Voici plusieurs mois déjà que le prix du baril de pétrole plonge, perdant désormais près de 30% depuis l'été et venant d'enchaîner sept semaines consécutives de baisse, observe Jean-Gabriel Attali, stratégiste Cross Asset chez Kepler Cheuvreux - Investment Solutions. Ce mouvement surprend la plupart des investisseurs qui ont du mal à le justifier.

C'est pourquoi révèle le spécialiste, on commence à voir émerger certaines hypothèses complotistes impliquant l'Arabie Saoudite et les Etats-Unis tantôt comme adversaires, les producteurs saoudiens étant censés faire baisser les prix pour affaiblir les producteurs de pétrole de schiste américain dont les coûts sont plus élevés et qui supporteraient moins facilement une baisse des prix, tantôt comme alliés objectifs pour affaiblir la Russie qui tire la moitié de ses revenus de l'exportation de matières premières.

Il est vrai que, d'une part, les producteurs américains ont besoin d'un prix supérieur à 80 dollars le baril pour être rentables et que d'autre part, les difficultés de la Russie devraient s'accroître encore dans les semaines à venir, mais il est bien difficile d'avoir une opinion tranchée sur ces sujets, d'autant plus que les deux visions sont contradictoires au sujet du rôle des Etats-Unis.

En revanche, il apparaît utile à Kepler Cheuvreux - Investment Solutions de rappeler que certains des éléments qui influencent structurellement le pétrole peuvent expliquer le mouvement. D'abord, l'IEA (International Energy Agency) vient de revoir à la baisse la demande pour l'année 2015. Or, l'offre est pléthorique grâce à la production de pétrole non conventionnel et augmente plus vite qu'anticipée. Ainsi, les Etats-Unis viennent de devenir le premier producteur mondial, soit deux ans avant la date initialement prévue par l'EIA (US Energy Information Administration).

Ensuite, le prix du baril est inversement corrélé au dollar qui s'est lui-même apprécié de 10% depuis l'été, ce qui explique une bonne partie de la baisse. D'ailleurs, ces deux mouvements ont été conjoints.

Enfin poursuit le stratégiste, le pétrole s'est amplement financiarisé au cours des dernières années. Or, cet actif étant vu par les investisseurs comme l'un des plus risqués, il est donc pénalisé très fortement dans les phases de hausse de volatilité des marchés, et celle-ci a été spectaculaire au cours du mois d'octobre, le VIX passant même la barre symbolique des 30 en octobre, niveau qu'il n'avait plus atteint depuis la fin 2011 et la crise de la zone euro.

Dans ce cadre, Jean-Gabriel Attali estime qu'avec la baisse de la volatilité, les derniers chiffres meilleurs que prévus de la croissance en Europe et la perte d'intensité du trend haussier pour le dollar, qui ne peut maintenir un tel rythme d'appréciation très longtemps, le prix du Brent devrait commencer à se stabiliser autour des cours actuels avant de rebondir dans les mois à venir.