San Francisco (awp/afp) - Le groupe de télécoms américain AT&T a encore souffert au deuxième trimestre à cause de ses activités traditionnelles (télévision par satellite, téléphonie fixe) malgré le rachat du groupe de médias Time Warner, qui marque sa volonté de se renforcer dans les contenus, le nerf de la guerre.

Dans un paysage médias et télécoms en plein bouleversement sous la poussée des géants technologiques et leurs services de vidéo en streaming, AT&T a notamment perdu 286.000 abonnés à la télévision par satellite (DirecTV), une perte que n'ont pas pu compenser intégralement 46.000 nouveaux clients au mobile, notamment les abonnés mensuels (postpaid) très courtisés par les opérateurs télécoms.

AT&T a déjà entamé son virage vers les nouvelles habitudes des consommateurs, qui s'éloignent des offres traditionnelles et notoirement chères aux Etats-Unis, pour privilégier les plateformes vidéo comme Netflix ou Amazon Prime Video. Ainsi, le service de streaming DirecTV Now d'AT&T, proposant de petits prix, a enregistré, lui, 342.000 nouveaux abonnés.

Selon les estimations du cabinet spécialisé eMarketer publiées mardi, les désabonnements à la télévision payante traditionnelle vont s'accélérer encore cette année aux Etats-Unis : la population des adultes ayant résilié leur abonnement au câble, au satellite ou aux offres d'opérateurs téléphoniques va croître de 32,8% durant l'année en cours, contre 22% initialement prévu, pour atteindre 33 millions de personnes.

Verizon, autre gros groupe de télécoms américain qui a publié ses résultats plus tôt mardi, a vu le chiffre d'affaires ajusté de ses services d'internet/téléphone fixe/télévision, reculer de 3,4%.

C'est ce qui explique la volonté d'AT&T de racheter Time Warner, qui possède notamment la chaîne à succès HBO, CNN ou les studios Warner Bros, pour environ 85 milliards de dollars malgré l'opposition du ministère de la Justice (DoJ).

Warner Media

Attaquée devant les tribunaux par le DoJ, la fusion avait été validée sans conditions par un juge en juin. AT&T avait dans la foulée annoncé le bouclage de l'opération. Mais le 12 juillet, le DoJ a décidé de faire appel, mais cette décision ne suspend pas la fusion.

La tentative de blocage de cette transaction, initialement annoncée en 2016, l'a considérablement retardée, créant des difficultés pour AT&T et des frais financiers.

"Nous avons eu quelques mois de diversion" mais "cela est derrière nous", a souligné à cet égard le PDG du groupe Randall Stephenson lors d'une conférence téléphonique avec des analystes.

"Nous avons désormais assemblé les éléments clés d'un groupe de médias moderne", a-t-il assuré.

Crucial, le rachat de Time Warner --rebaptisé Warner Media au sein d'AT&T-- n'a pas eu d'impact significatif sur les comptes d'AT&T publiés mardi car il a été bouclé une quinzaine de jours seulement avant la fin du deuxième trimestre, clos le 30 juin. Ce rachat a quand même permis d'ajouter 1,1 milliard de dollars au chiffre d'affaires (grâce à la publicité et une hausse des abonnements à HBO notamment) mais a aussi entraîné des dépenses opérationnelles.

Déception

Ces résultats se sont révélés en demi-teinte et ont déçu les investisseurs, malgré un relèvement de la prévision de bénéfice annuel ajusté, à 3,50 dollars minimum par action, poussé par l'acquisition de Time Warner. Le titre perdait 1,14% à 31,32 dollars vers 23H00 GMT dans les échanges électroniques suivant la clôture de Wall Street.

Le bénéfice net a certes bondi de 30% à 5,1 milliards contre 3,9 milliards l'an dernier, mais c'est principalement grâce à des changements comptables. Ajusté des éléments exceptionnels et rapporté par action, référence en Amérique du Nord, le bénéfice ressort à 91 cents, au-dessus des attentes.

En revanche, à 39 milliards de dollars (-2%), le chiffre d'affaires ressort sous les attentes. Là encore, le groupe attribue ce repli en partie à un changement dans ses méthodes comptables. Il souligne que sans cet élément exceptionnel, le c.a. aurait été en légère hausse.

Autre orientation stratégique soulignée à nouveau mardi par AT&T: la publicité, dans laquelle il veut se renforcer, grâce à Time Warner ou au récent rachat de AppNexus, spécialisée dans la publicité numérique.

afp/rp