Tokyo (awp/afp) - La Banque du Japon a laissé jeudi inchangée sa politique monétaire déjà très accommodante, mais son gouverneur s'est dit "plus enclin" à adopter de nouvelles mesures si nécessaire, renforçant les attentes pour la prochaine réunion de l'institution fin octobre.

Son statu quo contraste en apparence avec les efforts des autres grandes Banques centrales: mercredi, la Réserve fédérale américaine (Fed) a ainsi légèrement abaissé ses taux directeurs, pour la deuxième fois en deux mois, et la Banque centrale européenne (BCE) avait livré un nouveau bouquet de mesures anti-crise la semaine dernière.

Mais la Banque du Japon (BoJ) a déjà épuisé bon nombre de cartouches ces dernières années. Elle applique déjà un taux négatif de 0,1% sur des dépôts de banques auprès d'elle, pour les inciter à prêter davantage plutôt qu'à faire dormir leurs liquidités dans ses coffres.

Et sur le long terme, elle agit en achetant massivement des obligations d'Etat japonaises - à un rythme annuel de 80.000 milliards de yens (plus de 670 milliards d'euros au cours actuel) - pour faire en sorte que les rendements obligataires à dix ans restent autour de 0%.

Là aussi, le but est que les établissements bancaires délaissent ces actifs et réinjectent dans l'économie réelle les liquidités qu'ils obtiennent en échange, sous forme de crédits aux entreprises et aux ménages, pour stimuler la croissance et l'inflation.

La BoJ a décidé jeudi de garder les mêmes modalités pour que les taux d'intérêt à court et long terme demeurent à des niveaux extrêmement bas "au moins jusqu'au printemps 2020", selon son communiqué.

L'institution est toutefois encore très loin de sa cible d'inflation de 2%: en juillet, les prix à la consommation (hors produits frais) ont augmenté d'à peine 0,6% sur un an, comme en juin. C'est le plus bas niveau de l'inflation depuis deux ans dans le pays.

La BoJ a aussi souligné "la montée des risques" pesant sur l'économie mondiale, entre la guerre commerciale sino-américaine, le Brexit et les tensions géopolitiques, dans une probable allusion notamment aux récentes attaques de sites pétroliers en Arabie saoudite.

"Pas d'options efficaces"

"Si vous me demandez si nous devenons plus enclins à adopter de nouvelles mesures accommodantes par rapport à notre précédente réunion (fin juillet, NDLR), la réponse est oui" a déclaré jeudi le gouverneur de l'institution, Haruhiko Kuroda, lors d'une conférence de presse à Tokyo.

Le gouverneur s'est bien gardé de préciser quelles nouvelles mesures la BoJ pourrait prendre, ainsi que leur calendrier. Mais aux yeux des commentateurs, ses propos ont encore augmenté la probabilité d'une action après sa prochaine réunion (30-31 octobre).

"Actuellement la BoJ n'a plus d'options efficaces à sa disposition", a cependant estimé l'économiste Naoya Oshikubo, dans une note de Sumitomo Mitsui Trust Asset Management.

Creuser encore davantage son taux négatif sur les dépôts bancaires auprès d'elle pourrait faire plus de mal que de bien au système financier japonais, a notamment ajouté M. Oshikubo.

La tendance d'une croissance modérée "devrait se poursuivre" au Japon, malgré le ralentissement de l'économie mondiale qui pèse sur ses exportations, et en dépit d'une demande intérieure risquant d'être affectée par la hausse de la taxe sur la consommation dans le pays à compter du 1er octobre, a estimé la BoJ.

Cependant l'impact de cette hausse de taxe ne devrait pas être "significatif", a encore assuré M. Kuroda en conférence de presse.

La Banque du Japon révisera fin octobre ses prévisions d'inflation et de croissance. Pour l'exercice budgétaire 2019/2020, elle table actuellement sur une hausse des prix d'environ 1% et sur une croissance économique de 0,7%.

afp/al