A £3.6, le cours de l'action traduit le scepticisme des investisseurs. Divisée par quatre en deux ans, la valorisation boursière d'Aston Martin reflète les espoirs déçus qu'ils plaçaient dans l'iconique marque de "supercars" en pleine euphorie spéculative.

Le parcours opérationnel n'est pourtant pas si mauvais, avec des ventes en croissance — laborieuse, certes — et un cash-burn bien contrôlé. On voit ces mêmes investisseurs autrement plus cléments avec des start-ups technologiques aux Etats-Unis capables de brûler des milliards par trimestre sans rien produire de concret.

Cependant, c'est un drôle de tango à cinq qu'on observe au capital d'Aston Martin. Le canadien Lawrence Stroll, qui s'est juré de redresser le constructeur, possède 21.1% du capital ; viennent ensuite le fonds souverain saoudien et le chinois Geely, à 17.9% et 17.2% ; et l'allemand Mercedes, à 9.4%.

Dernier entré dans la danse : l'américain Lucid, fondé par des anciens de Tesla et lui aussi contrôlé par le fonds saoudien, qui prend 3.7% du capital et fournira des batteries pour les véhicules électriques produits par Aston en lieu et place de Mercedes. Le constructeur allemand continuera de fournir au britannique motorisations et autres équipements.   

Pour l'instant, parmi les cinq c'est le chinois Geely qui se distingue comme l'investisseur le plus astucieux. Outre les 42 millions d'actions qu'il a obtenu du consortium dirigé par Stroll au cours d'une transaction privée, il a reçu 28 millions de nouvelles actions au prix de £3.3, c'est-à-dire pas loin des plus-bas historiques. 

Une nouvelle injection de liquidités apparaît inévitable si le constructeur entend réellement atteindre son ambitieux objectif à deux ans. A ce sujet, il est à craindre que le délicat tango à cinq risque de virer au pugilat d'ici là. 

N'est-ce pas, après tout, le lot des grandes marques du luxe que de se prêter ainsi à de sanguinaires batailles entre actionnaires déterminés à en remporter le contrôle ?