(Répétition sans changement d'une dépêche transmise vendredi)

par Tim Hepher, Valerie Insinna, Joanna Plucinska et Allison Lampert

PARIS, 19 juin (Reuters) - Les acteurs mondiaux de l'aéronautique et de la défense devraient vanter les mérites d'un transport plus propre et des armes robotisées de demain tout en cherchant à remédier aux problèmes urgents de la chaîne d'approvisionnement lors du salon du Bourget qui ouvre ses portes lundi dans un contexte marqué par le conflit ukrainien et les inquiétudes climatiques.

Le Salon international de l'aéronautique et de l'espace de Paris-Le Bourget, organisé tous les deux ans en alternance avec celui de Farnborough, en Angleterre, se déroulera jusqu'au 25 juin sur l'aéroport situé au nord-est de Paris pour la première fois depuis quatre ans et la pandémie de COVID-19 qui avait conduit à l'annulation de l'édition de 2021.

L'édition 2023 est marquée par un contexte de forte demande de nouveaux avions de la part des compagnies aériennes pour répondre à la reprise du trafic aérien et à l'objectif de neutralité carbone du secteur d'ici 2050.

La compagne indienne IndiGo est sur le point de passer une commande record de 500 avions monocouloirs de la famille A320 à Airbus, comme l'a rapporté Reuters début juin. De son côté, Air India pourrait aussi officialiser au salon du Bourget une commande de 470 appareils auprès d'Airbus et de Boeing.

"Environ 3.300 avions n'ont tout simplement pas été produits pendant les années COVID, ce qui représente environ 15% de la flotte mondiale", observe Andy Cronin, qui dirige la société de leasing Avolon.

Certains observateurs estiment que jusqu'à 2.000 commandes pourraient être passées lors du salon du Bourget mais nombre d'entre elles concerneront des contrats existants tandis que certains acheteurs, comme Turkish Airlines, ont exclu toute décision rapide.

"Si cela se produit, nous entrons dans une 'bulle'", estime Sash Tusa, analyste chez Agency Partners.

UN OBJECTIF CLIMATIQUE IRRÉALISTE ?

Réunies il y a quelques jours à Istanbul en Turquie, les compagnies aériennes mondiales ont fait part de leur intérêt pour acheter des avions jusqu'à dix ans à l'avance afin d'être sûres de ne pas se laisser distancer par la forte reprise du trafic aérien post-pandémie.

"C'est un marché de vendeurs comme nous en avons rarement vu", a déclaré une source industrielle de haut niveau, ajoutant que les prix des avions sont en hausse.

Toutefois, le secteur aéronautique pourrait avoir du mal tenir la cadence alors que la pandémie a profondément déréglé les chaînes d'approvisionnement mondiales.

A plus long terme, des questions se posent quant à la capacité de concilier la croissance du trafic aérien avec les objectifs environnementaux.

Le directeur général de l'Association internationale du transport aérien (IATA), Willie Walsh, a assuré que les compagnies aériennes étaient déterminés à atteindre l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050 tout en reconnaissant que cela serait "très difficile".

Pour les militants écologistes, l'objectif fixé est irréaliste en raison de la faible utilisation de carburants dits durables (SAF) dans l'aviation et la seule solution pour l'atteindre repose sur la réduction du trafic mondial.

Le président Emmanuel Macron, qui a annoncé vendredi un investissement de 200 millions d'euros pour développer la production de SAF, se rendra lundi au salon du Bourget.

LE SECTEUR DE LA DÉFENSE EN ALERTE

Si l'aviation commerciale fait les gros titres, le secteur de la défense est pour sa part en état d'alerte avec le conflit ukrainien qui oblige les acteurs européens très fragmentés du secteur à être plus agiles et à détenir plus de stocks pour répondre aux besoins urgents.

Les budgets des gouvernements dédiés à la défense ont explosé depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie l'an dernier, les pays occidentaux apportant un soutien militaire à Kyiv tout en développant leur propre arsenal militaire futur.

Certains experts estiment toutefois difficile de maintenir les budgets à des niveaux suffisamment élevés pour réapprovisionner les munitions tout en développant une nouvelle génération de chasseurs, de drones et d'armes de précision.

"Même avec tous les fonds du budget américain, il n'est tout simplement pas possible de tout faire", estime Justin Bronk, expert au Royal United Services Institute.

"Les nations européennes opèrent toutes à une échelle beaucoup plus petite, avec moins de flottes, et par conséquent, lorsqu'il s'agit de faire des choix difficiles et des arbitrages, ceux-ci sont beaucoup plus binaires". (Reportage Tim Hepher, Valerie Insinna, Joanna Plucinska, Allison Lampert; Blandine Hénault pour la version française)