Splendide success story opérationnelle et boursière, ce dernier vient justement de publier ses résultats annuels. L'occasion pour nous de faire le point, en mettant comme de coutume l'actualité du moment en perspective avec les dynamiques financières à long terme.

A l'instar d'un grand nombre de ses pairs, Descartes est avant tout un "roll-up", c''est-à-dire un acquéreur en série qui mise en premier chef sur les opérations de croissance externe pour soutenir son rythme d'expansion. A l'inverse d'un grand nombre de ses pairs, le taux de croissance organique demeure très correct — quand bien même la communication financière gagnerait à davantage de transparence à ce niveau.

Arrêtons-nous aux mesures qui comptent. Le compte de résultat pour commencer : en dix ans, de l'exercice fiscal 2013 à celui de 2023, le chiffre d'affaires quadruple, de $127 à $486 millions — en dollars américains. Les hausses de prix passées juste avant la pandémie ont été bien absorbées par la clientèle, d'où une très belle expansion de marge opérationnelle ces cinq dernières années.

Du côté des profits, le free cash-flow — mesure de la capacité bénéficiaire ici plus fiable que le résultat comptable, grévé par les amortissements hérités des acquisitions — atteint $186 millions en 2023, contre $27 millions il y a dix ans. La marge nette atteint 38%, contre 25% il y a cinq ans.

Au contraire de Constellation, Descartes n'hésite pas à réaliser des augmentations de capital lorsque les circonstances s'y prêtent. On en compte deux sur la décennie passée, pour un total de $380 millions, avec un nombre d'actions en circulation qui augmente d'un quart. 

Pas d'augmentation de l'endettement en revanche : les $534 millions levés en dette au fil de la période ont été religieusement repayés au dollar près, ce qui n'a entravé en rien la rentabilité des capitaux propres démentielle.

Au niveau de la création de valeur, et sans manquer de souligner toute l'imperfection d'une estimation de ce type, le milliard investi dans la croissance externe a généré un ROI moyen entre 15% et 20%, soit une performance un brin inférieure à Constellation, mais néanmoins remarquable.

Le free cash-flow par action croît d'ailleurs à un rythme annualisé comparable :

2013 : $0.4
2014 : $0.7
2015 : $0.6
2016 : $0.7
2017 : $0.9
2018 : $0.9
2019 : $0.9
2020 : $1.2
2021 : $1.5
2022 : $2
2023 : $2.2

A USD $76 le titre, la valorisation du moment reste donc — en apparence — plantureuse, à près de x35 le dernier profit cash. Considérons toutefois que le rythme de croissance annualisé du free cash-flow par action se maintiendra au même rythme sur la prochaine décennie. On obtiendrait alors :

2024 : $2.6
2025 : $3
2026 : $3.6
2027 : $4.2
2028 : $5
2029 : $5.9
2030 : $7
2031 : $8.2
2032 : $9.7
2033 : $11.5

Dans ce scénario, l'action Descartes cote actuellement à x15 le profit qu'on serait en mesure d'espérer — toutes choses égales par ailleurs ! — d'ici cinq ans.

Projetons maintenant un free cash-flow par action avec un rythme de croissance annualisé qui ralentirait nettement, et descendrait par exemple à une moyenne de 10%. On obtiendrait alors :

2024 : $2.4
2025 : $2.7
2026 : $2.9
2027 : $3.2
2028 : $3.5
2029 : $3.9
2030 : $4.3
2031 : $4.7
2032 : $5.2
2033 : $5.7

Chacun pourra naturellement ajuster les hypothèses de ce modèle sommaire comme il l'entend, en fonction de son appétence au risque et de sa compréhension de l'activité du groupe.