Hunyvers a bien délivré depuis son introduction en Bourse. Diriez-vous que le contexte, complexe, a plutôt joué en votre faveur ou en votre défaveur ?

" Plus on nous annonce de mauvaises nouvelles, plus cela joue en notre faveur ! Le véhicule de loisir répond en effet favorablement aux problématiques actuelles : empreinte carbone, sobriété, pouvoir d’achat, vieillissement de la population, prix élevé des résidences secondaires, tourisme de proximité… Concernant les problématiques propres à notre filière à court terme, à savoir une demande qui dépasse une offre de véhicules neufs limitée par les pénuries de châssis, nous avons pu nous appuyer sur nos propres outils informatiques pour piloter finement nos stocks, renforcer les ventes d’occasion, et faire monter en puissance les services, de financement en particulier car la hausse des taux contraint la génération X, montante, à recourir davantage au crédit que les retraités. Cette évolution du mix de chiffre d’affaires en faveur des ventes de VDL d’occasion (+71,5%) et de services (+58,7%), deux activités fortement génératrices de marge, a eu pour conséquence directe l’amélioration de notre taux de marge brute à 21.4%, en progression de 300 points de base."

 

Une trajectoire de croissance interne et externe (source : présentation société, décembre 2022)

Comment voyez-vous évoluer la situation cette année et au-delà ? Dans quelle mesure votre activité est-elle cyclique ?

" Les facteurs inédits de l’exercice passé qui ont perturbé le marché du VDL demeurent en place au premier semestre 2022/2023 : la visibilité est toujours réduite sur les disponibilités de châssis tandis que les tensions inflationnistes persistent, quoiqu’à un rythme moindre. Au-delà de l’exercice en cours, les tendances structurelles décrites plus haut nous permettent de tabler sur une croissance du marché dans les prochaines années, voire décennies. En France, les immatriculations de camping-cars neufs ont progressé à un rythme de 5.5% par an sur la période 2014-2022. Nous ne voyons pas de raison que cette dynamique ralentisse fortement, surtout que le taux d’équipement en France est significativement inférieur à la moyenne européenne et que les français ont redécouvert la beauté de leur pays. Dans ce contexte, forts de notre capacité à jouer sur d’autres tableaux (vente de véhicules d’occasion, multiplication des services…) et de notre approche disruptive, nous comptons croitre organiquement d’au moins 5% d’ici 2025. Sans compter la croissance apportée par notre stratégie de consolidation de notre place de n°2 dans un secteur encore très atomisé… "

A ce propos, Trigano, 1er producteur européen de camping-car, a frappé fort en faisant l’acquisition du n°1 français du secteur en 2021. Comment voyez-vous cet évènement pour la filière française ?

" J’ai commencé l’aventure Hunyvers en 2006 en rachetant, moyennant quelques milliers d’euros d’apport, une concession à Limoges. Ce n’est qu’en 2011 que nous avons enclenché notre politique de croissance externe avec l’arrivée de Delphine Bex. A l’époque, les groupes de concessions se comptaient sur les doigts de la main. Depuis, avec l’essor du marché, la concentration s’est accélérée mais il reste encore 280 acteurs pour 475 points de vente en France. Aujourd’hui, Trigano est loin devant nous et nous sommes juste devant TPL (Narbonne Accessoires). Nous entretenons d’excellentes relations avec Trigano, qui est notre principal fournisseur même si sa part dans nos approvisionnements est inférieure à sa part de marché en France, autour de 35%. Le positionnement de Trigano dans la distribution est géographiquement très différent du nôtre et, quoiqu’il en soit, les pratiques concurrentielles sont encadrées par les autorités.  Nous voyons donc dans cette situation un beau défi à relever : se rapprocher du leader en nous appuyant sur une situation financière solide et des fonctions support centralisées et optimisées au service des points de vente. Les opportunités d’acquisition sont de plus en plus nombreuses et de nouveaux acquéreurs comme les concessions automobiles lorgnent notre secteur. Cela a l’inconvénient de pousser les prix à la hausse mais nous avons de nombreux atouts, à commencer par nos volumes d’achat et notre capacité à déployer nos meilleures pratiques en quelques mois chez les concessionnaires rachetés. Nous visons en premier lieu les zones géographiques proches de nos zones d'influences, mais où nous ne sommes pas encore présents. Nous avons sur l’exercice dernier réalisé trois acquisitions totalisant un chiffre d’affaires de près de 50 M€ en année pleine."

Compte de résultat simplifié des deux derniers exercices de Hunyvers (source : Hunyvers)

Vous évoquez un « Puissant levier opérationnel ». Pourtant, votre marge opérationnelle cible en 2025, 6.5%, a été quasiment atteinte en 2021/22…

" Lors de l’exercice passé, nos marges ont profité d’un effet d’aubaine sur les stocks qui sera difficilement reconduit cette année. De plus, les sociétés acquises vont venir diluer nos marges. Pour autant, rapidement, la mise à niveau des concessions acquises, l’effet volume sur les achats, l’apport de nouveaux services et d’expertises (RH, CRM, systèmes d’information, communication et marketing...) devraient faire levier opérationnel, comme démontré au travers des intégrations réussies des dernières opérations. Nous sommes donc sereins quant à l’atteinte de nos objectifs 2025 présentés lors de l’introduction en Bourse : un chiffre d’affaires supérieur à 170 M€, dont 135 à 140 M€ provenant de la croissance organique, accompagné d’une marge d’exploitation de 6,5%."

Hunyvers est également présent dans la filière de distribution nautique, à travers sa filiale Groupe Nautic. Quelles sont vos ambitions ?

" Les concessions nautiques ressemblent en de nombreux points aux concessions de VDL. De plus, les sous-jacents du secteur du nautisme sont très proches : il s’agit d’équipements et logements de tourisme de plein air. Nous sommes donc entrés dans ce secteur à l’occasion d’une opportunité qui s’est présentée avant et pendant la pandémie de Covid afin d’assurer un relai de croissance à notre activité. Cela représente aujourd’hui seulement 3.5M€ de CA. Nous capitalisons sur notre expérience avant de réaliser d’autres croissances externes avec les mêmes stratégies de synergies que sur le VDL."