Evacuons rapidement le suspense : Alan Spence, Seth Rosenfeld, Martin Englert et Tristan Gresser, les analystes de Jefferies qui ont réalisé l'étude, ont une préférence pour Tenaris (achat, objectif 18 EUR) sur Vallourec (conserver, objectif 5 EUR) pour les raisons que nous allons détailler. Mais faisons d'abord un état des lieux du secteur.

Sur la dernière décennie, détenir des titres corrélés au pétrole était au mieux parfaitement déprimant, au pire ruineux. Le plongeon des cours de l'or noir, s'il a été à peu près digéré par les majors pétrolières, a fait sombrer toutes les entreprises de services à l'industrie, notamment celles que les investisseurs français connaissent bien, comme TechnipFMC, CGG et Vallourec. Dans l'étude du jour, Jefferies oriente davantage son approche sur le statut d'aciéristes des deux entreprises que sur celui de service à l'industrie pétrolière.

Tenaris vs. Vallourec en deux lignes

"Nous voyons en Tenaris un acteur de qualité, qui offre des marges supérieures à la moyenne à travers le cycle, une génération de cash-flow libre améliorée, un bilan portant peu de risque et un retour à l'actionnaire intéressant avec un levier potentiel en 2019 via un dividende exceptionnel", résume la banque britannique, qui aime vraiment ce titre.

"Vallourec est sorti d'une période de restructuration durant laquelle la société a réduit son exposition opérationnelle à l'Europe pour mieux la diversifier. Même si Vallourec est davantage corrélé à la reprise de la demande du secteur pétrolier et gazier, nous n'anticipons que peu de free cash-flow d'ici 2020, ce qui entraîne un bilan assez lourd et une politique de rémunération des actionnaires en pause", estiment les analystes de Jefferies.

OCTG, à la niche

Le marché des tubes en acier pour le secteur pétrolier, qui répond au doux nom d'OCTG (oil country tubular goods, pour "matériel tubulaire destiné aux pays pétroliers"), est un marché de niche mais un segment important de l'acier au carbone. A eux seuls, les Etats-Unis représentent 40% de la demande. La part de marché de Tenaris sur ce segment y est de 19%, celle de Vallourec de 8%, selon le bureau d'études. Les barrières douanières érigées par Donald Trump ne devraient pas pénaliser outre mesure les deux acteurs car ils devraient bénéficier de prix en hausse, surtout depuis que des accords bilatéraux entraînant des quotas d'importation ont été signés avec la Corée du Sud, le Brésil et l'Argentine. Vallourec, qui produit beaucoup localement, est un bénéficiaire de la mesure, même si sa production brésilienne sera affectée par les taxes. Tenaris est un peu moins bien loti du fait de l'approvisionnement de son site de Bay City par le Mexique, mais il y a des perspectives de nouveaux accords dans l'air dans la région, ce qui pourrait profiter à l'Italo-Argentin.
 

Les débouchés de la production de Tenaris (à gauche) et de Vallourec (à droite) - Cliquer pour agrandir

Le scénario de base de Jefferies sur Vallourec :
• Hausse modérée et graduelle du nombre de puits forés à moyen terme
• Demande globale OCTG positive pour les prix
• Poursuite de la croissance des livraisons sur le moyen terme avec levier opérationnel associé
• Reprise de la demande au Brésil, quoiqu'à un rythme modéré
• Objectif de cours 5 EUR correspondant à 9,4 fois le ratio EV/EBITDA 2019 vs. 7 fois historiquement

En bonus, le scénario "ciel bleu" :
• Demande pétrolière en hausse plus marquée
• Croissance globale plus forte qu'attendu, inflation sur les matières premières et vive hausse des prix OCTG
• Les barrières douanières américaines sont efficaces et dissuasives pour l'import
• Objectif de cours 8,50 EUR correspondant à 10,3 fois le ratio EV/EBITDA 2019

PS : le scénario catastrophe valorise Vallourec 1,75 EUR l'action.