Zurich (awp) - La justice française travaille toujours sur les agissements de Lafarge en Syrie et un dénouement dans ce dossier n'est pas en vue. La maison-mère Lafargeholcim a quant à elle effectué les provisions financières nécessaires pour faire face à cette affaire.

"L'information judiciaire est toujours en cours, il n'y a pas encore de date de procès", a indiqué à AWP une source judiciaire parisienne.

Lafarge SA a été mise en examen fin juin 2018 pour "complicité de crimes contre l'humanité", "financement d'une entreprise terroriste" et "mise en danger de la vie" des anciens salariés de l'usine de Jalabiya.

L'enquête concerne les activités de Lafarge SA, holding et actionnaire majoritaire de la filiale syrienne Lafarge Cement Syria (LCS), dans son usine syrienne de Jalabiya, au nord du pays, entre 2011 et 2014.

Le groupe français, qui a fusionné en 2015 avec le st-gallois Holcim pour former Lafargeholcim, est soupçonné d'avoir versé au total via sa filiale LCS près de 13 millions d'euros entre 2011 et 2015 afin de maintenir son usine de Jalabiya, alors que le pays s'enfonçait dans la guerre.

Ces sommes, qui ont bénéficié en partie à des groupes armés dont l'organisation djihadiste Etat islamique (EI), correspondaient au versement d'"une taxe" pour la libre circulation des salariés et des marchandises, et à des achats de matières premières dont du pétrole à des fournisseurs proches de l'EI, d'après l'enquête.

Lafarge SA, qui a décidé de faire appel, est soumis à un contrôle judiciaire comprenant une caution de 30 millions d'euros (33,8 millions de francs suisses au cours actuel).

L'entreprise admet que le système de supervision de la filiale syrienne n'a pas permis "d'identifier les manquements survenus" et insiste que les violations "sans précédent" des règlements internes sont le fruit de "quelques personnes qui ont quitté le groupe". Le groupe assuré qu'il continuerait à "pleinement coopérer" avec les autorités.

Provisions de 35 millions

Huit anciens cadres ou dirigeants, dont l'ex-PDG Bruno Lafont, ont été mis en examen pour "financement d'une entreprise terroriste" et/ou "mise en danger de la vie" de salariés.

L'ancien directeur général de Lafargeholcim, Eric Olsen, qui avait démissionné en avril 2017 suite à l'affaire syrienne, a quant à lui obtenu en mars 2019 la levée de sa mise en examen pour "financement d'une entreprise terroriste". Il reste mis en examen pour "mise en danger de la vie d'autrui".

Dans son rapport annuel 2018, Lafargeholcim estime que les charges retenues à son encontre "ne représentent pas correctement la responsabilité de Lafarge SA". Le groupe a néanmoins effectué une provision de 35 millions de francs suisses et ne s'attend pas à ce que ce dossier provoque d'autres coûts financiers importants.

al/rp