Lausanne (awp/ats) - Au lendemain du réquisitoire accablant du Ministère public, la défense du directeur de Petrosaudi a plaidé l'acquittement jeudi dans le procès 1MDB à Bellinzone. Après des considérations géopolitiques sur "l'Orient compliqué", elle a analysé des pièces censées convaincre le Tribunal pénal fédéral de l'honnêteté des deux accusés et du sérieux de leurs opérations financières.

Après une longue plaidoirie sur les faits, les trois avocats, Me Myriam Fehr-Alaoui, Me Daniel Zappelli et Me Nicolas Rouiller, ont contesté juridiquement les chefs d'accusation retenus par le Ministère public de la Confédération (MPC). Mercredi, ce dernier a requis des peines de 10 ans de prison contre le directeur de Petrosaudi, un double national suisse et saoudien, et de 9 ans contre son adjoint, pour escroquerie par métier, gestion déloyale et blanchiment aggravé.

Passant comme chat sur braise sur les complicités au sein du fonds souverain 1MDB évoquées par le Parquet, Me Zappelli a parlé de "l'insoutenable légèreté de la Malaisie", qui n'aurait pas procédé aux vérifications de rigueur dans ses relations avec Petrosaudi. L'astuce, élément essentiel de l'escroquerie, ne serait pas réalisée.

Me Fehr-Alaoui a évacué à son tour la gestion déloyale, qui reposerait sur l'instrumentalisation de divers acteurs gravitant autour de 1MDB. Quant au blanchiment, elle en a également contesté la réalité.

Détention rejetée ___

Dans la logique d'un acquittement général de son client, Me Zappelli a formellement rejeté la détention pour motif de sûreté réclamée par le Parquet afin de prévenir une éventuelle fuite. L'avocat a également conclu à la levée de tous les séquestres et des mesures de substitutions qui restreignent déjà la liberté de mouvement de l'intéressé.

À grand renfort de références à Wikipedia, Me Rouiller a estimé durant la matinée que le MPC avait ignoré le contexte dans lequel évoluait Petrosaudi et son directeur. "L'Arabie saoudite est une monarchie absolue", où tout appartient au roi. Un nom comme Petrosaudi ne peut pas être utilisé sans l'aval de l'Etat.

Dans ce pays patriarcal, l'individu n'est pas libre de ses actes, en particulier lorsqu'il appartient à une famille aussi haut placée, que le patron de Petrosaudi, a poursuivi l'avocat. "Le Parquet ne s'est pas intéressé à l'Orient compliqué. Il a adopté une approche radicalement fausse".

Acteurs crédibles ___

Me Fehr-Alaoui s'est efforcée de démonter les arguments assénés par le Parquet. Procédant à une relecture de certaines pièces et déclarations, l'avocate a mis en évidence des éléments à décharge pour son client. Elle a insisté sur la crédibilité des acteurs approchés par le fonds et Petrosaudi - banques, conseillers financiers, experts pétroliers en particulier. Ces intervenants seraient les garants du sérieux des opérations menées.

La défense a aussi parlé géopolitique. La Malaisie voulait resserrer ses liens avec l'Arabie saoudite, dans la foulée de l'élection du nouveau Premier ministre Najib Razak en 2009. Ce sont les Malaisiens également qui souhaitaient une conclusion en quelques semaines de la joint-venture avec Petrosaudi.

Concernant la conversion de cette société commune en prêt islamique (dit "murabaha") - la deuxième escroquerie, selon le MPC - Me Zappelli a souligné l'expertise de la Malaisie dans ces montages financiers. Selon lui, 1MDB ne pouvait pas être dupé sur ce point.

Se référant à nouveau à "l'Orient compliqué", Me Rouiller a expliqué que le murabaha était une pratique courante en terres musulmanes. On ne peut donc pas y voir une manoeuvre malhonnête visant à rouler le fonds souverain. "Il n'y a eu aucune lésion dans cette opération. C'est exactement ce qui était voulu" par les partenaires.

Le procès se poursuit vendredi avec la plaidoirie des avocats de l'adjoint du patron de Petrosaudi. Comme ce dernier, il est accusé d'avoir détourné 1,8 milliard de dollars au détriment de 1MDB.

ats/rp