Le titre Carrefour s'adjuge +1,5% à 1,585 euros mardi, les investisseurs paraissant convaincus par le nouveau plan stratégique du distributeur. A l'occasion de son Digital Day qui se tient ce jour, Carrefour a en effet indiqué qu'il visait un triplement de son volume d'affaires e-commerce, à 10 milliards d'euros, d'ici 2026. Le groupe prévoit également d'investir 3 milliards d'euros à moyen terme, soit 50% de plus que le précédent plan, afin que le digital génère 600 millions d'euros additionnels au résultat opérationnel courant (ROC) dans cinq ans.

Par conséquent, le concurrent de Casino rehausse son objectif d'investissements annuels à environ 1,7 milliard d'euros, dans le haut de la fourchette de 1,5 milliard d'euro à 1,7 milliard d'euros communiquée en début d'année 2021.

De plus, en ligne avec sa démarche de responsabilité sociale et environnementale, le groupe annonce viser la neutralité carbone de ses activités e-commerce à horizon 2030, soit 10 ans avant l'objectif global fixé par le groupe pour 2040.

Pour atteindre ces objectifs, Carrefour accélérera le développement de toutes les formes d'e-commerce alimentaire. Ainsi, au-delà du Drive, modèle dominant en France et dont Leclerc est le leader, le groupe compte s'imposer comme le numéro 1 dans les formats à plus forte croissance tels que la livraison express (moins de 3 heures) et le quick commerce (moins de 15 minutes), afin de renforcer son leadership sur la livraison à domicile dans ses marchés clés.

Afin de marcher sur les plates-bandes d'Amazon, le distributeur entend également investir le "retail media", un autre point central de son plan, grâce à sa plateforme Carrefour Links. Il compte ainsi profiter du marché de la publicité en ligne en monétisant les données de ses clients en vendant par exemple des espaces publicitaires à des annonceurs.

"Cette croissance va nourrir un 'data lake' unique en Europe et qui compte déjà 8 milliards de données propriétaires, explique Alexandre Bompard, le PDG de Carrefour, aux Echos. Cette matière première digitale est exceptionnelle. Elle nous permet, dans le respect de la vie privée, de fidéliser nos clients, de mieux gérer notre assortiment et d'activer de puissants relais de croissance".

Pour soutenir sa stratégie digitale, le groupe ne se dote pas seulement de gros moyens financiers, il y met aussi les moyens humains. Ainsi, d'ici 2024, l'ensemble des employés bénéficiera de formations dédiées au digital en partenariat avec Google. Facebook sera également mis à contribution afin de fluidifier les échanges et encourager l'innovation avec la mise à disposition de sa plateforme de communication 'Workplace from Meta'.

Malgré toute cette bonne volonté, et l'approbation en bourse des investisseurs, Invest Securities ne semble pas totalement convaincu par la stratégie du distributeur. L'analyste affirme notamment que Carrefour resterait dans tous les cas un groupe physique.

"Le volume d'affaires projeté à l'horizon 2026 (et non le CA) devant être rapproché d'un CA actuel de plus de 70 milliards d'euros (plus de 80 milliards en volume d'affaires) et ses objectifs 2026 sont par exemple comparables à la production digitale estimée pour 2021 d'un groupe comme Ahold Delhaize équivalent en CA consolidé à Carrefour", explique Invest Securities.

Le broker estime donc que l'ambition de Carrefour de devenir un leader mondial du digital retail est "un peu présomptueuse, même si la définition du digital retail dépasse celle du périmètre de ses seules activités e-commerce".

Invest Securities remarque également "un certain manque de cohérence apparent entre le budget d'investissement de 3 milliards d'euros sur 5 ans [...] et la seule élévation de ses Capex dans le haut de fourchette du budget initialement prévu de 1,5 à 1,7 milliard d'euros par an".