Genève (awp) - Les prix de l'immobilier résidentiel devraient rester stables jusqu'à fin 2020 en Suisse. Une offre abondante, des conditions d'accès plus strictes à la propriété et la faible croissance économique sont de nature contrebalancer les effets des taux historiquement bas, selon une étude d'Edmond de Rothschild.

Les prix de l'immobilier résidentiel (biens habités et non loués par le propriétaire) ont pris l'ascenseur entre le milieu de l'année 2011 et mi-2018, alimentés notamment par des taux d'emprunts hypothécaires de plus en plus bas et par une croissance régulière de la population due à l'immigration, de quelque 70'000 habitants en moyenne par année sur dix ans.

Mais la donne est en train de changer, selon l'étude publiée mercredi et commentée pour AWP par son auteur, Jean-Christophe Delfim, économiste zone euro et recherche marchés immobiliers chez Edmond de Rothschild. "Un taux de vacance élevé maintiendrait une pression à la baisse sur les prix. Nous prévoyons que ceux-ci resteront plus stables jusqu'à la fin de l'année prochaine, avec même un léger recul (-0,35%) en glissement annuel sur 2019", relève le spécialiste.

La Suisse retrouverait ainsi une situation d'apparence similaire à celle d'après la crise de 2009, où les prix des biens construits avaient stagné pendant deux ans avant de prendre l'ascenseur: +15,3% sur un an dès le 2e trimestre 2011, puis une croissance moyenne de 2,7% en glissement annuel jusqu'au 2e trimestre 2018. "Mais aujourd'hui, l'offre commence à devenir excédentaire, l'inflation est très faible, et il faudrait de nouveaux relais de croissance pour faire que les prix progressent encore", constate M. Delfim.

Tout stagnants qu'ils soient - contrairement à la France, l'Allemagne ou à la Grande-Bretagne où ils devraient poursuivre leur hausse sauf en cas de Brexit sans accord dans le dernier cas -, les prix de l'immobilier résidentiels restent très souvent inaccessibles pour la classe moyenne en Suisse dans les grandes villes, comme l'avaient précédemment démontré d'autres études.

Pierre attractive

Pour M. Delfim, des déséquilibres existent, en raison des prix élevés. "Si les taux venaient à monter, des difficultés (supplémentaires) pourraient survenir pour acquérir ou garder un bien." A l'inverse, l'économiste n'apprécie guère le terme de bulle, qui suggérerait une déconnexion inexpliquée avec les fondamentaux du marché, ainsi qu'un éclatement et une chute des prix. L'offre est certes forte, mais le "capacité constructible" reste faible, à cause des contraintes géographiques et de la nécessité de préserver les sols et l'environnement.

L'économiste constate aussi que, faute d'alternatives de placements, de plus en plus d'acteurs institutionnels investissent dans la pierre. "Cela reste intéressant de devenir propriétaire en raison des taux bas", prolonge-t-il.

L'avenir dépendra de la croissance économique (mais l'évolution des prix de l'immobilier devrait rester légèrement inférieure à celle-ci jusqu'à fin 2020), de l'absorption de l'offre devenue plus abondante et des conditions de crédit.

De nouvelles règles macroprudentielles concernant le niveau requis de fonds propres entreront en vigueur au 1er janvier, mais elles ne concerneront que les hypothèques de l'immobilier de rendement, et non d'habitation. Leur impact devrait donc rester limité, estime l'économiste.

D'une façon générale, l'attractivité économique d'une région est essentielle pour le niveau des prix. Pour cette raison, l'Arc lémanique reste cher, mais Edmond de Rothschild ne fournit pas encore de prévisions locales chiffrées.

op/fr