LONDRES, 9 février (Reuters) - Alors que les marchés boursiers chinois ont fermé jeudi et que la séance a été écourtée ce vendredi à Hong Kong pour les vacances du Nouvel An lunaire, les chiffres de l'inflation aux Etats-Unis et au Royaume-Uni seront les principaux indicateurs à suivre à partir de mardi.

Sur le front monétaire et politique, la réunion de la banque centrale russe et les élections en Indonésie seront les grands dossiers sur les marchés émergents.

Tour d'horizon des perspectives de marché dans les prochains jours:

Alors que nombre de traders tentent désespérément d'anticiper le calendrier de la première baisse des taux directeurs aux Etats-Unis, leurs prévisions se heurtent à la vigueur actuelle de l'économie et aux déclarations de banquiers centraux qui insistent sur le fait qu'il faudra davantage de preuves avant d'affirmer que la lutte contre l'inflation est terminée.

La forte hausse des créations d'emplois en janvier aux Etats-Unis, à 353.000 contre un consensus de 180.000, est ainsi venue rappeler que le marché du travail reste tendu malgré les hausses massives de taux d'intérêt décidées depuis mars 2022 par la Réserve fédérale américaine (Fed). Cette statistique et d'autres ont depuis repoussé les anticipations d'une baisse des taux de la Fed en mars avant que Jerome Powell, le président de l'institution, confirme lui-même qu'une telle mesure était exclue. En conséquence, les rendements obligataires et le dollar sont repartis à la hausse.

Les nouvelles données mensuelles sur l'inflation, prévues mardi, seront à cet égard particulièrement surveillées. Tout signe indiquant que les pressions sur les prix reprennent de la vigueur pourrait repousser davantage le calendrier de la baisse des taux.

Les économistes interrogés par Reuters s'attendent à une augmentation de 0,2% des prix à la consommation (CPI) en rythme mensuel après une hausse de 0,3% de décembre.

2/ LE DOLLAR TOUJOURS AU TOP

La résilience de l'économie américaine profite logiquement au dollar alors que fin 2023 nombre d'observateurs du marché prenaient pour acquis que la monnaie américaine allait forcément se déprécier cette année, les traders prévoyant jusqu'à six baisses de taux de la Fed en 2024.

Avec une croissance exceptionnelle de l'emploi, un secteur des services florissant, un ralentissement de l'inflation, une amélioration des conditions de prêt et un marché boursier en plein essor, seulement quatre baisses de taux sont désormais envisagées.

Le billet vert est à son plus haut niveau depuis trois mois, laissant les devises concurrentes, dont les banques centrales doivent conjuguer avec à la fois un ralentissement de l'inflation et de la croissance, sur le carreau.

Depuis le début de l'année, aucune devise des pays du G10 n'est en territoire positif face au dollar. Les investisseurs ne détiennent toujours pas de position haussière nette sur le billet vert, ce qui laisse penser que si l'écart entre l'économie américaine et le reste du monde continue de se creuser, le dollar pourrait bénéficier d'un nouveau coup de pouce.

3/ EMPLOI ET INFLATION DANS LE VISEUR DE LA BOE

La Banque d'Angleterre (BoE), qui a décidé ce mois-ci de laisser ses taux directeurs inchangés, va étudier avec la plus grande attention les données sur l'emploi prévus mardi, ainsi que l'indicateur des prix à la consommation, prévu mercredi.

Les récentes révisions des données sur l'emploi de novembre ont montré que le taux de chômage au Royaume-Uni était plus bas qu'on ne le pensait. Selon les chercheurs de Pantheon Macroeconomics, cela donne à penser que la statistique de décembre pourrait également être inférieure à l'estimation de 4,3% de la BoE.

La tâche de la Banque d'Angleterre pourrait en outre être compliquée par l'évolution de la dynamique des prix, l'institution estimant que l'inflation reviendra à son objectif de 2% cette année tout en avertissant qu'elle pourrait augmenter à nouveau au troisième trimestre.

Les marchés monétaires ont repoussé le calendrier de la première réduction des taux de la BoE de mai à juin. Pantheon Macroeconomics voit les taux directeurs britanniques refluer à 4,5% d'ici décembre, contre 5,25% actuellement, mais note que "les risques qu'une première baisse intervienne plus tard augmentent".

4/ L'HÉRITAGE DE JOKO JOKOWI

Les Indonésiens se rendront aux urnes mercredi pour élire leur prochain dirigeant alors que Joko Widodo s'apprête à quitter ses fonctions de président après une décennie au pouvoir dans la troisième plus grande démocratie du monde. Trois candidats sont en lice pour lui succéder et les enquêtes d'opinion donnent l'actuel ministre de la Défense, Prabowo Subianto, comme favori pour ce scrutin.

Joko Jokowi, qui n'est pas autorisé à se représenter après deux mandats, laisse derrière lui une économie prospère qui a bénéficié de projets d'infrastructure massifs associés à des programmes de protection sociale.

Tout n'est cependant pas rose: la révision de l'âge minimal pour se présenter à l'élection présidentielle afin de permettre à l'un des fils de Joko Jokowi d'être candidat au scrutin a provoqué des remous au sein du gouvernement et des spéculations sur une possible démission du populaire ministre des Finances.

Cela a ébranlé les marchés indonésiens, tandis que la roupie a perdu près de 2% depuis le début de l'année.

5/ UNE PAUSE EN RUSSIE ?

La banque centrale de Russie pourrait opter pour une pause sur ses taux lors de sa réunion de politique monétaire du 16 février. Les responsables de la banque ont relevé les taux de 850 points de base à 16% depuis juillet pour lutter contre une inflation élevée, alimentée notamment par les pénuries de main-d'oeuvre, la faiblesse du rouble et la hausse des dépenses budgétaires.

Alors que le président Vladimir Poutine cherche à se faire réélire en mars, un peu plus de deux ans après l'invasion de l'Ukraine, la banque centrale est confrontée à la tâche ardue de juguler l'inflation sans augmenter les coûts d'emprunt pour les consommateurs et les entreprises.

Elle est également en désaccord avec le Kremlin sur une extension du contrôle de capitaux qui a soutenu le rouble depuis octobre.

(Rédigé par Rae Wee à Singapour, Ira Iosebashvili à New York et Amanda Cooper, Naomi Rovnick et Alexander Marrow à Londres; graphiques par Vineet Sachdev, Kripa Jayaram, Prinz Magtulis, Riddhima Talwani et Sumanta Sen; compilé par Dhara Ranasinghe; version française Claude Chendjou, édité par Kate Entringer)