Le Parlement européen,

- vu ses précédentes résolutions concernant le Venezuela, en particulier celles du 27 février 2014 sur la situation au Venezuela(1), du 18 décembre 2014 sur la persécution de l'opposition démocratique au Venezuela(2), du 12 mars 2015 sur la situation au Venezuela(3), du 8 juin 2016 sur la situation au Venezuela(4), du 27 avril 2017 sur la situation au Venezuela(5), du 8 février 2018 sur la situation au Venezuela(6) et du 3 mai 2018 sur les élections au Venezuela(7),

- vu les déclarations des 26 janvier 2018, 19 avril 2018 et 22 mai 2018 de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) sur l'évolution récente de la situation au Venezuela,

- vu les conclusions du Conseil du 13 novembre 2017 et des 22 janvier, 28 mai et 25 juin 2018,

- vu la mission officielle en Colombie de Christos Stylianides, commissaire européen chargé de l'aide humanitaire et de la gestion des crises, en mars 2018,

- vu la déclaration du 23 avril 2018 de son groupe de soutien à la démocratie et de coordination des élections,

- vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

- vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques,

- vu le statut de Rome de la Cour pénale internationale,

- vu la déclaration du 8 février 2018 du Procureur de la Cour pénale internationale, MmeFatou Bensouda,

- vu la déclaration du 31 mars 2017 du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme sur le Venezuela,

- vu le rapport publié le 22 juin 2018 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, intitulé «Human rights violations in the Bolivarian Republic of Venezuela» («Violations des droits de l'homme commises en République bolivarienne du Venezuela»),

- vu la déclaration commune du 28 avril 2017 de la rapporteure spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, du rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté de réunion pacifique et d'association, du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et du groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire,

- vu la déclaration du 23 mai 2018 des dirigeants du G7,

- vu les conclusions des 23 janvier 2018, 14 février 2018, 21 mai 2018 et 2 juin 2018 du groupe de Lima,

- vu la déclaration du 20 avril 2018 de l'Organisation des États américains sur la détérioration de la situation humanitaire au Venezuela,

- vu le rapport publié le 12 février 2018 par la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH), intitulé «Democratic Institutions, the Rule of Law and Human Rights in Venezuela» («Institutions démocratiques, état de droit et droits de l'homme au Venezuela») et vu la résolution du 14 mars 2018 de la CIDH,

- vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que la situation en matière de droits de l'homme, de démocratie et d'état de droit continue de se dégrader au Venezuela; que des personnes en nombre croissant continuent de quitter le Venezuela pour diverses raisons, parmi lesquelles l'insécurité et les violences, les violations des droits de l'homme et la détérioration de l'état de droit, le manque de denrées alimentaires ou de médicaments ou les difficultés d'accès aux services sociaux fondamentaux, les pertes de revenus et la hausse des taux de pauvreté;

B. considérant que, selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, 87 % de la population du Venezuela souffre de pauvreté, dont 61,2 % d'extrême pauvreté; que la mortalité maternelle a crû de 60 % et la mortalité infantile de 30 %; qu'il manque au pays 80 % des approvisionnements et équipements médicaux élémentaires; qu'en 2017, le nombre de cas de malaria a augmenté de 69 % par rapport à l'année précédente, ce qui constitue, selon l'Organisation mondiale de la santé, la hausse la plus forte au monde; que d'autres maladies, comme la tuberculose et la rougeole, sont sur le point de prendre un caractère épidémique; que, malgré ces chiffres alarmants, les autorités vénézuéliennes continuent de nier l'existence d'une crise humanitaire et refusent l'aide internationale;

C. considérant que la situation économique s'est considérablement détériorée; que le Fonds monétaire international prévoit une flambée de l'hyperinflation au Venezuela, qui devrait atteindre 13 000 % en 2018 contre 2 400 % en 2017, ce qui correspond à une augmentation des prix de près de 1,5 % par heure;

D. considérant que le rapport publié le 22 juin 2018 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme met en exergue le fait que les autorités vénézuéliennes n'entendent pas demander aux auteurs de graves violations des droits de l'homme de répondre de leurs actes, qui vont du recours excessif à la force contre les manifestants aux assassinats en passant par les détentions arbitraires, les mauvais traitements et les actes de torture; que l'impunité des agents de sécurité soupçonnés d'exécutions extrajudiciaires de manifestants semble également la règle; que ces constatations traduisent une aggravation de la situation tendue que connaît le pays;

E. considérant que les multiples aspects de la crise actuelle, d'origine humaine, que connaît le Venezuela ont entraîné le plus important déplacement de population qu'ait connu la région; que, selon les chiffres officiels prudents fournis par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de deux millions de citoyens vénézuéliens ont quitté leur pays depuis 2014, dont près d'un million entre 2015 et 2017; que la large majorité des Vénézuéliens qui ont fui leur pays (84 %, selon l'OIM) se sont installés dans un autre pays d'Amérique latine;

F. considérant que, selon l'OIM, c'est la Colombie qui accueille le plus grand nombre de Vénézuéliens, puisqu'ils sont plus de 820 000 à vivre sur son territoire, suivie du Pérou (près de 350 000), de l'Argentine (95 000) et du Brésil (50 000); que 520 000 Vénézuéliens bénéficient, dans la région, de dispositifs juridiques de séjour autres; que plus de 280 000 Vénézuéliens dans le monde ont demandé le statut de réfugié; que l'on estime que plus de 60 % des Vénézuéliens qui ont quitté leur pays demeurent en situation irrégulière; que les voies maritimes d'émigration sont de plus en plus empruntées, en particulier vers les îles caraïbes Aruba, Curaçao, Bonaire et Trinité-et-Tobago; que les pays d'accueil éprouvent toujours plus de difficultés à fournir de l'aide aux nouveaux arrivants;

G. considérant que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a lancé un nouvel appel pour réunir 46,1 millions de dollars afin de financer la première réponse dans le cadre de neuf opérations qui se concentrent sur les principaux pays d'accueil, à savoir le Brésil, la Colombie, le Costa Rica, l'Équateur, le Mexique, le Panama, le Pérou, et la région des Caraïbes méridionales; que l'appel aux fonds comprend également des interventions au Venezuela; qu'au 13 juin 2018, seulement 44 % du montant demandé ont été versés (20,5 millions de dollars), soit un déficit de financement de 56 %;

H. considérant que le 7 juin 2018, la Commission a annoncé une enveloppe de 35,1 millions d'euros pour l'aide d'urgence et l'aide au développement en vue de soutenir la population vénézuélienne et les pays voisins touchés par la crise; que cette contribution financière s'ajoutera aux 37 millions d'euros que l'Union européenne s'est déjà engagée à verser dans le cadre de projets d'aide humanitaire et de coopération dans le pays;

I. considérant que les élections tenues au Venezuela le 20 mai 2018 n'ont été ni libres ni régulières et que leurs résultats sont dépourvus de toute crédibilité, le processus électoral n'ayant pas assuré les garanties nécessaires à la tenue d'élections inclusives et démocratiques;

J. considérant que, chaque mois, plus de 12 000 Vénézuéliens entrent sur le territoire de l'État brésilien du Roraima et qu'environ 2 700 d'entre eux s'installent dans la ville de Boa Vista; que les Vénézuéliens constituent déjà plus de 7 % de la population de la ville et qu'au rythme actuel ils seront plus de 60 000 à y vivre d'ici la fin de l'année; que cet afflux de population met très fortement sous pression les services publics de la ville, tout particulièrement de santé publique et d'éducation; que le Roraima est l'un des États les plus pauvres du Brésil, avec un marché du travail très réduit et une économie peu développée, ce qui constitue un obstacle supplémentaire à l'intégration des migrants et des réfugiés;

K. considérant qu'il a envoyé une délégation ad hoc aux frontières vénézuélo-colombienne et vénézuélo-brésilienne du 25 au 30 juin 2018 pour évaluer les conséquences de la crise sur le terrain;

1. exprime sa solidarité avec tous les Vénézuéliens contraints de fuir leur pays en l'absence des conditions de vie les plus élémentaires, comme l'accès aux denrées alimentaires, aux services de santé et aux médicaments; est en outre vivement préoccupé par la situation humanitaire dramatique au Venezuela, qui a provoqué un afflux sans précédent de réfugiés dans les pays voisins et plus lointains;

2. demande de convenir immédiatement d'un plan pour un accès en urgence de l'aide humanitaire au pays, et invite les autorités vénézuéliennes à permettre l'acheminement sans entrave de l'aide humanitaire de toute urgence et à assurer l'accès aux organisations internationales qui souhaitent apporter une assistance à la population; préconise de mettre rapidement en œuvre une mesure à court terme pour faire face à la malnutrition des groupes les plus vulnérables;

3. reconnaît l'importance et se félicite de la mise en œuvre des mesures prises par plusieurs pays de la région pour répondre à la situation, notamment la régularisation du statut de certains migrants au moyen de visas et de titres de séjour temporaires et la reconnaissance de réfugiés au titre de la déclaration de Carthagène sur les réfugiés; invite les États membres de l'Union à apporter immédiatement des réponses ayant pour finalité la protection des migrants ou réfugiés vénézuéliens présents sur leurs territoires, tels que des visas humanitaires, des dispositifs de séjour extraordinaire ou d'autres cadres migratoires régionaux, assorties des garanties de protection afférentes;

4. invite la communauté internationale à apporter une réponse coordonnée, globale et régionale à la crise et à intensifier son aide financière et matérielle aux pays bénéficiaires en vue du respect de leurs engagements; rappelle que le nouvel appel du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés souffre d'un déficit de financement de 25,6 millions de dollars;

5. demande à l'Union européenne de poursuivre son soutien financier et de l'accroître, si nécessaire, compte tenu de la dégradation de la situation et des conséquences de celle-ci sur les flux de réfugiés;

6. réaffirme que la crise humanitaire actuelle découle d'une crise politique; rappelle que le seul moyen de sortir de la crise réside dans le dialogue et les négociations; fait part de son adhésion à une solution politique négociée en tant qu'elle constitue l'unique moyen de rétablir une stabilité durable dans le pays, de résoudre une crise profonde et de répondre aux pressants besoins de la population;

7. demande au service européen pour l'action extérieure de prêter tout son concours aux efforts de médiation internationale qui sont nécessaire pour dégager des perspectives en vue de l'ouverture d'un dialogue politique viable;

8. demande aux autorités vénézuéliennes de mettre immédiatement un terme à l'ensemble des violations des droits de l'homme, y compris celles à l'encontre des civils, et de respecter pleinement l'ensemble des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris la liberté d'expression, la liberté de la presse et la liberté de réunion; invite instamment les autorités vénézuéliennes à rétablir l'ordre démocratique, condition indispensable pour mettre fin à l'escalade de la crise;

9. appelle de ses vœux la tenue de nouvelles élections présidentielles, conformes aux normes démocratiques internationalement reconnues et à l'ordre constitutionnel vénézuélien; rappelle l'impératif de respecter toutes les institutions démocratiquement élues, notamment l'Assemblée nationale, de libérer tous les prisonniers politiques et de protéger les principes démocratiques, l'état de droit et les droits de l'homme;

10. souligne que cet appel à de nouvelles élections doit avoir pour finalité la réélection des principales institutions du pays, à savoir le président et l'Assemblée nationale; rappelle que les conditions auxquelles ces élections se dérouleront devraient faire l'objet d'un accord entre le gouvernement et l'opposition, dans un cadre transparent, équitable et régulier en présence d'observateurs internationaux, sans exclusion de partis politiques ou de candidats et dans le plein respect des droits politiques de tous les Vénézuéliens;

11. souscrit à la demande du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme en faveur de la mise en place d'une commission d'enquête sur la situation au Venezuela et d'un engagement accru de la CPI; demande à l'Union d'y contribuer activement;

12. demande une nouvelle fois qu'une délégation du Parlement européen soit envoyée au Venezuela pour mener un dialogue avec toutes les parties au conflit dans les plus brefs délais;

13. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au gouvernement et à l'Assemblée nationale de la République bolivarienne du Venezuela, au gouvernement et au Congrès de la République de Colombie, à l'Assemblée parlementaire euro-latino-américaine et au secrétaire général de l'Organisation des États américains.

La Sté Parlement Européen a publié ce contenu, le 04 juillet 2018, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
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