaw Kaczynski, a déclaré que l'Europe devait reposer sur des Etats nations forts.

"Après-demain, vous vous prononcerez sur la liberté", a dit le chef du PiS (Droit et justice), lors de l'inauguration à Budapest d'une statue commémorant l'accident d'avion dans lequel est mort, en 2010 près de Smolensk (Russie), son frère, Lech Kaczynski, alors président polonais.

"La dignité et la liberté des nations sont étroitement liées au nom de Viktor Orban non seulement pour les Hongrois mais aussi pour les Polonais", a-t-il dit.

Orban, qui l'accompagnait lors de la cérémonie, a déclaré que "Nous, Polonais et Hongrois, croyons que nous avons un chemin commun, un combat commun et un objectif commun: bâtir et défendre notre patrie sous la forme où nous l'aimons: des valeurs chrétiennes et nationales". (Avec Sandor Peto; Eric Faye pour le service français, édité par Arthur Connan et Tangi Salaün)