Zurich (awp) - Le logisticien Kühne+Nagel a accusé une sévère normalisation de son activité en 2023, consécutive d'un vif rebond au sortir de la pandémie de coronavirus. Chiffre d'affaires, excédents et bénéfice net ont tous été élagués dans des proportions non négligeables. La direction considère que le pire est désormais passé dans le secteur du fret maritime, plombé notamment par les turbulences en mer Rouge, et espère pouvoir en dire autant pour le fret aérien avant la fin de l'année en cours.

Les recettes ont ainsi fondu de 39,5% à 23,84 milliards de francs suisses, l'excédent d'exploitation avant charges d'intérêts et impôts (Ebit) de 49,4% à 1,90 milliard et le bénéfice net de 47,9% à 1,46 milliard, énumère le rapport diffusé vendredi. Le groupe de Schindellegi indique avoir, sur le dernier partiel, inscrit des coûts de restructuration de 53 millions.

Le taux de conversion, qui représente le rapport entre l'Ebit et le bénéfice brut, s'est amenuisé d'un tiers à 21,7%. Le conseil d'administration proposera néanmoins aux actionnaires un dividende par titre raboté d'un franc à 10 francs suisses.

La contraction tous azimuts s'avère encore plus sévère que redouté par les analystes consultés par l'agence AWP, qui articulaient en moyenne un chiffre d'affaires de 24,19 milliards, un Ebit de 2,01 milliards et un taux de conversion de 22,7%. La rémunération des actionnaires était attendue à 10,15 francs suisses par action.

La performance demeure toutefois supérieure à celle de 2019, dernier exercice avant la crise sanitaire.

Le fret maritime prend l'eau

Principale source de revenus de la multinationale schwytzoise, le fret maritime a livré une contribution au chiffre d'affaires du groupe amputée de plus de moitié à 8,6 milliards de francs suisses, assortie d'une rentabilité opérationnelle presque stable. L'excédent d'exploitation a ainsi perdu 50% à 1,02 milliard.

Les recettes dans le fret aérien ont chutée de 41% à 6,94 milliards, mais l'Ebit a fondu de 61% à 555 millions. Le constat est moins sévère pour le transport routier, avec un recul de 15% des revenus à 3,54 milliards et de 9% de l'Ebit à 133 millions.

La contribution des prestations de services logistiques pour des tiers s'est marginalement repliée de 3% à 4,77 milliard, mais l'Ebit afférent s'est enrobé de 7% à 200 millions.

La direction ne s'aventure pas sur le terrain des perspectives quantifiées ni même qualitatives pour l'exercice en cours. Les attaques de navires en mer Rouge devraient paradoxalement jouer bientôt en faveur des transporteurs, à la faveur d'un renchérissement des tarifs. "Nous parlons là d'une contribution additionnelle de plus de 10 millions de francs suisses sur l'Ebit dès le deuxième trimestre", a laissé entendre en conférence de bilan le directeur général (CEO) Stefan Paul.

Dans l'intervalle, le logisticien a tout de même dû faire passer 400 à 450 cargos par le sud du Cap Horn, prolongeant le trajet d'une douzaine de jours à chaque fois par rapport à une traversée par le canal de Suez.

Mouvement d'humeur des investisseurs

La contre-performance sur la fin de l'exercice écoulé trahit les défis liés à la normalisation dans le rendement du fret maritime au sortir de la pandémie, dans un contexte de volumes en voie de rétablissement mais à faible niveau, observe Michael Foeth, chez Vontobel. L'expert de la banque de gestion zurichoise salue des mesures de préservation des marges adoptées avec célérité.

Gian Marco Werro, pour la Banque cantonale de Zurich (ZKB), constate que si la rentabilité du fret maritime s'est avérée décevante l'an dernier, elle s'inscrivait encore un bon tiers au-dessus de celle de 2019.

La magnanimité des analystes contrastait avec une certaine aigreur des investisseurs, lesquels ont lourdement sanctionné la performance du groupe de Schindellegi. La nominative Kühne + Nagel a ainsi clôturé la séance sur une dégringolade de 13,54% à 257,30 francs suisses, l'indice phare SMI terminant lui en hausse de 0,48%.

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