par Saliou Samb

CONAKRY, 6 septembre (Reuters) - Le flou continuait de régner lundi en Guinée, où aucune branche de l'armée n'a apporté un soutien public aux mutins de l'unité d'élite auteurs d'un coup d'Etat la veille contre le président Alpha Condé, tandis que les responsables du putsch emmenés par le colonel Mamady Doumbouya ont convoqué une réunion des responsables gouvernementaux et administratifs sortants.

Le Groupement des forces spéciales (GFS), dirigé par le colonel Doumbouya, a annoncé dimanche l'éviction d'Alpha Condé, a proclamé la suspension de la Constitution et la dissolution du gouvernement et a fermé les frontières de ce pays d'Afrique de l'Ouest de près de 13 millions d'habitants.

Au lendemain de ce coup d'Etat, quelques magasins ont rouvert et le trafic a légèrement repris lundi à Kaloum, principal quartier administratif de la capitale Conakry, où se situent par exemple de nombreuses ambassades ainsi que le palais présidentiel, théâtre d'échanges de tirs nourris dimanche.

En dépit du couvre-feu nocturne instauré par les putschistes, le quartier général de la garde présidentielle a été pillé dans la nuit, les gens quittant les lieux avec des sacs de riz, des bidons d'huile, des climatiseurs ou des matelas, a constaté un correspondant de Reuters sur place.

Un porte-parole du groupe de putschistes a annoncé lundi à la télévision d'Etat la réouverture des frontières terrestres et aériennes fermées la veille, afin de permettre les échanges commerciaux et humanitaires.

La situation volatile dans le pays, qui détient les plus importantes réserves mondiales de bauxite (minerai dont est extrait l'aluminium) a porté les cours de ce métal à des plus hauts de 10 ans, sur fond d'inquiétudes sur de futurs problèmes d'approvisionnement des marchés d'aval.

Le chef des putschistes, le colonel Mamady Doumbouya - ancien de la Légion française - a annoncé ce lundi aux ministres démis et aux responsables des administrations nationales qu'il avait convoqués au Parlement qu'ils étaient soumis à une interdiction de voyager et qu'ils devaient remettre leurs véhicules officiels à l'armée.

Il avait fait savoir dimanche que toute absence lors de cette réunion serait considérée comme un acte de "rébellion".

Alpha Condé, 83 ans, a été réélu en octobre dernier pour un troisième mandat de cinq ans à la suite d'une réforme de la Constitution vivement contestée.

Sa destitution a été motivée selon le colonel Mamady Doumbouya par "la pauvreté et la corruption endémique" dans le pays. (Reportage Saliou Samb, version française Myriam Rivet, édité par Jean-Michel Bélot et Bertrand Boucey)