Pékin (awp/afp) - Paris et Pékin ont signé mardi "un mémorandum pour un accord commercial" sur la construction d'une usine de traitement des combustibles nucléaires usagés, un chantier colossal providentiel pour Areva, ex-fleuron français de l'atome civil.

Ce document, signé dans la capitale chinoise en présence du président Emmanuel Macron et de son homologue Xi Jinping, ouvre la voie à la conclusion de dix ans de délicates négociations entre Areva et son partenaire chinois CNNC, géant étatique de l'atome civil.

"Nous avons l'assurance du contrat avec une échéance: sa signature au printemps", avait assuré plus tôt le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire.

"Cela représente un montant de 10 milliards d'euros immédiats, cela sauvera la filière", s'est félicité le ministre.

De fait, ce chantier massif, qui devrait débuter en 2020 et durer une décennie, est jugé vital pour le nouvel Areva (NewCo) en difficulté, désormais recentré sur la gestion du cycle du combustible.

La future usine franco-chinoise pourrait traiter jusqu'à 800 tonnes de combustibles usés par an, permettant d'en recycler une partie sous forme de "MOX", un mélange de plutonium usagé et d'uranium, selon les technologies développées par Areva sur son site de La Hague (nord-ouest de la France).

Les longues discussions entre Areva et CNNC avaient bloqué l'année passée sur le montant proposé par le Français, jugé beaucoup trop onéreux par la Chine. Mais les pourparlers s'étaient accélérés ces dernières semaines, avec plusieurs déplacements à Pékin de dirigeants d'Areva.

"On travaille activement à quelque chose (...) on est proche d'un accord, on n'a jamais été aussi proche d'un accord commercial" final, selon une source élyséenne.

La valorisation du contrat, point d'achoppement entre Areva et CNNC fait néanmoins l'objet d'âcres discussions, a tempéré la même source.

"Pour débloquer les négociations, nous avons fait un effort sur le prix, à la demande des Chinois", a reconnu Bruno Le Maire, qualifiant les pourparlers "d'extraordinairement difficiles".

- Habitants hostiles -

Une autre source proche du dossier préfère insister sur le fait que le mémorandum dévoilé mardi représente "une étape importante" vers la signature du contrat commercial final, soulignant que "les discussions se poursuivent intensément".

Selon le calendrier initial, le chantier pourrait débuter vers 2020 pour une mise en service vers 2030.

Il s'agira du tout premier site de retraitement en Chine, où la fulgurante expansion du secteur nucléaire soulève la question des déchets radioactifs, pour l'heure stockés dans des piscines temporaires.

La Chine est le premier marché mondial de l'atome civil: le géant asiatique compte actuellement 38 réacteurs en activité ainsi que 20 en construction, soit un tiers des réacteurs en chantier dans le monde, selon la World Nuclear Association, fédération internationale du secteur.

Celle-ci dénombre par ailleurs une quarantaine d'autres réacteurs "en projet" dans le pays.

Des controverses avaient entouré le choix du futur site de retraitement franco-chinois.

Envisagée dans un premier temps, la ville côtière de Lianyungang (est du pays, à 480 km au nord de Shanghai) avait fait marche arrière à l'été 2016 après d'importantes manifestations d'habitants hostiles au projet, inquiets des répercussions environnementales.

En 2015, le rapprochement entre Areva et CNNC avait par ailleurs pris un nouveau tour, lorsque le Français avait un temps ouvert la porte à une entrée du groupe étatique chinoise à son capital.

Toujours dans le nucléaire civil, le réacteur EPR, construit par EDF dans le sud de la Chine, devrait démarrer dans environ six mois, a fait savoir la présidence française. Ce serait le cas échéant le premier EPR opérationnel dans le monde, avant ceux en chantier à Flamanville (France) et en Finlande et qui ont subi de nombreux retards et surcoûts.

afp/rp