PARIS (awp/afp) - En 2021, l'essor de l'e-commerce et la crise sanitaire ont entraîné une ruée sur les entrepôts en France, avec des loyers qui pourraient s'envoler...

"La demande d'entrepôts en France a encore de beaux jours devant elle !", commente auprès de l'AFP Pierre-Louis Dumont, directeur exécutif industriel et logistique au cabinet de conseil en immobilier d'entreprise CBRE.

Selon le groupement Immostat, dont les chiffres font référence pour l'immobilier d'entreprise, la demande placée, c'est-à-dire le nombre de mètres carrés d'entrepôts nouvellement loués ou vendus pour être occupés, a connu en 2021 sa meilleure année depuis 2017.

Autre symbole de cette santé, le groupe Argan, qui loue des entrepôts à la grande distribution (Carrefour, Casino, Auchan...), à des logisticiens (FM, Geodis...) ou à Amazon, a vu ses revenus locatifs grimper de 10% en 2021.

Une progression dopée par la livraison au géant américain de l'e-commerce d'un gigantesque entrepôt de 185.000 mètres carrés sur quatre étages, près de Metz.

"Il y a une très forte demande, portée d'abord par l'adoption de l'e-commerce, qui oblige à changer les réseaux de distribution, et ensuite par le fait que tout le monde a besoin de le faire en même temps", résume Pierre-Louis Dumont.

La pandémie a été un "accélérateur de tendance" pour la France, qui avait moins adopté l'e-commerce que ses voisins, note-t-il.

Or, pour passer à l'e-commerce et pouvoir livrer très rapidement ses produits aux clients, une entreprise doit réorganiser sa chaîne d'approvisionnement, faire davantage de stocks et utiliser plus de petits entrepôts à proximité des villes, pour la logistique dite du "dernier kilomètre".

Loyers en hausse ?

D'où la multiplication de petits entrepôts au coeur des villes. Même si leur poids économique est marginal, et devrait le rester selon Laetitia Dablanc, directrice de recherche à l'université Gustave Eiffel. "Ça restera une niche, mais qui va rester longtemps très active", dit-elle à l'AFP.

Autre explication, avancée par François Le Levier, du cabinet CBRE: "Les investisseurs ont mis le frein sur les classes d'actifs traditionnelles, comme le bureau, l'hôtel... qui ont subi de plein fouet la crise sanitaire, et se sont reportés sur les entrepôts logistiques."

Et en 2022, le secteur devrait continuer à attirer malgré une offre qui peine à suivre.

Construire de nouveaux entrepôts, très gourmands en foncier, va devenir de plus en plus difficile, du fait de la loi française contre l'artificialisation des sols.

"Il n'y a pas de limitation pour l'instant, mais ils (les entreprises du secteur, NDLR) savent que ça risque de leur arriver, donc ils regardent comment on fait des entrepôts à étages", remarque Laetitia Dablanc.

Autre obstacle: l'opposition fréquente des riverains, comme dans le Gard ou près de Nantes, où des mobilisations ont dissuadé l'implantation d'entrepôts Amazon.

"C'est toujours plus agréable pour les habitants d'avoir à côté de chez eux une résidence seniors ou un immeuble de bureaux qu'un entrepôt avec des camions qui vont et viennent", souligne Pierre-Louis Dumont.

Du coup, les loyers pourraient grimper en flèche.

D'autant que beaucoup de bailleurs sont des investisseurs, qui achètent des portefeuilles dans toute l'Europe, avec des objectifs de rentabilité financière.

Pour eux, "il y a une croissance importante des valeurs locatives à aller chercher, par la rareté du foncier et la loi sur l'artificialisation des sols", relève François Le Levier.

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