Londres (awp/afp) - Pour réussir sa tentative audacieuse de rachat du London Stock Exchange, la Bourse de Hong Kong va devoir au minimum proposer plus d'espèces sonnantes et trébuchantes aux actionnaires, estiment plusieurs d'entre eux.

"Le conseil d'administration du LSE a donné une très grande liste de raisons pour lesquelles il n'est pas intéressé" par la demande en mariage de la Bourse de Hong Kong, et "l'une d'elle est le prix", déclare à l'AFP Iacopo Dalu, au sein du fonds d'investissement Janus Henderson, actionnaire du LSE.

Le fonds Jupiter Financial Innovation, également actionnaire, n'a pour l'instant pas fermé la porte à la proposition de Hong Kong Stock Exchange, mais juge aussi le prix peu convaincant.

"Je pense que le marché est déçu de la proportion cash", estime Guy de Blonay, gérant du fonds Jupiter Financial Innovation, interrogé par l'AFP. "Leur seule solution, c'est d'améliorer leur offre".

Le Hong Kong Exchanges and Clearing (HKEX) a dévoilé la semaine dernière une proposition de rachat de sa rivale londonienne pour près de 32 milliards de livres dette comprise (environ 36 milliards d'euros), en cash et nouvelles actions.

La Bourse de Londres a opposé une fin de non recevoir, faisant état de "problèmes fondamentaux" dans l'offre et rappelant qu'elle était déjà engagée dans l'acquisition de Refinitiv, société de technologies de marchés nord-américaine.

Le HKEX a répliqué qu'il pourrait contourner la direction du LSE et courtiser directement les actionnaires (dont le fonds Blackrock, Artisan, Vanguard, l'assureur Aviva), signe que sa tentative de rachat pourrait tourner à l'OPA hostile.

Le fonds de pension du Qatar, plus gros investisseur extérieur de LSE avec 10%, n'a pas immédiatement répondu aux demandes de l'AFP. Le fonds Lindsell Train, qui en détient près de 7%, n'a pas souhaité faire de commentaire sur l'opération.

Actif stratégique

Outre le prix proposé, les actionnaires sont dans l'ensemble favorables à l'acquisition de Refinitiv, une opération bien avancée, que la proposition de Hong Kong implique d'abandonner.

"Refinitiv est une opportunité pour LSE de s'établir dans l'information (financière) ou l'analyse des données, un métier avec une grande croissance potentielle", or "j'imagine que le HKEX ne peut se permettre d'acquérir LSE avec Refinitiv", fait valoir M. de Blonay.

D'après lui, les actionnaires du LSE dans leur ensemble préfèreront boucler ce rachat plutôt que de se lancer dans une opération plus hypothétique avec HKEX.

Le lien de la Bourse de Hong Kong avec le gouvernement local chinois est une autre difficulté, notamment du fait des manifestations anti-gouvernementales émaillées d'affrontements avec la police qui durent depuis des mois dans l'ancienne colonie britannique.

Les autorités britanniques pourraient aussi voir d'un mauvais oeil que cet actif stratégique tombe dans le giron de la Chine.

Le régulateur britannique des marchés, la FCA, et le gouvernement britannique sont en contact avec les deux parties, selon des sources proches du dossier.

En tout état de cause, la Bourse de Hong Kong a jusqu'au 9 octobre, selon la réglementation britannique, pour confirmer son offre, et entretemps négocier avec le conseil d'administration du LSE ou séduire ses actionnaires.

Le LSE et le HKEX, tous deux joints par l'AFP, se sont refusé à tout commentaire pour le moment.

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