PARIS/LONDRES (Reuters) - En décidant de suspendre dès le 1er janvier prochain les surtaxes douanières sur les produits américains imposées dans le cadre du litige sur les subventions accordées à Boeing et Airbus, Londres a pris l'avionneur européen de court et mis en lumière le fossé grandissant entre la Grande-Bretagne et l'Union européenne dans le secteur aérospatial, a-t-on appris de sources industrielles.

Selon Londres, qui négocie les termes de son divorce avec l'Union européenne, cette décision ambitionne d'apaiser ce conflit entre les Etats-Unis et l'Europe qui a entraîné de séries de mesures et de contre-mesures.

Elle signale aussi la volonté du gouvernement britannique de renforcer ses liens avec les Etats-Unis, alors que Londres et Washington ont entamé des discussions sur un accord commercial bilatéral post-Brexit.

Airbus a tempéré l'ampleur de l'annonce de Londres et affirmé n'avoir d'autre objectif que celui de trouver une solution négociée à ce conflit.

En privé, plusieurs sources européennes proches des négociations commerciales conduites avec les Etats-Unis estiment toutefois que la décision britannique pourraient provoquer de sérieuses tensions entre la Grande-Bretagne et l'Union européennes. Deux de ces sources affirment que plusieurs capitales européennes ont perçu la décision britannique comme une trahison alors qu'Airbus emploie environ 14.000 personnes au Royaume-Uni.

"Il y a toujours eu des désaccords, mais c'est la première fois que l'aspect politique a aussi clairement pris le dessus (...)", a commenté une source industrielle britannique.

Les principaux actionnaires d'Airbus sont la France, l'Allemagne et l'Espagne. La Grande-Bretagne n'en est pas actionnaire mais elle abrite presque la totalité de la production des ailes et fait entendre sa voix de manière indirecte.

Selon plusieurs sources, la décision annoncée mardi par Londres risque d'inciter Airbus à réexaminer sa politique industrielle et à se poser la question de la localisation de la production des ailes de ses appareils.

"Cela fait beaucoup de tort et cela signifie que le Royaume-Uni peut dire adieu à de nouveaux investissements", a dit une des sourcesde Reuters.

(version française Nicolas Delame)

par Tim Hepher et William James