par Ben Hirschler et Toni Clarke

Il semblerait ainsi que les géants du secteur sont d'avis qu'investir dans ce domaine peut être un bon moyen d'accroître les marges, de compléter l'offre de produits et de compenser au moins en partie l'impact de la concurrence des génériques.

Pfizer et GlaxoSmithKline ont déjà tenté l'aventure mais l'offre de Sanofi sur Genzyme - qui pourrait tourner autour de 14,3 milliards d'euros - serait de loin la plus poussée.

Genzyme est le leader mondial des traitements des maladies rares. Il a réalisé en 2009 un chiffre d'affaires de l'ordre de 4,5 milliards de dollars, tirés de médicaments traitant les troubles héréditaires rares comme les maladies de Gaucher et de Fabry.

"Genzyme a démontré à tous que le marché des maladies rares peut être parfaitement rentable", dit Gary Pisano, professeur de la Harvard Business School et spécialiste des biotechnologiques.

Ces médicaments pour les maladies rares, que l'on appelle "orphelines", peuvent atteindre des prix astronomiques et ne sont pourtant que rarement rejetés par les compagnies d'assurance. Le Cerezyme, médicament vedette traitant la maladie de Gaucher mis au point par Genzyme, représente un coût de traitement annuel de plus de 200.000 dollars.

C'est l'un des médicaments les plus chers au monde et il a représenté l'an passé un chiffre d'affaires de 1,2 milliard de dollars.

NOUVELLES PERSPECTIVES

Ce sont de nouvelles perspectives qui s'ouvrent pour des grands groupes pharmaceutiques qui n'ont eux-mêmes, le plus souvent, que peu à proposer en termes de médicaments expérimentaux.

"L'époque des 'blockbusters' semble révolue", constate Kevin Gorman (Putnam Associates). "C'est dans les maladies rares qu'il faut chercher les besoins de loin les plus pressants."

Les maladies de Gaucher et de Fabry se caractérisent par un déficit enzymatique qui peut causer des dommages irréparables voire létaux aux organes. Traiter de telles maladies n'est pas à la portée de tous les laboratoires et même les grands groupes pharmaceutiques ne sont pas équipés pour partir de zéro dans ce domaine.

Concevoir, dans ce domaine des maladies rares, des essais cliniques, maîtriser des procédés de fabrication très complexes et enfin commercialiser des médicaments dans des marchés extrêmement ciblés, tout cela requiert un savoir-faire particulier que Genzyme maîtrise à la perfection.

Et pourtant, un cas de contamination survenu l'an passé au site Genzyme d'Allston Landing, à Boston, a conduit à une pénurie de deux médicaments importants et entraîné une forte baisse des résultats et à une plongée de l'action.

Sanofi espère tirer parti des déboires de Genzyme pour l'acheter à bon prix. Il propose 69 dollars par action, selon des sources proches du dossier, soit bien moins que les 80 dollars où l'action évoluait avant que les troubles de fabrication ne se produisent fin 2008.

Selon des sources, il est peu probable que Genzyme accepte moins de 80 dollars par action. Ce qui peut s'expliquer par le fait que Genzyme est un actif aussi rare que les maladies qu'il traite.

Il ne risque pas d'être soumis à la concurrence des génériques de sitôt. Il a en outre plus de 20 années d'expérience dans la relation avec les groupes de patients, dans l'organisation des essais cliniques et dans la gestion des remboursements et des questions réglementaires.

PAS FACILES À COPIER

"Les raisons pour lesquelles les grands groupes lorgnent ce segment sont une menace des génériques réduite, des produits qui peuvent être étendus à d'autres domaines et les prix", dit Dominic Valder, analyste d'Evolution Securities.

Traditionnellement, les grands groupes pharmaceutiques se focalisent sur des médicaments prescrits par les médecins généralistes à une large population de patients souffrant de troubles chroniques comme le diabète, la dépression, les ulcères ou encore un taux de cholestérol trop élevé.

Ces médicaments sont élaborés à partir de molécules que les génériquiers peuvent aisément répliquer.

Les médicaments biotechnologiques au contraire se constituent à partir de protéines complexe. Ils sont prescrits par des spécialistes à des patients en petit nombre. Ils ne sont pas faciles à copier.

Quelques poids lourds de la pharmacie tentent donc leur chance mais timidement. Pour Patrick Vallance, patron de la recherche de Glaxo, la stratégie suivie vise à améliorer les rendements de la recherche-développement en se concentrant sur les domaines où les probabilités de réussite sont les plus grandes.

Glaxo a pris une participation dans le japonais JCR Pharmaceuticals et a conclu une alliance avec la société non cotée Prosensa, débouchant sur le lancement d'une étude clinique de Phase III au second semestre et portant sur la myopathie de Duchenne.

Pfizer a acquis les droits internationaux pour un traitement expérimental de la maladie de Gaucher élaboré par Protalix BioTherapeutics qui, s'il était homologué, concurrencerait le Cerezyme de Genzyme.

Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten