(Actualisé avec réaction de la Maison Blanche)

par Tulay Karadeniz et Jonathon Burch

ISTANBUL, 30 novembre (Reuters) - La Turquie a annoncé mercredi une série de sanctions contre la Syrie, imitant la Ligue arabe et les puissances occidentales, pour protester contre la répression des manifestations antigouvernementales.

La Turquie va ainsi suspendre sa coopération stratégique avec Damas et bloquer toute livraison d'armes à la Syrie. Elle n'exclut pas de prendre de nouvelles mesures à l'avenir, a expliqué le ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu.

Les avoirs syriens en Turquie seront gelés, de même que les relations avec la banque centrale de Syrie et les crédits turcs destinés à la Syrie sont interrompus, a-t-il dit.

"Tant qu'un gouvernement légitime, en paix avec la population du pays, ne sera pas en place en Syrie, le mécanisme de la coopération stratégique de haut niveau sera suspendu", a dit le ministre, jugeant que le régime syrien était "dans une impasse".

Le chef de la diplomatie turque a précisé qu'Ankara avait évité avec un "soin méticuleux" d'infliger des sanctions susceptibles d'affecter le peuple syrien.

La Turquie a été "extrêmement prudente", a dit le président Abdullah Gül. "Les besoins vitaux, comme l'eau et l'électricité, ne seront absolument pas inclus dans ces mesures", a-t-il souligné.

Les échanges entre les deux pays ont représenté 2,5 milliards de dollars l'an dernier (1,9 milliard d'euros). Leur frontière commune fait 900 kilomètres de long.

Les Etats-Unis ont salué la démarche turque et ont appelé d'autres gouvernements à suivre leur exemple.

"Le rôle moteur joué par la Turquie en réponse à la brutalité et à la violation des droits fondamentaux des Syriens (...) enverra un message fort à (Bachar al) Assad et à ses proches, à savoir que leurs actes sont inacceptables et ne seront pas tolérés", déclare dans un communiqué le porte-parole du Conseil de sécurité national de la Maison blanche, Tommy Vietor.

DESERTEURS

La Turquie était il y a peu un proche allié de la Syrie et son Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, entretenait une relation étroite avec le président Bachar al Assad.

Mais le président syrien est resté sourd aux appels à la retenue formulés par Ankara et la répression du mouvement de contestation s'est intensifiée au fil des mois, jusqu'à ce qu'Erdogan l'appelle à quitter le pouvoir.

La Turquie accueille désormais des déserteurs de l'armée syrienne et le principal mouvement d'opposition.

"Nous souhaitons au peuple syrien de réussir dans cette lutte légitime", a ajouté Davutoglu.

Les sanctions turques font suite à celles annoncées dimanche par la Ligue arabe à l'encontre de la Syrie. Ahmet Davutoglu s'était rendu en personne à une rencontre des ministres des Affaires étrangères de l'organisation panarabe, le week-end dernier au Caire.

le raffineur turc Tupras a d'ores et déjà mis un terme à un contrat d'achat avec la compagnie nationale des pétroles syrien Sytrol, écrit mercredi le journal turc Haberturk, citant le PDG de Tupras, Yavuz Erkut.

Le contrat, qui était en vigueur depuis 1995, a été rompu au début du mois de novembre, précise le journal.

Par ailleurs, toutes les compagnies aériennes des Emirats arabes unis suspendront la semaine prochaine leurs liaisons avec la Syrie, a annoncé le gouvernement de Dubaï sur Twitter. La compagnie de Dubaï, Emirates, et celle d'Abou Dhabi, Etihad, sont parmi les plus importantes de la région.

Les liaisons de Turkish Airlines avec Damas ne seront pas interrompues, a précisé Ankara. (Avec Joseph Logan à Dubaï, Eric Faye, Clément Guillou et Chine Labbé pour le service français, édité par Gilles Trequesser)