Berlin (awp/afp) - Une page se tourne à la tête du groupe allemand Siemens: Joe Kaeser, directeur général depuis sept ans, va céder mercredi sa place à son numéro 2, Roland Busch, après un mandat marqué par une cure d'amaigrissement. Nommé pour cinq ans en mars dernier, Roland Busch, 56 ans, homme discret au profil technique et scientifique, était jusque-là le vice-président du directoire de l'entreprise.

Son entrée en fonction coïncide avec l'annonce, mardi, d'un vaste plan de suppression de 7800 postes dans l'ancienne filiale énergétique du groupe, Siemens Energy. M. Busch hérite d'un groupe aux résultats solides, malgré la pandémie de Covid-19, mais dont la taille a été considérablement réduite par son prédécesseur.

Contraction du chiffre d'affaires

Comme l'ensemble des conglomérats industriels, aux activités larges et multiples, Siemens a dû s'adapter, pendant le mandat de M. Kaeser, à une économie dans laquelle la spécialisation est devenue centrale. Sous l'impulsion de son patron, le groupe s'est concentré sur les secteurs innovants - l'industrie 4.0, les logiciels, l'automatisation-, délaissant d'autres secteurs jugés moins rentables.

La taille du groupe s'est donc considérablement réduite durant son mandat: le chiffre d'affaire annuel, d'environ 76 milliards d'euros en 2013, est passé à 57,1 milliards d'euros (61,15 milliards de francs suisses) en 2020. L'introduction en Bourse, en septembre dernier, de la majorité des parts de Siemens Energy, activité historique du groupe, a particulièrement marqué les esprits.

Le conglomérat détient encore 33,1% des parts de cette division, et reste actionnaire principal de son ancienne filiale. Mais il devrait se délester de davantage de parts durant le mandat de M. Busch, pour devenir à terme minoritaire.

Siemens a également introduit en Bourse sa branche santé, Siemens Healthineers, en 2018, et cédé ses parts dans d'autres filiales, notamment Flender (composants industriels), ou Osram (production de Led). Pour réduire la voilure, l'entreprise, aussi très présente en Suisse, a aussi mené de vastes plans de restructuration ces dernières années, supprimant plusieurs dizaines de milliers d'emplois.

Une stratégie critiquée par les syndicats, qui estiment que Siemens a trop pris en compte les demandes de ses actionnaires, alléchés par les cessions d'activité successives, au détriment de l'emploi. "Nous espérons que Roland Busch éloignera Siemens d'une stratégie orientée vers la Bourse", a déclaré à l'AFP le syndicat allemand IG Metall, qui représente les salariés du groupe.

"Meilleure position"

La politique du groupe risque "d'être la même", prévient toutefois Andreas Lipkow, analyste pour Comdirect. M. Busch participe depuis longtemps aux décisions chez Siemens: il siège depuis 2011 au directoire du conglomérat, dont il occupait la vice-présidence depuis octobre 2019.

"Siemens est dans une meilleure position aujourd'hui qu'il y a quelques années", a affirmé ce dernier dans une interview au quotidien Sueddeutsche Zeitung en décembre, défendant la politique de son prédécesseur. Débarrassé de ses activités peu rentables, l'entreprise a en effet publié mi-janvier des résultats provisoires solides pour le premier trimestre 2020/2021.

Le conglomérat s'attend même à une "hausse modérée" pour l'année 2021, malgré la crise du coronavirus qui pèse toujours et a plombé l'exercice 2019/2020. Les activités numériques que le groupe allemand a gardées, notamment les logiciels et l'automatisation industrielle, alimentent ces performances.

La division mobilité stagne, en raison de la crise du coronavirus, mais un contrat de 7 milliards de dollars pour une ligne de train à grande vitesse en Egypte, signé en janvier, pourrait la faire repartir. Le défi du nouveau directeur général sera désormais de "favoriser les synergies" et de "consolider" les avancées de son prédécesseur, relève le quotidien économique allemand Handelsblatt.

La passation de pouvoir doit avoir lieu lors de l'assemblée générale des actionnaires, après la publication des résultats du premier trimestre 2020/2021. En raison de la situation sanitaire, il n'y aura ni fête d'adieu, ni célébrations pour cette transition, qui se fera via visioconférence.

afp/vj