PARIS (Reuters) - Les Bourses européennes ont terminé une nouvelle fois en forte baisse vendredi et Wall Street perdait autour de 2% à mi-séance, la menace de plus en plus précise d'une récession incitant les investisseurs à déserter les actifs risqués tandis que le dollar continue de profiter de la hausse des taux américains.

À Paris, le CAC 40 affiche en clôture un recul de 2,28% (135,09 points) à 5.783,41 points, au plus bas depuis mars 2021. À Londres, le FTSE 100 a perdu 1,97% et à Francfort, le Dax a abandonné 1,97%.

L'indice EuroStoxx 50 a fini en baisse de 2,29%, le FTSEurofirst 300 de 2,29% et le Stoxx 600 de 2,34%, au plus bas depuis décembre 2020.

Au moment de la clôture en Europe, Wall Street creusait ses pertes, le Dow Jones cédant 1,91%, au plus bas depuis novembre 2020 le Standard & Poor's 500 2,1% et le Nasdaq Composite 2,09%.

Deux jours après les déclarations de Jerome Powell, le président de al Réserve fédérale, laissant entendre que cette dernière était prête à conduire l'économie américaine à la récession pour faire reculer l'inflation, les premiers résultats des enquêtes PMI de S&P Global ont confirmé que l'Europe se dirigeait elle aussi vers une période de contraction de l'activité, voire qu'elle y était déjà entrée.

Dans la zone euro, "même s'il y a des différences d'un pays à l'autre, les vents contraires sont les mêmes pour toutes les économies du bloc: une demande qui s'affaiblit avec la dégradation du pouvoir d'achat sur fond d'inflation élevée et de détérioration de la demande mondiale", résume Katharina Koenz, économiste senior d'Oxford Economics.

Aux Etats-Unis, Goldman Sachs a abaissé de 16% son objectif pour le S&P 500 en fin d'année, à 3.600 points contre 4.300, ce qui implique une baisse supplémentaire de près de 5% d'ici fin décembre.

Dans une note rédigée au lendemain des annonces de la Réserve fédérale, David Kostin, analyste de la banque américaine, explique qu'"une majorité des investisseurs en actions ont adopté le point de vue qu'un scénario d'atterrissage brutal est inévitable, et leur priorité va au calendrier, à l'ampleur et à la durée d'une possible récession ainsi qu'aux stratégies d'investissement pour ce scénario".

De son côté, Bank of America, dans son point hebdomadaire sur les flux d'investissement, souligne que les marchés sont encore loin d'en avoir fini avec les chocs liés à l'inflation, la hausse des taux et la récession.

Sur l'ensemble de la semaine, le S&P 500 affiche pour l'instant un repli de plus de 4,5%. En Europe, le Stoxx 600 a perdu 4,37% en cinq séances et le CAC 40 4,84%.

VALEURS

Tous les grands secteurs de la cote européenne ont fini la journée dans le rouge mais les reculs les plus marqués sont pour celui de l'énergie, dont l'indice Stoxx a cédé 5,87% et celui des matières premières (-5,68%), avec la chute des cours du pétrole et des métaux de base (-3,3% en fin de séance pour le cuivre, -5,1% pour le nickel).

Le secteur bancaire de la zone euro, lui, a perdu 3,44%: aux craintes de récession se sont ajoutées les informations de Reuters selon lesquelles la BCE étudie le moyen de limiter le coût des intérêts qu'elle verse aux établissements de crédit sur leurs réserves excédentaires.

Credit Suisse a par ailleurs chuté de 12,4% et inscrit un plus bas historique, le marché redoutant une nouvelle augmentation de capital.

En hausse, M6 a encore pris 8,09% alors que RTL Group attendait dans la journée les offres indicatives de rachat de sa participation de 48,3%.

CHANGES

Sur le marché des devises, la suprématie du dollar s'accentue avec les signes d'une récession en cours ou très proche en zone euro comme au Royaume-Uni.

L'indice qui mesure ses fluctuations par rapport à un panier de référence, en hausse de 1,21% sur la journée, est au plus haut depuis mai 2002 et se dirige vers sa plus forte progression hebdomadaire depuis mars 2020, un gain de près de 2,7%.

L'euro, au contraire, a touché un nouveau plus bas de 20 ans à 0,9726 dollar (-1,13%) et la livre sterling un nouveau plus bas de 37 ans à 1,0995 dollar (-2,97%).

La devise britannique souffre en effet de la présentation du plan de relance du gouvernement Truss, qui implique un net creusement du déficit budgétaire et une augmentation de la dette publique.

TAUX

Les annonces du ministre britannique des Finances ont aussi favorisé une nouvelle poussée des rendements souverains britanniques, qui ont entraîné dans leur sillage ceux de la zone euro.

Le deux ans britannique a bondi de près de 50 points de base pour dépasser brièvement 4% et son équivalent allemand a franchi en séance la barre de 2% pour la première fois depuis fin 2008, avant de revenir à 1,909%.

Sur le marché américain, le deux ans est en hausse de sept points à 4,1925% et le dix ans de trois points à 3,7265%.

PÉTROLE

Le marché pétrolier a accru ses pertes au fil des heures entre craintes de dégradation de la demande et appréciation du dollar, et il évolue désormais au plus bas depuis la mi-janvier: le Brent abandonne 5,03% à 85,91 dollars le baril et le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) cède 5,94% à 78,53 dollars.

L'essence et le diesel perdent aussi plus de 5% sur le marché américain.

(Rédigé par Marc Angrand)