par Mathieu Rosemain

PARIS, 7 juin (Reuters) - Google, filiale d'Alphabet, a accepté de modifier certains de ses services de publicité en ligne dans le cadre d'un accord sans précédent conclu avec l'Autorité française de la concurrence, a annoncé cette dernière lundi.

Le régulateur français, qui a également infligé à l'entreprise de Mountain View, en Californie, une amende de 220 millions d'euros, estime que Google a abusé de sa position dominante sur le marché des serveurs publicitaires pour éditeurs de sites web et d’applications mobiles.

L'enquête de l'Autorité de la concurrence, qui faisait suite à une plainte déposée par News Corp., Le Figaro (qui s'est désisté de la saisine en novembre 2020) et le groupe de presse belge Rossel, portait sur les outils que Google propose aux éditeurs en ligne pour vendre et gérer les annonces.

"L’Autorité a constaté que Google a accordé un traitement préférentiel à ses technologies propriétaires proposées sous la marque Google Ad Manager, à la fois en ce qui concerne le fonctionnement du serveur publicitaire DFP et de sa plateforme de mise en vente SSP AdX au détriment de ses concurrents et des éditeurs", écrit-elle dans un communiqué, qualifiant ces faits de "graves".

Google n'a pas contesté les faits qui lui sont reprochés, précise cette dernière.

Dans le cadre de l'accord, le géant américain a accepté d'apporter des modifications à certains de ses services de publicité en ligne.

"Nous sommes convenus d'une série d'engagements visant à faciliter l'utilisation des données par les éditeurs et l'utilisation de nos outils avec d'autres technologies publicitaires. Nous testerons et développerons ces changements au cours des prochains mois avant de les déployer plus largement, dont certains au niveau mondial", a réagi Google.

UNE SANCTION "A JUSTE TITRE"

Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a salué la décision de l'Autorité de la concurrence qui permet, selon lui, de faire appliquer les règles concurrentielles de la France aux géants du numérique qui exercent leur activité dans l'Hexagone.

"C'est d’autant plus vital que les pratiques mises en place par Google pour favoriser ses propres technologies publicitaires ont affecté les groupes de presse, alors même que leur modèle économique est fortement dépendant des revenus publicitaires. Ce sont des pratiques graves et elles ont été sanctionnées à juste titre", a-t-il souligné dans un communiqué.

La décision de l'autorité française de la concurrence vise à rééquilibrer le marché de la publicité en ligne en faveur des éditeurs, qui détenaient le pouvoir dans ce domaine jusqu'à l'arrivée de Google et de Facebook.

Elle ouvre la voie aux éditeurs qui se sentaient désavantagés pour demander des dommages et intérêts à Google, explique le régulateur français.

Plusieurs d'entre eux à travers le monde ont exprimé leur mécontentement à l'égard des pratiques publicitaires employées par les géants du numérique.

"La décision sanctionnant Google a une signification toute particulière car il s’agit de la première décision au monde se penchant sur les processus algorithmiques complexes d’enchères par lesquels fonctionne la publicité en ligne 'display'", explique Isabelle de Silva, présidente de l’Autorité de la concurrence, dans un communiqué.

Isabelle de Silva a précisé que l'amende infligée à Google avait été réduite dans le cadre de l'accord, mais elle n'a pas donné de détails.

"Cette sanction et ces engagements permettront de rétablir un terrain de jeu équitable pour tous les acteurs, et la capacité des éditeurs à valoriser au mieux leurs espaces publicitaires", ajoute-t-elle. (Mathieu Rosemain, rédigé par Hayat Gazzane, édité par Blandine Hénault)