PARIS (Reuters) - La décision d'accorder à l'Ukraine le statut de candidat à l'Union européenne (UE) doit être prise sans que cela n'affaiblisse le bloc et sans laisser Kyiv dans l'incertitude pendant des années, a déclaré vendredi un responsable français.

La Commission européenne (CE) rendra son avis sur la demande de candidature de l'Ukraine le 17 juin, et les chefs d'Etat de l'Union devraient en discuter lors d'un sommet qui se tiendra la semaine suivante.

Même si la candidature de l'Ukraine est approuvée, la procédure pour devenir membre à part entière de l'UE prend plusieurs années et peut faire l'objet d'un veto de la part de tout Etat membre.

Il existe toutefois des divisions au sein du bloc quant à l'octroi du statut de candidat. Certains Etats membres veulent qu'une promesse ferme soit faite pour envoyer un signal fort à la Russie après son invasion de l'Ukraine, tandis que d'autres, dont les Pays-Bas et le Danemark, se montrent plus prudents.

Les deux grandes puissances du bloc, la France et l'Allemagne, ont également exprimé des réserves.

"Nous savons qu'il y a différentes sensibilités sur le sujet au sein de l'Union européenne", a déclaré une source au sein de la présidence française aux journalistes.

"Nous serons attentifs à l'unité du Conseil européen. Nous pensons aussi que l'Union européenne doit sortir renforcée de cette crise en Ukraine et non pas affaiblie."

Trois diplomates européens ont estimé que le scénario le plus probable était que la CE, qui donnera également des recommandations concernant la Moldavie et la Géorgie, donne son feu vert, en y mettant probablement des conditions.

Les chefs d'Etat trouveraient alors, selon toute vraisemblance, une "formule" qui ne donnerait pas immédiatement à l'Ukraine le statut de candidat, ont-ils expliqué.

"La philosophie a changé. Personne ne dit clairement non, mais les Etats plus réservés veulent repousser autant que possible l'échéance", a indiqué un diplomate européen.

Le président ukrainien Volodimir Zelensky a déclaré lors d'une conférence au Danemark vendredi que les grandes déclarations selon lesquelles l'Ukraine faisait partie de la famille européenne devaient être suivies d'actes.

"Notre position est claire: l'Ukraine a besoin d'une engagement juridique, pas une promesse politique. Les hésitations coûtent trop cher à notre pays", a écrit jeudi la vice-Première ministre ukrainienne Olga Stefanichina sur Twitter à l'issue d'une réunion avec la CE.

Le président français Emmanuel Macron a suggéré le mois dernier de créer une "communauté politique européenne" qui créerait une nouvelle structure, permettant une coopération plus étroite avec les pays cherchant à adhérer à l'UE. Cette initiative a irrité Kyiv et plusieurs Etats membres de l'UE, qui y voient une tentative de repousser l'adhésion de l'Ukraine.

"La réponse aux besoins de l'Ukraine ne réside pas dans un statut, mais dans des politiques et dans la démonstration de notre solidarité", a déclaré le responsable français.

"La pire (des choses à faire) serait, au fond, que nous donnions un statut à l'Ukraine et que 10 ans, 20 ans, 30 ans, 40 ans (plus tard), ou, si je prends le cas de la Turquie, presque 60 ans plus tard, nous constatons qu'en fait, rien ne s'est passé."

(version française Camille Raynaud)

par John Irish