par Michelle Nichols

NATIONS UNIES, 18 avril (Reuters) - Les Etats-Unis, allié de longue date d'Israël, ont opposé jeudi au Conseil de sécurité de l'Onu leur veto à un projet de résolution destiné à accorder à la Palestine le statut de membre de plein droit des Nations unies, une mesure qui serait revenue à reconnaître l'existence d'un Etat palestinien.

Le texte, soumis par l'Algérie, recommandait aux 193 membres de l'Assemblée générale de l'Onu que "l'Etat de Palestine soit admis comme membre des Nations unies".

Washington estime que la création d'un Etat palestinien indépendant doit découler de négociations directes avec Israël et non pas être mise en oeuvre à l'Onu, où les Etats-Unis ont pour tradition de protéger l'Etat hébreu.

Les Palestiniens disposent actuellement du statut d'observateur aux Nations unies - une reconnaissance de facto de l'existence d'un Etat palestinien -, accordé par l'Assemblée générale de l'Onu en 2012. Toutefois, le statut de membre de plein droit est attribué seulement si le Conseil de sécurité puis les deux tiers de l'Assemblée générale l'approuvent.

Pour être adopté, tout texte doit être approuvé par au moins neuf des 15 membres du Conseil de sécurité et ne pas faire l'objet d'un veto de la part d'un des cinq membres permanents - Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Russie et Chine.

"Si la France n'est pas à l'initiative (du texte), son vote s'inscrit dans la continuité de sa position constante sur le sujet", a-t-on déclaré à l'Elysée, rappelant que Paris "soutient de longue date une représentation de la Palestine dans les instances internationales".

"Ce vote est à distinguer juridiquement d'un acte de reconnaissance nationale bilatérale. Ce vote n'équivaut donc pas à la reconnaissance par la France d'un Etat palestinien", a-t-on précisé, évoquant un sujet qui "doit intervenir au bon moment et avec le soutien le plus large possible".

"VOLATILITÉ"

Ces nouveaux efforts pour faire entrer pleinement les Palestiniens à l'Onu interviennent alors que la guerre dans la bande de Gaza entre Israël et le Hamas est entrée dans son septième mois. L'Etat hébreu continue par ailleurs d'étendre ses colonies en Cisjordanie occupée.

En amont du vote, le secrétaire général de l'Onu, Antonio Guterres, a déclaré que "les récentes escalades rendent encore plus nécessaire de soutenir les efforts de bonne foi destinés à parvenir à une paix durable entre Israël et un Etat palestinien complètement indépendant, viable et souverain".

"Une absence de progrès vers une solution à deux Etats alimentera seulement la volatilité et les risques pour des centaines de millions de personnes à travers la région, lesquelles continueront de vivre sous la menace constante de violences", a-t-il ajouté.

L'ambassadeur israélien auprès de l'Onu, Gilad Erdan, a déclaré que les Palestiniens ne répondaient pas aux critères nécessaires pour devenir un membre intégral des Nations unies: une population permanente, un territoire défini, un gouvernement et des capacités à nouer des relations avec d'autres Etats.

"Qui le Conseil vote-t-il pour 'reconnaître' et donner le plein statut de membre ? Le Hamas à Gaza ? Le Djihad islamique palestinien à Naplouse (en Cisjordanie) ? Qui ?", a interrogé le haut diplomate israélien avant le vote, estimant qu'une telle mesure aurait "zéro impact positif pour quiconque".

"Cela provoquerait seulement de la destruction pour les années à venir, et nuire à toute chance de futur dialogue", a ajouté Gilad Erdan.

"Comment cela pourrait-il endommager la perspective d'une paix entre les Palestiniens et les Israéliens ?", a demandé pour sa part l'émissaire spécial de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne qui dispose de prérogatives limitées en Cisjordanie occupée. "Comment cette reconnaissance et cette adhésion pourraient-elles causer des torts à la paix et à la sécurité internationales ?", a poursuivi Ziad Abou Amr.

"Ceux qui essaient de perturber l'adoption d'une telle résolution (...) n'aident pas aux perspectives d'une paix entre les Palestiniens et les Israéliens et, plus généralement, d'une paix au Moyen-Orient", a-t-il dit devant le Conseil de sécurité avant le vote. (Michelle Nichols; version française Jean Terzian, avec Elizabeth Pineau)