Tokyo (awp/afp) - La Banque du Japon (BoJ) a reconduit mardi sa politique monétaire ultra-accommodante, inchangée depuis plus d'un an, malgré la récente embellie économique qui alimente les attentes d'une normalisation.

De même a-t-elle gardé ses prévisions d'inflation et de croissance à l'identique dans un rapport publié à l'issue d'une réunion de deux jours, alors que les économistes avaient anticipé des modifications.

"La décision indique clairement que la BoJ veut faire taire les rumeurs quant à un resserrement monétaire imminent", a commenté pour l'agence Bloomberg News Hiromichi Shirakawa, de Credit Suisse.

"Elle aurait pu relever ses estimations de croissance au vu des données économiques récentes, mais elle ne l'a pas fait par crainte de nourrir les spéculations d'une normalisation de sa politique", a-t-il estimé.

Tout juste a-t-elle concédé des progrès du côté de l'inflation, jugeant qu'elle s'était "accélérée" et que les attentes s'étaient stabilisées après une "phase de faiblesse depuis l'été 2015", et cela a suffi à provoquer une légère montée du yen.

Peu après la diffusion du communiqué, le gouverneur Haruhiko Kuroda s'est précisément attelé à dissiper les bruits de marchés, alors que la BoJ apparaît esseulée au milieu des grandes banques centrales qui réduisent graduellement leur soutien à l'économie.

"Etant donné que nous sommes encore loin de notre objectif d'inflation de 2%, nous ne sommes pas en mesure de discuter d'un calendrier de sortie de notre politique", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.

Début janvier, un simple ajustement des achats mensuels d'actifs - pourtant "sans aucune implication en termes de politique monétaire", a assuré M. Kuroda - avait causé un renforcement de la monnaie nippone. Un scénario que la banque centrale veut à tout prix éviter car il pourrait entraver le redressement économique de l'archipel en nuisant à ses exportations.

- 'Page blanche' -

Dans son document, la BoJ estime que l'économie japonaise, qui connaît sa plus longue période de croissance ininterrompue depuis 1999-2001 (avec sept trimestres consécutifs), est en bonne voie pour "poursuivre son expansion modérée".

Concernant l'inflation, "l'élan n'est pas encore suffisamment solide, et l'évolution des prix continue à requérir une attention particulière", note la banque centrale, alors que la hausse des prix se situe en deçà de 1%.

Par conséquent, la BoJ a maintenu, comme prévu, son massif programme de rachats obligataires, situé autour de quelque 80.000 milliards de yens par an (plus de 600 milliards d'euros), en le modulant pour que le taux des obligations d'Etat à 10 ans se maintienne autour de 0%.

En réalité, le montant se situe actuellement aux alentours de 40 à 45.000 milliards de yens, mais la BoJ garde volontairement cette mention afin d'éviter tout changement de langage susceptible d'affoler des marchés fébriles.

La banque centrale a aussi reconduit les taux d'intérêt négatifs (-0,1%), mesure destinée à inciter les banques japonaises à allouer des prêts aux entreprises et aux consommateurs plutôt que de déposer leurs liquidités dans ses coffres.

Certains économistes prévoient un début d'inflexion courant 2018. Reste à savoir si M. Kuroda, 73 ans, dont le mandat arrive à échéance en avril, sera toujours aux commandes.

Le Premier ministre Shinzo Abe, qui l'avait choisi au printemps 2013 pour décliner le versant monétaire de sa stratégie de relance "abenomics", est resté muet sur ses intentions, évoquant il y a peu "une page blanche".

Le gouverneur s'est refusé, comme à son habitude, à tout commentaire sur le sujet.

afp/al