(Actualisé, remise en liberté des universitaires, Erdogan)

ANKARA, 15 janvier (Reuters) - Vingt-sept universitaires turcs ayant signé une déclaration dénonçant les opérations militaires dans le sud-est de la Turquie à majorité kurde ont été entendus vendredi pendant plusieurs heures par les forces de sécurité turques.

Dans la soirée, ils avaient tous été remis en liberté.

La déclaration, publiée lundi et signée par un millier de personnalités dont le philosophe américain Noam Chomsky, réclame notamment la levée du couvre-feu instauré dans des localités du Sud-Est.

"Le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité, et en particulier l'interdiction de la torture et des mauvais traitements garantie par la Constitution et par les conventions internationales ont été violés", affirme-t-elle. "Nous demandons que l'Etat cesse son massacre délibéré".

Selon des médias locaux, la plupart des brèves arrestations de vendredi ont été effectuées dans la province de Kocaeli, proche d'Istanbul.

Plus de 2.000 avocats s'étaient engagés dans la journée à défendre gratuitement les universitaires interpellés.

Une enquête judiciaire a été ouverte jeudi sur la pétition, que le président Recep Tayyip Erdogan et le Premier ministre Ahmet Davutoglu ont dénoncée, y voyant un soutien au terrorisme.

Dans un discours vendredi après la grande prière, le président Erdogan a parlé d'un texte "sombre, infâme et brutal". Ceux qui ne veulent pas faire de la politique au Parlement, a-t-il ajouté, "n'ont qu'à creuser des tranchées ou aller dans la montagne", allusion à la lutte armée que mène le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) contre les forces de sécurité turques.

Le journal Radikal, orienté à gauche, a publié vendredi des photos montrant des croix rouges peintes sur la porte des bureaux de deux universitaires signataires à Ankara, accompagnées de menaces écrites.

Le Parti républicain du peuple (CHP), principale formation de l'opposition, a qualifié les interpellations de "totalement illégales, inacceptables et extrêmement dangereuses". "Nous continuerons à soutenir tous les citoyens qui exercent leur liberté de parole sans appeler à la violence", ajoute le CHP dans un communiqué.

Ankara a déclaré en juillet une "guerre synchronisée" aux djihadistes syriens de l'Etat islamique (EI) et aux séparatistes du PKK. Le cessez-le-feu qui était en vigueur depuis 2012 avec le PKK a volé en éclats et de nombreux affrontements se sont produits depuis dans le Sud-Est.

Un attentat imputé aux séparatistes kurdes a fait six morts dans la nuit de mercredi à jeudi à Cinar, au sud de Diyarbakir, le chef-lieu de la région. (Ece Toksabay, avec Gulsen Solaker et Humeyra Pamuk; Jean-Philippe Lefief et Guy Kerivel pour le service français)