ajoute déclaration chef de l'Etat allemand, responsable social-démocrate

BERLIN (awp/afp) - Proche de Poutine et des grands groupes russes, toujours prompt à s'en prendre à l'Ukraine, l'ex-chancelier Gerhard Schröder est devenu en Allemagne une figure encombrante, y compris pour Olaf Scholz, dont il fut le mentor.

A 77 ans, celui qui avait réussi en 1998 à terrasser Helmut Kohl, l'inamovible chancelier de la Réunification, fait l'objet de critiques croissantes en Allemagne.

"Ce Gerhard Schröder erre dans le magasin de porcelaine de la politique étrangère, quelque part dans la zone grise peu ragoûtante entre embarras et farce", résume dans un éditorial au vitriol la chaîne publique ARD.

En cause? Ses liens avec la Russie de Vladimir Poutine, dont il est devenu un des plus ardents défenseurs, y compris quand Moscou masse plus de 100.000 soldats à la frontière avec l'Ukraine.

Liens amicaux et financiers

M. Schröder, chancelier quand M. Poutine est arrivé au pouvoir en 2000, a noué "une véritable amitié, basée sur la confiance" avec le dirigeant russe, qu'il a dépeint en 2004 en "parfait démocrate", explique à l'AFP la politologue Ursula Münch.

Un des clés de cette "amitié virile", selon les termes de la presse allemande, serait à rechercher dans le passé des deux hommes.

"Peut-être que le fait que nos deux familles aient beaucoup souffert de la Seconde Guerre mondiale nous rapproche", confiait M. Schröder en 2016. "J'ai perdu mon père", soldat de la Wehrmacht, tué en 1944 en Roumanie, et "un frère de Poutine est mort pendant le siège de Leningrad", relevait-il.

Des liens financiers relient aussi l'ancien avocat à la Russie.

M. Schröder devrait ainsi en juin entrer au conseil de surveillance du géant russe Gazprom. Une nouvelle casquette dans le secteur énergétique russe pour celui qui est déjà président du conseil d'administration de Rosneft, premier groupe pétrolier russe, et du comité d'actionnaires de Nord Stream 2, gazoduc russo-allemand controversé également bâti par Gazprom.

"L'ancien chancelier est important pour Poutine. Il dirige les conseils d'administration de groupes gaziers et pétroliers et il est au centre d'un réseau d'influence russe en Allemagne", résume le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Celui qui avait gagné l'estime des Allemands en s'opposant à l'intervention occidentale en Irak en 2003, mais qui touche désormais des centaines de milliers d'euros chaque année d'entreprises russes, apparaît surtout aujourd'hui comme un lobbyiste.

Ses déclarations récentes exhortant Kiev à faire cesser "les bruits de bottes" à sa frontière semblent avoir servi de déclic en Allemagne, y compris dans son ancien parti, lui-même soupçonné de complaisance à l'égard de Moscou.

Les déclarations de l'ancien chancelier nourrissent "la polyphonie au sein du SPD qui donne une impression problématique d'indécision", note Ursula Münch.

Plusieurs ténors du SPD coupent désormais les ponts les uns après les autres avec l'encombrant M. Schröder.

"Être employé de Poutine en tant qu'ancien chancelier, je trouve que c'est grave", s'est emporté un ancien cadre du parti, Rudolf Dressler, dans le Spiegel.

Scholz et Steinmeier prennent leurs distances

Olaf Scholz lui-même, pourtant proche parmi les proches de M. Schröder lorsque ce dernier était chancelier, et ardent défenseur de ses réformes sociales les plus contestées, a pris ses distances.

Gerhard Schröder "ne parle pas au nom du gouvernement, il ne travaille pas pour le gouvernement", a lancé le 7 février en guise de mise au point sur CNN Olaf Scholz lors d'un déplacement à Washington destiné à rassurer l'allié américain sur la fiabilité allemande.

Il a été suivi dimanche par le chef de l'Etat allemand, Frank-Walter Stenmeier, qui fut jadis pourtant le plus proche collaborateur de M. Schröder à la chancellerie.

"Je porte la resonsabilité de mes propos, Gerhard Schröer des siens", a-t-il dit à la télévision publique.

Combien de temps encore dans ces conditions Gerhard Schröder pourra-t-il continuer à jouir du personnel et des locaux mis à sa disposition, en tant qu'ex-chancelier, à la Chambre des députés?

Ces frais sont estimés par le quotidien populaire Bild à près de 300.000 euros par an. L'opposition conservatrice réclame que l'Etat cesse de payer.

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