(Actualisé avec conclusions du parquet de Milan, réaction de Vivendi)

par Emilio Parodi, Stephen Jewkes et Elvira Pollina

MILAN, 12 décembre (Reuters) - Le parquet de Milan a terminé son enquête sur Vincent Bolloré et Arnaud de Puyfontaine dans l'un des volets de la bataille opposant Vivendi et Mediaset, celui portant sur des accusations de manipulation de marché, a annoncé la police italienne dans un communiqué.

Cette enquête porte sur des soupçons selon lesquels Vincent Bolloré, alors président du conseil de surveillance de Vivendi, et Arnaud de Puyfontaine, président du directoire, ont rompu en 2016 un accord prévoyant la reprise par le groupe français des activités de télévision payante de Mediaset, dans le but de faire baisser le cours de l'action du groupe italien et d'entrer à son capital à moindre coût.

Dans le rapport d'enquête consulté par Reuters, le bureau du procureur écrit que le véritable objectif de cet accord sur la télévision payante était de permettre à Vivendi de se constituer une participation d'au moins 24,99% dans Mediaset.

Il ajoute que trois communiqués publiés en 2016 par Vivendi ont été rédigés de telle manière à convaincre le marché que l'échec de l'opération était dû à une "mauvaise représentation par Mediaset de la situation économique-financière" de son activité de télévision payante.

Le parquet reproche aussi aux deux dirigeants de ne pas avoir informé le marché qu'ils avaient mandaté la banque italienne Mediobanca pour examiner les moyens de constituer une participation au capital de Mediaset.

S'il estime avoir réuni suffisamment d'éléments à charge, le parquet de Milan pourrait demander à un juge le renvoi en procès des deux hommes.

Dans un communiqué, Vivendi affirme que le contenu du rapport du parquet ayant fuité dans les médias a été "déformé". Il rapporte pour sa part que le bureau du procureur de Milan ne fait qu'émettre une hypothèse.

"PLEIN SOUTIEN" À BOLLORÉ ET PUYFONTAINE

Le groupe français "réfute formellement avoir commis la moindre faute" et affirme qu'il "continuera à apporter son plein soutien" à Vincent Bolloré et Arnaud de Puyfontaine.

Il ajoute que les avocats des deux hommes sont prêts à fournir "les éclaircissements nécessaires avant que le bureau du procureur ne prenne la moindre décision, étant convaincus que la décision finale sera un classement sans suite de cette procédure".

Mediaset et Fininvest, la holding de contrôle de la famille Berlusconi, ont pour leur part refusé de s'exprimer. Il n'a pas été possible de joindre Mediobanca dans l'immédiat.

Cette enquête sur Vincent Bolloré et Arnaud de Puyfontaine a été ouverte en 2017 à la suite d'une plainte de Fininvest.

Avant d'investir dans le groupe italien fin 2016, au point d'en devenir rapidement le deuxième actionnaire derrière la famille Berlusconi, Vivendi avait renoncé à racheter ses activités de télévision payante malgré un accord conclu quelques mois plus tôt.

Fininvest avait alors porté plainte contre Vivendi en accusant le groupe contrôlé par Vincent Bolloré de n'avoir jamais eu l'intention d'honorer cet accord mais d'avoir simplement cherché à faire baisser le cours de l'action pour mener son raid boursier.

Dans son communiqué publié samedi, Vivendi "réaffirme avoir acquis sa participation dans Mediaset de manière légale et avoir toujours communiqué de manière transparente aux marchés et aux régulateurs et que ses dirigeants actuels et précédents (...) ont agi dans le plein respect de la loi".

Parmi les autres contentieux entre les deux groupes, Vivendi et Mediaset s'opposent aussi sur la volonté du groupe italien de créer une entité de dimension européenne afin de nouer des alliances dans le domaine des médias.

Le groupe français fait en outre l'objet de critiques en Italie en raison de ses participations à la fois dans Mediaset et dans l'opérateur historique Telecom Italia.

Le gouvernement de Giuseppe Conte a approuvé le mois dernier un texte de loi qui enjoint à l'Autorité de tutelle des communications en Italie (Agcom) de mener une nouvelle enquête sur les entreprises opérant à la fois dans les secteurs des télécommunications et des médias, afin de déterminer si elles ne portent pas atteinte à la pluralité des médias.

Vivendi a saisi la Commission européenne pour contester ce projet de loi. (avec Bertrand Boucey à Paris)