PARIS (awp/afp) - Condamnés à deux ans de prison ferme et trois ans avec sursis en première instance, l'ancien Premier ministre François Fillon et son épouse Penelope Fillon connaîtront lundi la décision de la cour d'appel de Paris dans l'affaire des soupçons d'emplois fictifs.

Quelques jours après l'élection présidentielle, la justice se prononce une deuxième fois dans le dossier qui avait carbonisé la campagne du candidat de la droite en 2017, un temps favori des sondages mais finalement éliminé au premier tour.

François Fillon, 68 ans, et Penelope Fillon, 66 ans, qui ont toujours protesté de leur innocence, ne seront pas présents au prononcé de la décision à 13h30, pas plus que l'ancien suppléant du premier dans la Sarthe, Marc Joulaud, 54 ans, ont indiqué à l'AFP leurs avocats.

Retiré de la vie politique, M. Fillon a annoncé fin février, face à l'invasion russe en Ukraine, démissionner de ses mandats aux conseils d'administration du géant de la pétrochimie Sibur et de Zarubezhneft, entreprise spécialisée dans les hydrocarbures.

Condamnés en juin 2020 par le tribunal, le couple Fillon et l'ancien suppléant ont à nouveau fait face aux juges en novembre en maintenant la même défense, dans un atmosphère bien moins électrique qu'au premier procès.

En appel, le parquet général a requis cinq ans de prison dont un an ferme sous bracelet électronique, ainsi que 375.000 euros d'amende à l'encontre de François Fillon, pour détournement de fonds publics, complicité et recel d'abus de biens sociaux.

Contre Penelope Fillon, l'accusation a réclamé deux ans de prison avec sursis ainsi que 100.000 euros d'amende et, contre Marc Joulaud, trois ans de prison avec sursis. Des peines d'inéligibilité respectivement de dix, deux et trois ans ont en outre été demandées.

Activités "impalpables"

Un "faisceau d'indices" permet d'établir la "fictivité" des trois emplois de Penelope Fillon comme assistante parlementaire auprès de son mari et de son suppléant entre 1998 et 2013, rémunérés au total 612.000 euros net, a soutenu le ministère public, ironisant sur des activités "impalpables" voire "évanescentes".

Selon l'accusation, l'embauche de Mme Fillon comme "conseillère littéraire" en 2012-2013 au sein de la Revue des deux mondes (RDDM) était un "emploi de pure complaisance" concédé par Marc Ladreit de Lacharrière, propriétaire de la publication et proche de François Fillon.

Les avocats généraux ont, en revanche, demandé une condamnation partielle pour les contrats de collaboration signés par les deux aînés des Fillon auprès de leur père sénateur entre 2005 et 2007, et une relaxe pour la non-déclaration d'un prêt.

A la barre, le couple a une nouvelle fois maintenu que Penelope Fillon réalisait "sur le terrain" dans la Sarthe un travail "immatériel" mais bien "réel".

Stigmatisant un dossier qui "se réduit" comme "peau de chagrin", l'avocat de François Fillon, Me Antonin Lévy, a plaidé la relaxe, citant "41 attestations (établissant) de manière précise et circonstanciée l'apport de Mme Fillon".

"Folie médiatique"

La défense de Penelope Fillon s'est appliquée à camper une femme qui était "épouse" mais aussi "collaboratrice".

Ses avocats ont dénoncé une "folie médiatique" autour du "Penelopegate", affirmant que si elle avait certes été "placardisée" au sein de la Revue des deux mondes, elle y avait bien "travaillé".

Marc Ladreit de Lacharrière, patron de Fimalac, a été condamné dans une procédure de "plaider-coupable" en 2018 pour abus de biens sociaux, reconnaissant un contrat en partie fictif.

En première instance, M. Fillon s'était vu infliger, le 29 juin 2020, cinq ans d'emprisonnement dont deux ferme, 375.000 euros d'amende et dix ans d'inéligibilité. Cette peine, suspendue par l'appel, restait aménageable: il auraît pu éviter la prison.

Sa femme s'était vu infliger trois ans d'emprisonnement avec sursis, 375.000 euros d'amende et deux ans d'inéligibilité et M. Joulaud, trois ans avec sursis, 20.000 euros d'amende avec sursis et cinq ans d'inéligibilité.

Les époux et leur coprévenu avaient en outre été condamnés à rembourser plus de un million d'euros à l'Assemblée nationale.

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