* Les télécoms cherchent à vendre une partie de leurs tours

* Des groupes d'infrastructures veulent s'étendre en Europe

* Le partage de réseau permet de réduire les coûts de la 5G

par Douglas Busvine

BARCELONE, 16 novembre (Reuters) - Le lancement de services mobiles de cinquième génération (5G) à travers l'Europe devrait inciter les opérateurs, soucieux de moderniser leurs réseaux sans trop gonfler leurs dépenses, à chercher des partenariats dans les infrastructures, ont déclaré plusieurs dirigeants du secteur à l'occasion d'une conférence organisée à Barcelone.

Malgré le retard de l'Europe sur les Etats-Unis et certaines régions d'Asie en matière de déploiement du très haut débit, certains pays comme la Grande-Bretagne et l'Italie ont déjà procédé à des enchères pour les fréquences 5G - elles sont prévues en France l'an prochain - et les grands opérateurs s'emploient à déployer des câbles en fibre optique et à densifier leurs réseaux pour garantir la rapidité de transmission des données nécessaire au fonctionnement de la 5G.

Ce qu'ils s'efforcent de ne pas faire en revanche, c'est augmenter leurs dépenses d'investissement, ont-ils dit lors de la conférence européenne Morgan Stanley sur les technologies, les médias et les télécoms à Barcelone cette semaine.

Ils se préparent plutôt à céder leurs actifs dans les tours de transmission mobiles ou à nouer des partenariats avec des spécialistes en infrastructures, qui les exploiteraient en échange du versement d'une commission.

Cela permettrait aux opérateurs télécoms d'obtenir des fonds, de gagner du temps en attendant que la 5G génère de nouvelles sources de revenus et de continuer à verser de généreux dividendes à leurs actionnaires.

"La 5G pourrait être le déclencheur (d'une série d'accords)", a déclaré Tobias Martinez Gimeno, directeur général de l'espagnol Cellnex, qui détient déjà des actifs dans des tours télécoms en France, en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas, et qui souhaite entrer sur de nouveaux marchés, notamment en Allemagne.

Deutsche Telekom, premier opérateur télécoms en Allemagne, a regroupé ses actifs néerlandais et autrichiens dans sa division tours, qui exploite 28.000 points relais, et songe à les vendre, a déclaré son président du directoire, Tim Höttges.

Vodafone a pour sa part déjà créé une coentreprise dans les tours en Grande-Bretagne et pourrait accroître le rendement de certains actifs comme les 58.000 pylônes qu'il détient en Europe en les partageant avec ses concurrents ou en cédant une part de ceux-ci à un opérateur, a déclaré son directeur général, Nick Read.

CROISSANCE RÉGULIÈRE

Aux yeux des investisseurs, l'exploitation des tours est intéressante car elle offre une croissance prévisible des revenus en raison de la hausse des volumes de données.

Elle permet aussi aux opérateurs de dégager des revenus supplémentaires alors que leur activité traditionnelle souffre dans des marchés matures en Europe.

De nouveaux acteurs comme Crown Castle, un fonds immobilier américain exploitant 40.000 tours aux Etats-Unis et à Porto Rico, surveillent de près le marché des tours en Europe.

Crown Castle, valorisé en Bourse 46 milliards de dollars (40,3 milliards d'euros), pèse plus lourd qu'Orange, le numéro un en France. Le groupe américain, qui voit un équilibre entre risque et rentabilité en Europe comparé aux marchés émergents, est "très intéressé" par un investissement sur le Vieux Continent, a dit son directeur financier, Daniel Schlanger.

INVESTISSEMENTS STABLES

Les opérateurs télécoms cherchent également à partager leurs infrastructures pour limiter le coût des investissements dans la 5G.

En Allemagne, Telefonica Deutschland a par exemple conclu un accord pour connecter 5.000 de ses stations relais au réseau en fibre optique de Deutsche Telekom, ce qui lui permettra de proposer un service d'accès internet 5G fixe, comme Verizon aux Etats-Unis.

La 5G via un boîtier permet de relier sans fil le domicile d'un utilisateur sur les derniers mètres et coûte moins chère que la pose d'une liaison en fibre optique sous terre.

"Nous avons examiné l'offre de Verizon et c'est faisable", a déclaré le président du directoire de Telefonica Deutschland, Markus Haas, selon lequel un test mené dans la ville de Hambourg a donné des résultats très encourageants.

Interrogé sur ses dépenses en 5G, le patron du troisième opérateur télécoms en Allemagne a dit que celles-ci resteraient stables dans les années à venir.

Le directeur financier d'Orange, Ramon Fernandez, a dit pour sa part que le groupe prévoyait d'investir 7,4 milliards d'euros cette année, en partie pour améliorer le réseau actuel. (avec Mathieu Rosemain et Paul Sandle Claude Chendjou pour le service français, édité par Bertrand Boucey)