Christine Lejoux,

Agefi-Dow Jones

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Après leur envolée des trois dernières années, les acquisitions d'entreprises américaines par des groupes chinois devraient poursuivre leur plongeon entamé au début 2017. Le CFIUS (Committee on Foreign Investment) américain a bloqué mercredi la vente de Lattice Semiconductor (>> Lattice Semiconductor Corp) à un consortium de fonds d'investissement chinois emmené par Canyon Bridge, qui avait conclu un accord pour racheter le groupe américain de semi-conducteurs au prix de 1,3 milliard de dollars.

"Le risque que cette transaction fait peser sur la sécurité nationale tient, entre autres, au transfert éventuel de propriété intellectuelle à un acquéreur étranger, au soutien apporté par le gouvernement chinois à cette opération, à l'importance que revêt la filière des semi-conducteurs pour le gouvernement américain et à l'utilisation, par celui-ci, des produits fabriqués par Lattice", a expliqué le CFIUS dans son communiqué.

C'est précisément en raison "d'une surveillance réglementaire accrue" que les rachats de sociétés américaines par des firmes chinoises se sont effondrés de 65% sur les sept premiers mois de l'année, après avoir culminé à 65,2 milliards de dollars l'an dernier, souligne le cabinet Dealogic dans une étude. L'administration Trump et ses velléités protectionnistes comptent pour beaucoup dans ce déclin, "le CFIUS étant devenu un facteur plus important (qu'auparavant) dans la réussite ou l'échec de fusions-acquisitions transfrontalières", observe Dealogic.

Près de 10 mds de dollars de M&A dans la ligne de mire des régulateurs

Mais les autorités chinoises ont aussi leur part de responsabilité dans la chute des M&A (mergers and acquisitions) sino-américaines. Afin de limiter les sorties de capitaux de la Chine et d'enrayer la baisse du yuan face au dollar, Pékin avait pris fin 2016 des mesures contre les rachats d'entreprises étrangères par des sociétés chinoises. Parmi ces initiatives figure la suspension des acquisitions à l'étranger supérieures à 1 milliard de dollars et ne correspondant pas au coeur de métier de l'acheteur. Le chinois Wanda a ainsi dû renoncer cette année à acquérir la société américaine Dick Clark-Productions (DKC), une transaction à 1 milliard de dollars.

Plusieurs autres opérations pourraient subir le même sort. Selon Dealogic, un total de 9,7 milliards de dollars de transactions risquent de se trouver dans la ligne de mire des autorités chinoises ou du CFIUS américain, et, donc, de ne pas aboutir. Cette liste comprend le projet de rachat du spécialiste américain du transfert d'argent Moneygram (>> Moneygram International Inc) par Ant Financial, la filiale financière du groupe chinois de commerce électronique Alibaba (>> Alibaba Group Holding), pour 2,1 milliards de dollars.

Autre transaction susceptible d'échouer : le processus d'acquisition en cours de l'américain Integrated Silicon Solution par le chinois Giga Device Semiconductor, pour 946 millions de dollars. Avec comme dommage collatéral les "fees" que les banques d'affaires mandatées sur ces opérations ne perçoivent qu'en cas de succès. Environ 75 millions de dollars de commissions pourraient ainsi leur échapper, selon Dealogic.

-Christine Lejoux, Agefi-Dow Jones ; 33 (0)1 41 27 48 14 ; clejoux@agefi.fr ed : ECH