Paris (awp/afp) - L'heure reste au régime strict pour Unibail-Rodamco-Westfield (URW), géant mondial des centres commerciaux: le groupe, qui digère toujours l'intégration massive de Westfield, multiplie les cessions et réduit nettement ses ambitions en matière de projets.

"On est en avance (...) en matière de cessions d'actifs", a résumé le directeur général pour l'Europe du groupe, Michel Dessolain, lors d'une conférence téléphonique de présentation des résultats 2019.

Ces derniers sont meilleurs que prévu. Le bénéfice récurrent, indicateur de référence des foncières, a progressé de 9,3% à 1,76 milliard d'euros, au-dessus des attentes des analystes, et le chiffre d'affaires a pris plus de 15% à 2,49 milliards.

Mais le groupe est prudent pour 2020. Indicateur le plus représentatif de ses performances, le bénéfice ajusté par action devrait tomber entre 12,10 et 12,30 euros, après avoir déjà reculé de 4,3% à 12,37 euros l'an dernier.

Ces reculs s'expliquent largement par les cessions évoquées par M. Dessolain. Le groupe s'est fixé un régime drastique - 6 milliards d'euros de cessions au total - pour équilibrer son patrimoine à la suite d'une opération majeure, l'intégration en 2018 de Westfield, gros propriétaire de centres commerciaux aux États-Unis et au Royaume-Uni.

Cette opération, qui a d'ailleurs largement contribué à la hausse du bénéfice l'an dernier, a fait gonfler d'une vingtaine de milliards d'euros le patrimoine d'URW, seule foncière du CAC 40 et propriétaire entre autres du Forum des Halles à Paris.

Mais elle a été mal accueillie en Bourse, où le titre a perdu un tiers de sa valeur depuis deux ans, contraignant URW à engager de grosses cessions qui le privent d'autant de loyers potentiels.

En 2019, il avait déjà annoncé la vente d'une tour de bureaux -une activité minoritaire pour lui- à la Défense pour plusieurs centaines de millions d'euros. Jeudi, il a fait part d'une accélération avec la cession d'une part majoritaire dans un portefeuille de cinq centres commerciaux français à une filiale du Crédit Agricole et au gestionnaire d'actifs La Française.

Parmi ces centres, dont URW conservera la gestion, figure celui d'Aeroville près de l'aéroport parisien de Roissy, où la fréquentation est depuis des années nettement en deçà de ses ambitions initiales.

Morosité au Royaume-Uni

L'accélération des cessions, qui représentent désormais près de cinq milliards d'euros depuis le rachat de Westfield, devrait théoriquement être compensée par le programme d'investissements du groupe, gage d'ouvertures ou d'extensions de futurs sites.

Mais sur ce plan, URW réduit franchement ses ambitions. Voilà un an, il avait en vue plus de 11 milliards d'euros d'investissements. Désormais, ce ne sont plus que 8,3 milliards.

"Un certain nombre de projets (...) ont connu des vicissitudes administratives", a admis M. Dessolain, faisant notamment référence au projet Val Tolosa qui se heurte, vers Toulouse, à des oppositions locales et plusieurs décisions de justice.

Surtout, "d'autres projets n'avaient pas les critères de rentabilité souhaités par le groupe et (sont) donc sortis du pipeline de développement", a-t-il admis, rapportant que certains d'entre eux seraient revus en profondeur.

A ce titre, il a évoqué, sans l'identifier, un projet de centre abandonné en l'état mais qui pourrait être relancé en ne conservant qu'une partie commerciale "très minoritaire".

Le groupe fait face, comme le reste du secteur, à un contexte difficile pour les commerces physiques confrontés en particulier à l'essor du commerce en ligne, même s'il souligne la hausse générale de la fréquentation de ses centres.

Les performances d'URW, qui mise sur de nombreuses animations dans ses centres, restent, de fait, bonnes dans la majeure partie des pays où il est présent, comme la France, l'Europe centrale, ou l'Espagne.

Mais "au Royaume-Uni, l'année est plus contrastée", a reconnu M. Dessolain.

URW a mis un pied dans ce pays avec son rachat de Westfield. Mais le niveau des loyers perçus par le groupe y a nettement baissé, au moment où les grands magasins britanniques sont plus largement dans une période noire.

"Nous avons engagé de solides efforts qui commencent à porter leurs fruits", a promis M. Dessolain.

afp/ck