San Francisco (awp/afp) - Snap, la maison mère de l'application Snapchat, a largement déçu le marché et s'est dite elle-même "pas satisfaite" par ses résultats trimestriels jeudi, au point de ralentir substantiellement le rythme des embauches, parmi d'autres mesures pour tenter de reprendre le contrôle.

Son titre perdait plus de 26% lors des échanges électroniques après la clôture de la Bourse.

Snapchat comptait 347 millions d'utilisateurs actifs quotidiens fin juin, soit 18% de plus qu'il y a un an, d'après un communiqué, et elle continue d'attirer plus de personnes dans toutes les régions du monde, y compris en Amérique du Nord et en Europe, où certaines plateformes de divertissement font pourtant face à un début de saturation.

Le groupe californien s'en sort bien aussi en termes de revenus, avec un chiffre d'affaires de 1,1 milliard de dollars (+13% sur un an).

Mais ses pertes nettes se sont creusées à 422 millions de dollars, au lieu de 152 millions l'année dernière.

"La croissance régulière de notre communauté améliore nos opportunités sur le long terme, mais nos résultats financiers au deuxième trimestre ne reflètent pas l'étendue de notre ambition", ont indiqué les dirigeants dans une note aux investisseurs.

"Nous ne sommes pas satisfaits par nos performances, quelles que soient les difficultés liées à l'environnement économique actuel", ont-ils ajouté, en référence à l'inflation galopante, notamment.

"Snapchat compte beaucoup de marques parmi ses annonceurs, et ce sont les publicités pour les marques, notamment les formats expérimentaux autour de la réalité augmentée, qui sont les premiers à partir en cas de coupe dans les budgets marketing", a noté Jasmine Enberg, du cabinet Insider Intelligence.

Examen des dépenses

Le groupe, qui n'a jamais dégagé de bénéfice net annuel, avait déjà fait un avertissement sur résultats en mai, qui avait fait plonger son cours en Bourse.

"Nous allons substantiellement ralentir le rythme du recrutement (...) et nous allons aussi examiner de près nos dépenses opérationnelles", a déclaré Derek Andersen, le directeur financier de Snap, lors d'une conférence téléphonique aux analystes.

La société compte près de 6.500 employés, 38% de plus qu'il y a un an.

Les cofondateurs du réseau, Bobby Murphy et Evan Spiegel, vont conserver leurs postes de directeur technologique et directeur général jusqu'à la fin 2026 pour 1 dollar symbolique de rémunération par an, assorti de l'attribution d'actions si le cours dépassait 40 dollars dans les 10 ans à venir. Il était à 16,35 dollars à la clôture jeudi.

Les patrons prévoient de se concentrer sur l'innovation et la diversification des revenus.

Fin juin, l'entreprise a ainsi lancé Snapchat+, une version payante de l'appli, qui donne accès à des fonctionnalités supplémentaires pour quatre dollars par mois, sans faire disparaître la publicité.

Snap veut aussi mettre au point de meilleurs outils de mesure de l'efficacité publicitaire.

Car l'application pâtit aussi du changement réglementaire d'Apple, qui impose aux éditeurs d'applications d'obtenir le consentement des utilisateurs avant de les pister dans leur navigation pour récolter des données à des fins de ciblage publicitaire.

"C'est un petit acteur sur le marché de la publicité numérique. Elle représente moins d'1% des recettes mondiales selon nos prévisions pour 2022, ce qui la rend plus sensible aux contraintes que de plus gros acteurs comme Meta", a souligné Jasmine Enberg.

La réalité augmentée au secours de la triste réalité

Derek Andersen a remarqué une baisse "assez régulière" de la demande depuis un an, qui correspond aux changements d'Apple, et une compétition qui s'est "intensifiée", "tant de la part de TikTok que d'autres concurrents plus gros et plus sophistiqués" - comme Google et Meta (Facebook, Instagram).

Autant de défis auxquels s'ajoutent la guerre en Ukraine et l'inflation record.

"Nous allons avoir besoin d'un environnement plus coopératif", a reconnu le directeur financier.

"Mettre en place des bases solides pour la plateforme, sur lesquelles nous pouvons construire et avancer, c'est très important. Mais un contexte macro-économique qui permet aux clients d'investir dans leur budget marketing est très important aussi", a-t-il précisé.

L'entreprise espère que son pari autour de la réalité augmentée va se révéler payant sur le long terme.

"En moyenne, plus de 250 millions d'utilisateurs de Snapchat se servent (de nos outils) de réalité augmentée tous les jours", assure la note aux investisseurs.

Cette technologie "est encore une niche comme outil publicitaire ou commercial, mais elle parle à la base d'utilisateurs de Snapchat", constate Jasmine Enberg.

Selon l'analyste, tant que la plateforme continue d'investir dans les outils et les contenus, elle va "attirer et conserver plus de temps de cerveau disponible, et les recettes publicitaires vont suivre".

afp/al