Prédire les cancers comme on prédit l’infarctus. Sachant que plus une maladie est détectée tôt, plus les chances de guérir sont élevées. C’est la promesse de PREDILIFE depuis sa discrète introduction en Bourse fin 2018. Comment ? En associant des techniques médicales éprouvées (tests  génétiques,  imagerie médicale...) à des modèles mathématiques exploitant des données statistiques. A quelques centaines d’euros le test, le marché est potentiellement gigantesque. Potentiellement pour les investisseurs, encore sceptiques à en croire l’évolution du cours de Bourse. Inéluctablement pour son dirigeant, même s’il se heurte aux difficultés d’évangélisation de ce marché naissant. Nous profitons de l’annonce d’une nouvelle levée de fonds pour faire le point sur ce dossier.

source : Predilife

Stéphane Ragusa, depuis votre entrée en Bourse en décembre 2018, vous levez régulièrement des capitaux. Votre activité prend-elle plus de temps à décoller que vous ne l’escomptiez ?

"Notre premier produit, MammoRisk®, est le 1er test de prédiction de risque du cancer du sein. Il est l’aboutissement d’un travail de longue haleine réalisé sur des bases de données sur lesquelles nous avons eu l’accès exclusif. Il a été mis sur le marché en 2019 et nous en avons vendu quelques centaines en 2020. Nous visons un millier en 2021, de l’ordre de 10 000 en 2022. Cela prend du temps car les tests ne sont pas en vente libre mais sur prescription, or les médecins ont du mal à prescrire un produit non remboursé. Et les études qui pourraient aboutir à son remboursement n’aboutiront pas avant des années. D’où la mise en place d’un marketing auprès des femmes les plus concernées, en France et en Europe."

source : Predilife

Pendant que vous élargissez la commercialisation géographiquement, vous élargissez également la gamme de tests…

" Ayant levé moins d'argent que prévu lors de l’IPO fin 2018, nous nous sommes concentrés en priorité sur le cancer du sein. Mais nous souhaitons adresser toutes les principales pathologies c’est-à-dire les principaux cancers et le risque cardiovasculaires. A partir du moment où nous avons un échantillon de salive, faire du génotypage pour une maladie ou pour dix revient au même coût. Aujourd’hui, un génotypage avec une puce revient à 100 euros, demain ce sera 50 euros, permettant de mesurer plusieurs centaines de milliers de gènes de ce type. Nous pourrons en utiliser quelques centaines pour le cancer du sein, et quelques centaines pour chacune des autres pathologies. Donc à relativement brève échéance, on prédira tous les principaux risques par ordre décroissant pour les principaux cancers et d’autres pathologies. Nous venons d’étendre la technologie au cancer de la prostate avec ProstRisk®. Ce nouveau dispositif médical à vocation à être intégré dans une offre globale de prédiction des principaux risques de pathologie. Ce bilan de risque devrait être lancé au printemps 2021. La question de la cible commerciale est importante. Par exemple pour le test de la prostate la cible serait le médecin généraliste ou un usage dans le cadre d’un bilan de prévention. La limite est donc commerciale et non technique pour nous positionner sur des tests pour d'autres cancers. Nous sommes actuellement en train d’accélérer l’élargissement de l’offre dans un contexte de durcissement de la réglementation européenne. D’où notre levée de fonds. "

Aujourd'hui, vous cherchez à lever 2 à 4M€ par émission d’OCEANES. Quelles sont les conditions de l'opération, et que comptez-vous en faire ?

"Nous avons levé 3,6M€ par augmentation de capital lors de l’IPO, puis 3 M€ via deux placements privés en 2019 et 2020, et 2M€ en décembre dernier via une augmentation de capital. Cette opération nous a permis de poursuivre notre extension géographique et de gamme et d’augmenter le flottant. La participation d’investisseurs particuliers à l’opération a permis d’améliorer la liquidité du titre, ce qui favorisera par la suite l’entrée d’investisseurs institutionnels lors d’une prochaine augmentation de capital qui pourrait avoir lieu fin 2021. Avant cette émission d’OCEANE, notre trésorerie s’élève à 2,5M€ pour un cash burn de 250 000 € par mois. Nous sentons que le moment est venu d’accélérer et l’OCEANE nous a semblé être la meilleure solution pour l’émetteur et le souscripteur."

Caractéristiques de l'emprunt

Principales caractéristiques de l’emprunt obligataire de 2 à 4 M€ lancé en mars 2021 (source : Predilife)

Quelles sont les perspectives sur le MammoRisk à moyen terme ?

"La vente de 10 000 tests en 2022 doit nous permettre d’atteindre l’équilibre en Ebitda sur le dernier trimestre 2022. En 2023, nous visons 100 000 tests, sachant que l’essai clinique européen My-PEBS porte sur 100 000 femmes, tout comme l’essai homologue aux Etats-Unis. Ces deux études, dont le but est de quantifier la baisse  du nombre de cancers de stade avancé avant de modifier le dépistage du cancer du sein en Europe, fonctionnent avec un budget similaire, de l’ordre de 2 M€ par an soit environ 12 M€ au total. Avec ce type de budget, on peut toucher à peu près 100 000 femmes. Pour PREDILIFE, sachant que nous faisons 100 € de marge brute par test, cela représente une opportunité de 10 M€ de marge. Ce qui correspond dans notre domaine à une valorisation d’au moins 200 M€ donc une valorisation multipliée par 10 par rapport à notre valorisation actuelle."

Compte tenu de ces perspectives enthousiasmantes, pourquoi avez-vous vendu des titres à 7.5€ mi-février ?

"J’ai investi 800K€ en décembre 2018 en souscrivant à l’introduction en Bourse de PREDILIFE à un cours de 9,3€. J’ai de nouveau investi 300K€ en juillet 2019 à l’occasion d’un placement privé à 7€, soit un total de 1,1M€ investis que j’ai financés par un emprunt hypothécaire et je dois rembourser cet emprunt."

 

source : Predilife

Bref CV de Stéphane Ragusa

Ancien élève de l’École Polytechnique il est également diplômé de l’Ensae (Statistiques) et docteur en biologie. Il a développé ce thème de la prédiction de risque en milieu académique sur des cohortes de l’INSERM, avant de créer PREDILIFE en 2004. Il a ensuite développé la société après une formation à HEC Challenges+.