En proposant une offre tout illimité à 19,99 euros par mois, l'opérateur espère rebattre les cartes dans le mobile, comme il l'a déjà fait avec internet en imposant le standard de la "box" et le forfait à moins de 30 euros.

"On pense chez Free que jusqu'à présent, vous avez été pris pour des vaches à lait", a lancé son fondateur Xavier Niel lors d'une conférence de presse à grand spectacle, martelant que les prix du mobile en France étaient les plus élevés d'Europe.

Le dirigeant d'Iliad, propriétaire de la marque Free, a invité les consommateurs à "donner une leçon" à leur opérateur.

"Vous avez deux solutions : c'est de venir vous abonner chez Free ou de lui demander les mêmes tarifs", a-t-il dit devant une salle comble.

Le forfait illimité de Free Mobile, qui inclut les appels, les textos et MMS et l'accès à internet, comprend également les appels gratuits vers 40 destinations en Europe et aux Etats-Unis, a précisé Xavier Niel lors de la présentation retransmise en direct sur internet.

A titre de comparaison, l'offre équivalente chez Sosh, la marque "low-cost" d'Orange accessible exclusivement sur internet, coûte 49,90 euros avec un débit de deux gigaoctets.

Free, troisième opérateur français dans le fixe avec 4,7 millions d'abonnés, va également proposer un forfait de base à deux euros par mois pour 60 minutes d'appel et 60 SMS.

RUPTURE

Le lancement de ces deux offres, sans engagement de durée, devrait porter un sérieux coup à la concurrence et entraîner les opérateurs dans une bataille sur les prix, estiment plusieurs analystes.

"Ces prix vont créer une rupture sur le marché", souligne Stéphane Beyazian, analyste chez Raymond James Euro Equities.

"Le marché va s'aligner sur les prix de Free dans le mobile, comme ils l'ont fait dans le fixe il y a dix ans. Cela prendra peut-être quelques mois ou même quelques années mais d'ici quelques temps, l'essentiel des Français vont payer autour de 20 euros par mois pour leur facture mobile", prédit-il.

Vers 15h00, l'action d'Iliad gagne 3,45% alors que France Télécom avance de 1,41%, Vivendi, maison-mère de SFR, progresse de 0,31% et Bouygues cède 2,0%.

Le groupe affiche ainsi une capitalisation de près de 5,4 milliards d'euros, supérieure à celle de groupes du CAC 40 comme Cap Gemini, STMicroelectronics ou Accor.

Sans attendre l'arrivée du quatrième opérateur, les trois concurrents historiques ont multiplié les offensives commerciales ces derniers mois en lançant notamment des offres couplant fixe et mobile - baptisées "quadruple play" - ainsi que des forfaits téléphoniques "low cost".

Cette première riposte a entraîné une érosion de leurs marges, sanctionnée en Bourse. France Télécom a ainsi accusé une baisse de 22,19% l'an dernier alors que l'indice sectoriel européen limitait son repli à 6,21%.

Les analystes estiment que la tendance devrait se poursuivre avec l'arrivée de Free Mobile sur le marché.

"Bouygues est vraisemblablement le plus exposé à l'offensive d'Iliad", estime un vendeur actions en poste à Paris. "Les clients de France Télécom sont plus rigides et averses au changement d'opérateur alors que ceux de SFR et de Bouygues Télécom (...) n'hésitent pas à changer au profit des offres les plus alléchantes."

Frank Cadoret, directeur général des segments grand public et professionnel de SFR, a d'ores et déjà dit à Reuters que l'opérateur envisageait de faire évoluer les prix de ses offres "low-cost" RED dans les semaines à venir.

DES MAGASINS EN NOMBRE LIMITÉ

Reste à savoir quelle part de marché Free peut espérer conquérir avec des offres sans subvention de mobile. L'opérateur, qui proposera le très convoité iPhone d'Apple, prévoit à la place un système d'achat à crédit sur une durée pouvant aller jusqu'à 36 mois.

"Nous observons partout en Europe que le consommateur choisit la subvention et le contrat à 24 mois. C'est la norme européenne", a dit à Reuters Guillaume van Gaver, président de l'enseigne de distribution The Phone House, qui évalue à 15% le marché des offres "sim-only", c'est-à-dire sans subvention.

Les offres de Free seront principalement distribuées sur internet, le groupe ayant décidé de n'ouvrir qu'un nombre limité de magasins dans un premier temps avant de décider si une plus large distribution physique est nécessaire, a précisé son directeur financier, Thomas Reynaud.

Xavier Niel a dit espérer, à terme, atteindre une part de marché équivalente à celle qu'il détient aujourd'hui dans le fixe, à savoir environ 25%.

Certains analystes s'interrogent sur l'impact de cette nouvelle offre sur la marge d'Iliad, qui compte atteindre l'équilibre dans le mobile avec une part de marché de 4-5%.

"J'ai du mal à saisir la logique économique et financière d'une offre à 2 euros surtout avec le coût de la licence, des nouvelles fréquences et les dépenses de réseau", souligne un analyste basé à Paris, qui juge en revanche l'opération très efficace en terme de communication.

"Xavier Niel vient de faire avec son nouveau forfait illimité plus pour le pouvoir d'achat des Français que Nicolas Sarkozy en 5 ans", a estimé le socialiste Arnaud Montebourg sur son compte Twitter.

Avec Jean-Baptiste Vey et Alexandre Boksenbaum-Granier, édité par Marc Angrand

par Gwénaëlle Barzic et Leila Abboud