Le chiffre d'affaires a doublé en cinq ans, et de comptes dans le rouge Opera est passé à un profit d'exploitation qui devrait atteindre au moins $50 millions cette année. La génération de cash est excellente et l'entreprise rachète agressivement ses actions depuis deux ans, en plus de verser un dividende.

Voilà pour la belle histoire. Car il y a sans doute matière à gratter la surface et investiguer davantage. Basé en Norvège, mais enregistré aux îles Caïmans avec des filiales au Royaume-Uni, à Singapour et à Hong Kong, Opera est en effet contrôlé par le sulfureux milliardaire chinois James Yahui Zhou. 

Le parcours de Yahui Zhou ne manquera pas d'étonner. Fondateur de Kunlun Tech, un développeur de jeux vidéos chinois listé sur la bourse de Shenzhen, il fut un temps l'actionnaire de référence de l'application de rencontres gay Grindr — ensuite introduit en bourse via un SPAC, voir notre article de mars 2023 à ce sujet — et s'est aussi essayé à des activités bancaires spécialisées dans les prêts dits "prédateurs". 

Sous sa direction, et sous le commode couvert "d'incubateur" et de "fintech", Opera a lancé une semblable activité de prêts usuriers aux particuliers, en se concentrant sur des marchés comme l'Inde, le Nigeria et l'Egypte. Il y a quatre ans, l'entreprise était d'ailleurs dans le collimateur des célèbres vendeurs à découvert de Hindenburg Research. Ces derniers, c'est le moins que l'on puisse dire, avaient relevé quantité d'éléments confondants.  

Avec un tel pedigree, on n'en attendait pas tellement moins de Yahui Zhou. L'homme d'affaires s'était illustré par son style tendancieux le lendemain de l'introduction en bourse d'Opera, en redirigeant immédiatement $40 millions parmi les fonds nouvellement levés vers d'autres entités qu'il contrôlait, notamment une entreprise qui développait une application de karaoké. 

Sous réserve qu'elle soit honnête — ce qui pour être soutenu nécessiterait assurément une investigation méticuleuse — la manière dont Opera reporte son chiffre d'affaires laisse toutefois penser que son activité historique de navigateur internet est en pleine santé. Voilà qui devrait de nouveau éveiller l'intérêt des amateurs de "due diligence".