Londres (awp/afp) - La Banque d'Angleterre (BoE) a annoncé jeudi avoir maintenu sa politique monétaire très souple inchangée, mais envisage désormais un "léger resserrement" dans les deux prochaines années pour contrer la montée de l'inflation.

La hausse des prix, dopée notamment par l'énergie, qui a atteint 2,5% sur un an en juin, pourrait grimper jusqu'à 4% au quatrième trimestre, prévient la BoE, soit bien plus que son objectif de 2%.

La BoE reconnaît qu'"un modeste resserrement de la politique monétaire sera probablement nécessaire" d'ici à fin 2023 "pour atteindre notre objectif d'inflation à moyen terme".

Mais pas question pour autant de changer de politique dans l'immédiat: tous les membres du comité monétaire, qui s'est réuni mercredi, ont voté pour un maintien du taux directeur à 0,1%, et un seul membre s'est opposé au maintien du programme de rachats d'actifs de 895 milliards de livres.

Le gouverneur de la BoE, Andrew Bailey, a ainsi souligné lors d'une conférence de presse qu'il y avait "250.000 personnes sans emploi de plus actuellement qu'avant la pandémie" pour justifier le soutien apporté à l'économie britannique.

L'activité a par ailleurs souffert à court terme, notamment en raison de la propagation du variant Delta du Covid-19 qui a obligé des centaines de milliers de cas contacts britanniques à s'isoler.

Avec une croissance du PIB de 0,8% en mai, la reprise marque le pas par rapport à mars (+2,4%) et avril (2%), et l'activité économique reste à un niveau situé 3,1% plus bas qu'en février 2020, selon les données de l'Office national des statistiques. Cette dernière dévoilera les chiffres pour le deuxième trimestre la semaine prochaine.

Modestie monétaire ___

"Le PIB devrait croître de 3% au troisième trimestre, un peu moins que nous ne l'attendions en mai", précise la BoE, qui table toujours sur une croissance annuelle de 7,25% et un retour de l'économie à son niveau prépandémie à la fin de l'année.

Elle a par ailleurs relevé légèrement sa prévision pour 2022 à 6%.

"Des incertitudes planent" sur l'emploi britannique, "notamment en raison de la fin du plan gouvernemental d'aide à l'emploi", avec le retrait prévu fin septembre du dispositif de chômage partiel, souligne également l'institution.

La Banque d'Angleterre s'est donc contentée d'amender les détails de son plan de rachats d'actifs: quand le taux d'intérêt atteindra 0,5%, l'institution arrêtera de réinvestir sur le marché monétaire le produit des obligations arrivant à échéance, là où ce seuil était jusqu'à présent fixé à 1,5%.

"Cela présente un programme clair et prévisible pour le marché" et évitera un choc sur le marché obligataire, espère M. Bailey.

Certains observateurs espéraient que plus de membres de la BoE s'inquièteraient de la hausse de l'inflation et défendraient un resserrement plus rapide.

"L'utilisation du terme +modeste+ sous-entend que la majorité du comité ne voit pas la nécessité de monter ses taux plus rapidement, ou plus fort, que le marché ne l'attend actuellement", commente Samuel Tombs, analyste à Pantheon Macroeconomics.

"La vision inchangée de la Banque d'Angleterre contraste avec celle de la Banque centrale américaine (Fed), dont plusieurs membres ont publiquement affirmé que le programme de rachats d'actifs devrait être réduit dès l'année prochaine", a souligné Susannah Streeter, analyste de Hargreaves Lansdown.

Dernier dossier abordé, la Banque d'Angleterre a confirmé qu'adopter un taux négatif était désormais théoriquement faisable, alors que l'institution avait demandé au secteur financier britannique de s'y préparer.

Mais M. Bailey s'est empressé de préciser qu'il s'agissait d'un "outil disponible" qui ne serait a priori pas utilisé dans l'immédiat.

"La reprise économique a entraîné un déplacement du débat, d'une possible baisse des taux dans le négatif" quand l'économie coulait sous le poids des confinements successifs, "vers une hausse" pour contrer l'inflation, explique Daniel Vernazza, analyste chez UniCredit.

afp/rp