PARIS (awp/afp) - Inflation et hausse des taux pour les acteurs historiques, ralentissement des levées pour les nouveaux entrants et hausse des défauts de paiements pour tout le monde... le marché du crédit à la consommation entre en 2023 dans une zone de turbulences.

Marges comprimées

Le marché des crédits à la consommation en magasin, qu'ils soient renouvelables ou affectés par exemple à l'achat de biens d'équipement du foyer (électroménager, multimédia, meubles...), a déjà lourdement souffert des confinements au cours de la pandémie de Covid-19.

La hausse des prix, mesurée à 5,9% sur un an en décembre par l'Insee, agit désormais comme un étau sur les sociétés spécialisées: elle diminue la capacité de remboursement des emprunteurs et renchérit leur matière première, l'argent, conséquence des hausses de taux de de la Banque centrale européenne (BCE).

A priori très lucratif, le crédit à la consommation reste un marché où les marges sont faibles.

Le taux moyen pratiqué au dernier trimestre 2022 pour les prêts inférieurs à 3.000 euros, 15,78%, étant près de six fois supérieur à celui des crédits immobiliers à 20 ans, selon la Banque de France. Mais les acteurs traditionnels "ont globalement des coûts opérationnels élevés et des modèles de distribution coûteux", expliquent à l'AFP Amine Belaicha et Mark Bennett, du cabinet Alvarez & Marsal.

Problèmes de remboursement

L'association française des sociétés financières (ASF) a indiqué mercredi que ses membres faisaient face à une "augmentation des reports de remboursement et des premiers impayés" sur ce marché par ailleurs en pleine expansion.

Si, d'un côté, l'inflation entraîne un report de certains achats, de l'autre, ceux qui sont maintenus sont plus souvent réglés en plusieurs fois pour des raisons de trésorerie, exposent les analystes d'Alvarez & Marsal.

Avec "un problème de remboursement qui va augmenter de plus en plus aussi", préviennent-ils.

Dès juillet, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) avait indiqué que les mini-crédits et les paiements fractionnés pouvaient "présenter un risque élevé d'endettement mal maîtrisé voire excessif pour les personnes les plus fragiles financièrement".

Réflexions stratégiques

La banque BNP Paribas a indiqué à ses partenaires sociaux peu avant Noël qu'elle travaillait sur un plan de départs volontaires dans sa branche Personal Finance, comprenant notamment la marque Cetelem, selon les syndicats.

Des réflexions sont en cours aussi chez son concurrent Oney, société spécialisée codétenue par la banque BPCE et Auchan.

"Comme beaucoup d'autres acteurs du secteur nous sommes affectés par la conjonction de plusieurs facteurs externes: la forte inflation et l'augmentation des taux de refinancement", explique à l'AFP une porte-parole d'Oney.

"Aux premiers grains de sable dans les rouages de la mécanique de distribution de crédit et de remboursement, les problèmes de rentabilité arrivent très vite", précisent Amine Belaicha et Mark Bennett.

Nouvelle génération

Face à eux, une nouvelle génération d'acteurs: les fintechs spécialisées dans le paiement fractionné, en anglais BNPL (pour buy now pay later, achetez maintenant payez plus tard).

Ils permettent aux consommateurs de régler leurs achats en trois ou quatre fois, parfois sans frais. Le remboursement se faisant dans un délai inférieur à 90 jours, ils ne sont pas soumis à la même réglementation que leurs aînés.

Ces start-up - en France Alma, Younited ou Pledg par exemple - ont cependant besoin d'argent frais pour continuer de croître. Mais la période n'est plus à l'euphorie et les financiers se montrent plus regardants sur les perspectives de rentabilité.

Le champion européen Klarna, basé en Suède, en a fait les frais en juillet dernier. Sa valorisation a fondu de 85% en un an, passant de 45,6 à 6,7 milliards de dollars.

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