(Actualisé avec communiqué de l'Elysée, déclarations)

par John Irish

PARIS, 26 janvier (Reuters) - Des représentants russes, ukrainiens, allemands et français, réunis mercredi à Paris en "format Normandie" pour la première fois depuis plus de six mois, ont réaffirmé que les accords de Minsk étaient à la base de leur travail, alors que les tensions entre Moscou et Kiev font craindre une escalade militaire.

Dans une déclaration commune diffusée par l'Elysée, à l'issue de plus de huit heures de discussions, ils disent soutenir un "respect inconditionnel" du cessez-le-feu et une pleine adhésion aux mesures de renforcement du cessez-le-feu de juillet 2020.

Les représentants des quatre pays sont convenus de se réunir de nouveau, dans deux semaines, dans la capitale allemande Berlin, est-il indiqué.

Kiev accuse Moscou de chercher à semer la panique avec l'envoi en cours d'unités d'artillerie et de parachutistes en prévision d'exercices militaires en Biélorussie, à la frontière Nord de l'Ukraine, qui s'ajoute au déploiement de dizaines de milliers de soldats ces derniers mois le long de la frontière orientale du pays.

Des manoeuvres d'artillerie se sont également déroulées dans la journée dans la région de Rostov, dans le sud de la Russe, a indiqué le ministère russe de la Défense.

La Russie a déjà annexé la péninsule de Crimée en 2014 et elle fournit depuis huit ans un soutien militaire et politique aux séparatistes de la région du Donbass.

Aucune des menaces de rétorsion ou de sanctions brandies par les pays occidentaux n'ont jusqu'à présent convaincu la Russie d'alléger son dispositif militaire aux frontières de l'Ukraine, Moscou exigeant au préalable des garanties pour sa sécurité, en particulier la fin de l'expansion de l'Otan vers l'Est.

JUGER DU SÉRIEUX DES RUSSES

Après des pourparlers infructueux entre les chefs de la diplomatie russe et américaine à Genève, la France tente de relancer les réunions en "format Normandie" à l'origine du "protocole de Minsk" signé en 2014, qui était censé ramener la paix dans l'Est de l'Ukraine, même s'il est resté très largement lettre morte.

S'exprimant à l'issue de la réunion de mercredi, l'émissaire russe pour l'Ukraine a reproché à Kiev de n'avoir pas répondu, dans un sens ou dans l'autre, aux propositions formulées par les séparatistes soutenus par la Russie.

Dimitri Kozak a déclaré que les discussions avaient permis quasiment "zéro progrès", disant espérer que le prochain cycle de pourparlers à Berlin permette de réduire les divergences.

Le directeur de cabinet du président ukrainien Volodimir Zelenski, Andreï Yermak, a jugé positif que les parties prenantes affichent leur volonté de travailler vers une résolution des différends.

Pour les Européens, les rencontres en "format Normandie" sont un moyen de maintenir une forme de dialogue avec Moscou sans s'aligner totalement sur les Etats-Unis et l'Otan. Mais leur marge de manoeuvre est limitée, la Russie ayant indiqué à plusieurs reprises qu'elle n'entendait négocier une nouvelle architecture de sécurité en Europe qu'avec les Etats-Unis.

Paris espère néanmoins pousser en avant quelques initiatives susceptibles de faire baisser la tension. Une source à l'Elysée a évoqué des discussions sur un calendrier prévoyant la mise en place de mesures humanitaires avant d'éventuelles négociations politiques sur le statut du Donbass, tout en reconnaissant que la réunion de ce mercredi permettrait surtout de juger de la volonté des Russes de négocier.

"Soit le président Poutine décide de jouer la tension maximale sur tous les dossiers avec nous, auquel cas il sera très difficile de progresser dans le groupe Normandie, soit il juge que dans le contexte actuel de très haute volatilité, il est utile d'amorcer quelque part une forme de désescalade", a souligné la source en amont de la réunion. (Reportage John Irish, avec Michel Rose; version française Tangi Salaün, édité par Jean-Stéphane Brosse et Jean Terzian)