(Actualisé avec décision d'annulation de la réunion d'avril)

par Vladimir Soldatkin, Rania El Gamal et Nailia Bagirova

BAKOU, 18 mars (Reuters) - L'Opep a annulé lundi sa réunion ministérielle prévue en avril, attendant celle de juin pour décider s'il y a lieu de prolonger l'encadrement de la production en vigueur depuis le début de l'année.

A cette date, les marchés auront pu évaluer l'impact réel des sanctions américaines contre l'Iran et de la crise du Venezuela.

Une commission ministérielle de l'Opep et de ses alliés a recommandé d'annuler la réunion extraordinaire des 17 et 18 avril, ce qui veut dire que la prochaine rencontre serait celle des 25 et 26 juin.

Khalid al Falih, le ministre de l'Energie saoudien, a déclaré que le marché serait sans doute approvisionné au-delà de ses besoins jusqu'à la fin de l'année mais qu'il serait prématuré de prendre une décision sur la production dès avril.

"Le consensus dont nous avons connaissance (...) est qu'avril sera prématuré pour prendre une décision de production au second semestre", a-t-il déclaré. "Tant que les stocks augmentent et que nous sommes loin des niveaux normaux, nous gardons le cap, guidant le marché vers l'équilibre".

Les Etats-Unis, profitant de l'aubaine des gisements de schistes, ont porté leur production à des niveaux record ces derniers mois, tout en imposant des sanctions à l'Iran et au Venezuela, deux pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).

La politique pétrolière de Washington vient compliquer la tâche de l'Opep qui tente de prévoir l'évolution de l'offre et de la demande mondiales.

"Nous ne subissons aucune pression, exceptée celle du marché", a répondu Khalid al Falih à la presse avant une réunion de la commission ministérielle mixte (JMMC) de l'Opep à Bakou, lorsqu'on lui a demandé s'il subissait des pressions américaines en vue d'augmenter la production.

Le président Donald Trump a critiqué ouvertement l'Opep, l'accusant de chercher à faire monter les cours du brut.

Mais les sanctions décidées par son administration ont été le principal moteur du récent mouvement haussier du pétrole, en retirant du marché plus de deux millions de barils par jour de brut iranien et vénézuélien.

Les cours du Brent ont atteint la semaine dernière un pic de 2019 à plus de 68 dollars le baril. L'Arabie saoudite a besoin d'un baril à 85 dollars pour équilibrer son budget.

L'Opep et ses alliés, regroupés sous l'appellation Opep+, ont convenu en décembre de réduire leur production commune de 1,2 million de barils par jour (bpj), soit 1,2% de la demande mondiale, au premier semestre de cette année pour soutenir les cours.

La JMMC, où siège aussi la Russie, pays non membre de l'Opep mais signataire de l'accord d'encadrement de la production, surveille l'évolution du marché pétrolier, ainsi que la conformité envers la politique de réduction de la production.

Les stocks et l'investissement pétroliers sont les deux principaux éléments à partir desquels l'Opep étaye ses décisions, a expliqué Khalid al Falih, ajoutant que selon les estimations des professionnels, il faudra investir 11.000 milliards de dollars dans les 20 ans à venir pour pouvoir répondre à la croissance de la demande.

"Notre but est de ramener les stocks mondiaux à des niveaux plus normaux et, surtout, d'anticiper un engorgement pour nous en protéger", a dit le ministre.

"Un autre paramètre important est l'investissement: de ce point de vue nous ne voyons rien qui nous rapproche des montants nécessaires."

(Wilfrid Exbrayat et Véronique Tison pour le service français, édité par Marc Angrand)